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… Bretagne indépendante, puis autonome …
Extrait de La Révolte des Tracteurs de Yann Brekilien
« Naïk croisa les bras et fronça les sourcils, sévère.
– Comment ? Tu n’as pas honte d’ignorer l’histoire de ton pays ?
Sa voix s’exalta.
– La Bretagne a été indépendante pendant dix siècles et demi – parfaitement, dix siècles et demi – puis autonome pendant plus de deux siècles et demi, avant d’être intégrée à la France, ce qui ne remonte même pas à cent quatre-vingts ans. Nous avons eu des rois glorieux. Et nos armées ont plus d’une fois infligé de cuisantes défaites à celles de France et d’Angleterre.
– Et alors, au temps de l’indépendance, tu dis que c’était la prospérité ?
– Au temps de l’indépendance, oui, je pense bien ! L’argent gagnée par les Bretons était employée chez eux ; les impôts qu’ils payaient servaient à l’équipement de leurs villes et de leurs campagnes. Ils vendaient et achetaient à qui bon leur plaisait. Ils passaient les accords commerciaux qui servaient le mieux leurs intérêts. Les élites restaient au pays. Résultat : la Bretagne était riche et il faisait bon y vivre.
Une telle flamme brillait dans les yeux de la jeune fille que Lan se laissa gagner par son enthousiasme. (..)
– Mais les paysans ? Tu crois que les paysans étaient heureux ? S’inquiéta pourtant le jeune homme, avec une nuance de scepticisme, car il se souvenait qu’on lui avait beaucoup parlé à l’école de la misère des paysans au Moyen Age.
– Heureux ? Et comment ! On dit même qu’il y en avait qui avaient de la vaisselle d’argent.
– De la vaisselle d’argent ? Gast !
– En tout cas, tu n’as qu’à regarder les églises, les calvaires, les enclos paroissiaux, les chapelles, tous les chefs-d’œuvre que leurs économies leur ont permis d’édifier en commun jusque dans les plus petits bourgs. Tu crois qu’aujourd’hui la population de Sizun aurait les moyens de bâtir un ensemble paroissial comme celui qu’ont bâti nos ancêtres ?
– Sûrement pas ! »
Yann Brekilien
La Révolte des Tracteurs
Éditions La Table Ronde
1968
2 commentaires
Une vérité que les Bretons ne veulent pas connaître.
Pire, une vérité qu’ils nient et rejettent massivement.
Il m’est arrivée plusieurs fois de participer à des forums sur la Bretagne, où au minimum l’ensemble des personnes étaient régionalistes ou autonomistes, parfois indépendantistes.
Souvent avec des profils de type huniversitaire, science-po, chefs d’entreprise, fonctionnaires
L’unique vision autorisée de l’histoire de la Bretagne était celle d’un pays pauvre, très pauvre, mais qui depuis les années 60 se battait pour redresser la tête.
A chaque fois, je demandais à prendre la parole pour dire que cette vision ne correspondait pas à la réalité historique…
Qu’au contraire, sur toute son histoire, la Bretagne fut un pays riche, au point même d’être l’un des plus riches d’Europe (du 13ème au 17ème siècle).
A chaque fois, ma présentation, bien que exact sur le plan historique, était perçu comme exagéré et voir même absurde.
J’avais même le sentiment que récuser une Bretagne pauvre était une forme de blasphème… du style : « Comment ose t-il prétendre que la Bretagne n’était pas pauvre, et surtout pour prétendre qu’elle était immensement riche… »
Et la j’évoque la réaction de personnes prétendument engagées pour la Bretagne, des gens sensés connaître un minimum…
L’histoire d’une Bretagne riche est un tabou dans le milieu breton, cette réalité nombre de personnes ne la veulent pas…
Nous avons un grave problème avec l’acceptation de l’histoire réelle de notre pays.
Peut-être un début de réponse : https://www.nhu.bzh/syndrome-de-becassine-et-syndrome-de-stockholm-en-bretagne/
Merci du commentaire