Son coming out, tôt ou tard, il faut le faire, pour se libérer.
Très tôt, je voyais bien que j’étais un peu différent de la plupart des autres.
J’ai commencé à m’en rendre compte au collège en fait. Physiquement déjà, je portais des accessoires que la majorité des autres élèves garçons ne portaient pas. Heureusement, je n’étais pas seul. Mais à cet âge-là, on ne réfléchit pas plus. Ensuite j’ai bien vu que certaines de mes lectures et de mes habitudes de sortie étaient également différentes. Peu à peu je me suis rapproché de ceux qui dans ma classe, me semblaient avoir les mêmes tendances.
Sommaire
Les jeunes filles aussi
Étrangement, ai-je alors pensé, certaines jeunes filles semblaient également différentes de leurs copines de classe. Alors, peu à peu, et naturellement, je me suis rapproché des garçons qui me paraissaient avoir les mêmes goûts.
A la maison, je suis sûr, maintenant, avec le recul, que mes parents et mes deux soeurs avaient dû remarquer ma différence. Mais tous feignaient de ne rien voir. Et donc ils ne m’ont jamais rien dit. Par pudeur sans doute. Peut-être aussi par crainte du qu’en dira t-on.
A l’époque, cette tendance était encore un peu tabou. Mais elle représentait toute une partie de mon identité. Sans elle je n’étais pas entier et ne pouvais donc pas vivre normalement ma vie d’homme et de Citoyen débutant.
Être différent est une vraie richesse.
Une richesse pour soi et pour les autres, pour toute la collectivité. Être ainsi n’est pas une tare ou un défaut, bien au contraire. Les hommes et les femmes qui sont habités de cette richesse, sont comme tous les autres, le résultat des générations précédentes. Nous sommes le pur produit d’une Histoire, d’une éducation et d’un vivre-ensemble.
Puis les années ont passé.
Le sujet est devenu de moins en moins tabou. La parole s’est libérée, surtout. Certains médias ont commencé à nous expliquer qu’il ne fallait pas y voir une quelconque déviance. C’est dans la nature de l’individu. Il faut respecter les différences, toutes les différences.
Des associations ont beaucoup milité, et le font de plus en plus, pour nous sortir de l’ombre et parfois d’une honte mal assumée. Et maintenant de plus en plus de jeunes, garçons et filles, prennent conscience de cette fabuleuse richesse qu’ils ont au plus profond d’eux-mêmes, et de plus en plus tôt.
C’est enfin devenu normal, presque tendance.
Enfin, après toutes ces années durant lesquelles j’avais plus ou moins quand même refoulé cette partie d’identité, j’ai craqué et fait mon coming-out. En langue française, la traduction est « sortir du placard ».
Je l’ai annoncé à mes parents, je m’en souviendrais toujours, un Dimanche midi, pendant le repas.
Je suis Breton !
Bien sûr que le fait d’être né en Bretagne, d’y vivre et de n’avoir que des Bretons comme parents, grands parents, et autres ancêtres bien avant … faisait de moi automatiquement et naturellement, un Breton.
Mais ce n’est pas de cela dont je vous parle.
J’ai fait le coming-out du Breton qui assume enfin sa bretonnité dans ce qu’elle a de plus profond. J’avais peu à peu pris totale conscience que j’étais différent des gens de la rue qui seraient aussi bien à Nantes qu’à Madrid, à Fougères qu’à Oslo, à Quimper qu’à Strasbourg.

Moi je ne me sens entier qu’ici, en Bretagne.
J’ai besoin de savoir que j’y suis. J’ai un besoin vital de cet air atlantique, de ce crachin parfois. J’aime les gens d’ici, avec leurs différences, qui sont un peu les miennes. Je ne peux pas rester trop longtemps sans admirer nos magnifiques paysages. Bien sûr qu’il existe ailleurs des paysages tout aussi beaux, voire (pas sûr quand même !) plus beaux.
Mais ce ne sont pas les miens, les nôtres.
Ils ne me procurent pas le même effet.
Je ne pourrais vivre nulle part ailleurs qu’en Bretagne.
Y survivre peut-être !
Mais moi je veux VIVRE !