safari en Bretagne

Quand la bourgeoisie parisienne pratiquait le safari en Bretagne

de NHU Bretagne
Publié le Dernière mise à jour le

Safari en Bretagne

Ce texte est extrait, dans notre Série « Bouts de Livres » du passionnant ouvrage (que nous vous recommandons) de Stéphane DURAND intitulé « 20000 ans ou la grande histoire de la nature« .
Éditions Actes Sud

Safaris bretons

La vie marine était d’une abondance proprement inconcevable et impossible à chiffrer. Et pourtant l’homme a réussi à capturer l’infini dans ses filets et à vider la mer.
Les justifications sont nombreuses et légitimes. Mais quelle est la raison d’être de la destruction d’animaux aussi innocents et « inutiles » que les oiseaux de mer ? Aucune, si ce n’est le pur plaisir du coup de feu et l’orgueil du trophée.

La chasse aux calculots.

Dès l’ouverture en 1863 de la ligne ferroviaire desservant Saint Brieuc, les Chemins de Fer de l’Ouest vantent auprès des bourgeois de Paris des safaris bretons, la chasse aux « calculots, ces perroquets de mer se terrant comme des lapins ». Ainsi qu’on surnommait alors les macareux moines. Pour des citadins en mal d’aventure, la Bretagne de l’époque apparaît follement exotique. Embarquant avec force cartouches à Perros Guirec vers l’archipel des Sept Iles, les chasseurs tirent depuis le pont du bateau. Directement dans les colonies en pleine période de nidification. Ils ne se donnent que rarement la peine de ramasser les cadavres qu’ils jettent en tas sur la plage dès leur arrivée.

Le Fou de Bassan, Morskoul, le plus grand des oiseaux de Bretagne, chez lui dans la réserve ornithologique des Sept Iles

Réserve Ornithologique des Sept Iles, côte nord Bretagne _www.nhu.bzh

Le Lieutenant Hémery, ornithologue amateur, écrit en Juin 1911 au Directeur du Muséum de Nantes

« L’île offre l’aspect d’un véritable champ de carnage. Au bord des trous où pullulaient les mouches de cadavres, une odeur infecte. Par place, des centaines de douilles vides en tas sur le sol comme les étuis des mitrailleuses après un combat. Nous extrayons des trous des poussins morts, des oeufs abandonnés et pourris …

Nous apprenons alors par nos matelots que huit jours avant, deux ou trois individus sont venus de Paris et se sont fait débarquer dans l’île avec une caisse de soixante kilos de cartouches. Ils n’ont quitté l’île qu’après avoir tout brûlé sur ces inoffensifs oiseaux , tués au moment où ils venaient au nid apporter la nourriture à leurs petits. Les cadavres des victimes (près de trois cent, nous a t-on dit) ont été ramenés à Perroz, et là, jetés sur la grève.

Ces messieurs les chasseurs (!), fiers de leurs tableaux, n’en ont emporté qu’un ou deux exemplaires.

Il paraît que ces vandales répètent presque tous les ans ces inutiles et stupides massacres. On peut estimer, dans ces conditions, que la colonie de macareux de l’île Rouzic aura, dans trois ou quatre ans, complètement abandonné ces parages ».
Et effectivement, la principale colonie française de macareux passe de 15000 couples en 1900 à seulement 400 en 1912, date à laquelle la Ligue pour la Protection des Oiseaux parvient à créer la réserve naturelle, protégeant ainsi les derniers « calculots ».

Safari en Bretagne
Illustration Greyhaven

safari en Bretagne

20000 ans ou la grande histoire de la nature de Stéphane Durand aux Éditions Actes Sud

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