C’est un survivant de l’île de France qui vous écrit.
Et je vous écrit sous l’anonymat de crainte de représailles pour avoir parlé.
Je dis « survivant » parce que dans nos contrées renfermées autour de notre capitale, on survit plus qu’on ne vit. Vivre sur une île isole toujours un peu. C’est bien pour cela que l’on a nommé notre contrée l’île de France. Tant on s’est finalement isolé du reste de cette France.
Dans cette île surpeuplée de douze millions de personnes, on vit entre nous et la plupart du temps on ignore le reste de l’Hexagone. Sauf en certaines occasions où vous nous êtes « utiles » … pour manger ce que vous produisez et aller en vacances.
Sommaire
Le train va enfin rompre notre isolement.
Vous qui vivez en Bretagne, vous avez l’impression que c’est votre pays qui est isolé. C’est vrai que nous faisons d’ici tout ce que nous pouvons pour vous le faire croire. Nous possédons les principaux médias pour vous imposer nos visions.
Mais ici on étouffe.
Mais vous ne le savez pas parce qu’on évite, évidemment, de vous l’avouer : ici on étouffe à longueur d’année. On étouffe d’air vicié, de promiscuité, de stress, de bruit, de frustrations diverses.
Pour embarquer de nos grands aéroports vers les tropiques, la plupart d’entre nous n’en ont pas les moyens. Les spectacles que les étrangers nous envient : cinquante euros une place et une heure de métro bondé et puant pour s’y rendre. Au bout d’un mois, tu préfères rester dans ton appartement triple-vitré et rêver d’un train.
Rêver d’un train plus rapide et plus économique qui me fera oublier un temps cet isolement.
Le train pour désenclaver mon île.
J’en rêve en permanence.
De vos espaces et de vos horizons que nous n’avons pas dans notre contrée isolée. Aussi de votre air respirable et de votre environnement agréable. Également de vos spectacles tellement plus beaux et abordables que les nôtres, que sont vos paysages naturels permanents ou vos festivals de musiques. De vos vraies forêts et de vos lacs frais.
Alors je veux ici me faire la voix de tous les franciliens, comme nous nous sommes auto-nommés, pour vous dire un grand merci. Trugarez comme vous dites dans votre langue, je crois.
Un grand merci d’avoir financé avec vos impôts ce gain de temps de la ligne du train LGV Ligne à Grande Vitesse, qui va nous permettre de venir plus souvent et plus rapidement chez vous, en Bretagne. Nous désenclaver, pour nous ressourcer de temps en temps.
A coup de campagne de communication, que vous financez aussi bien sûr par vous-mêmes, nous vous avons fait croire que ce gain de temps était pour vous. Pour que vous puissiez venir plus vite dans notre enfer. Mais très peu d’entre vous, parmi les 4,6 millions d’habitants de Bretagne, viennent finalement à Paris. Ou tellement peu souvent. Et surtout en avion, l’aller et retour dans la journée. Ou juste de passage, en transit pour aller ailleurs.
Nous avons écrit : La Bretagne à 1h30 de Paris.
Parce que nous ne pouvions pas écrire la vérité, c’est vous qui payez : Paris à 1h30 de la Bretagne aurait été plus juste.
Et nous appelons ici Bretagne que sa partie orientale, avec vos deux grandes métropoles que sont Nantes et Rennes.
Pour vous, Bretonnes et Bretons, il vous faudra toujours et encore autant de temps pour traverser votre pays en train d’est en ouest, et allez dans votre Penn ar Bed, votre début du monde.
Encore merci, et kenavo.
L’Auteur de cet article vit dans ce réduit d’île de France, et a souhaité gardé l’anonymat « par peur de représailles« , nous a t-il expliqué. Car il est des vérités pas toujours bonnes à dire. Cette personne travaille dans un administration et craint pour son emploi.
Désenclaver … qui ?
3 commentaires
Excellent article, m’est avis. Tres bon resumé, bien tourné, d’une situation où l’on vend aux autres qq chose dont ils n’ont pas besoin (au detriment de leurs veritables necessités en matiere de de liaisons ferrovieres internes à la Bretagne, mais aussi de liaisons maritimes et aeriennes de Bretagne vers l’Europe en utilisant les equipements existants), tout en leur faisant les poches, en ayant detruit au passage et sur le passage des zones agricoles extremement importantes en volume et en qualité…bref une lubie technocratique, une aberration economique, soutenue par des politiques « locaux » aveuglés ou irresponsables ou les deux mais dans tous les cas toxiques pour la Bretagne et à mes yeux disqualifiés…mais le summum de cette manipulation mediatique autnat qu’economique c’est que quiconque ose dire ce genre de choses passera ipso facto pour un cul-terreux arriéré qui n’a rien compris aux « enjeux de la modernité », un « ennemi du progres » et un « sectateur de l’isolationisme » signe de ce « repli communautariste » patent puisqu’il semble maintenant s’attaquer meme aux moyens de transports destinés à « desenclaver » cette peninsule qui decidement ne comprend pas qu’elle resterait « naturellement ecartée » de la lumière (centrale et parisienne) sans cette « performance » SNCFienne. Une preuve supplementaire que le fait de parler la meme langue ne garanti nullement d’etre entendu, et encore moins compris de cette elite eclairée qui sait mieux que nous ce qu’ils nous faut, puisque nous sommes, semble t il, à leurs yeux des attardés inconsequents qui pensent qu’etre sur une presqu’ile ouverte sur trois cotés au reste du monde nous qualifirait pour une ouverture maritime majeure, (cretins que nous sommes!), puisque pour nous trois siecle et demi de concept de « frontieres naturelles » n’a semble t il pas suffit à nous faire comprendre ( abrutis!) que notre seul salut etait à l’est et à paris-la grand-ville…, puisque notre histoire, notre culture, nos langues, nos heritages economiques ne nous disposent nullement à considerer nos cousins immediats Irlandais, Cornouiallais, Gallois et Ecossais au nord et Asturiens, Galiciens et oui Basques, mais aussi tous les autres voisins, peuples et nations pour lesquels la mer nous est un lien puissant, majeur, essentiel, et surtout COMMUN, de l’autre coté de l’Atlantique ou au fond de la Baltique, soit juste à qq jours de navigation dont l’histoire, la nature et nos habiletés ont fait de nous autres des experts reconnus partout sur cette petite planete couverte à 70% d’oceans et servie par de nombreux peuples de marins.
Cette histoire de LGV est pathetique, tellement « fin de regne », tellement le symptome de cet aveuglement nombriliste et arrogant dont la stupidité destructrice n’ a d’egal de la capacité de cet etat francais dont il ne reste plus que la compulsive mais dangeureuse manie heritée du colonialisme, de faire comme ces vieux despotes qui n’existent qu’au travers de la faculté de nuire avec suffisament de perversité pour vous faire croire que c’est pour votre bien.
Non nous ne sommes pas des retrogrades, des attardés, des anti-progres parce que nous refusons Plogoff, NDDL ou la LGV…Nous avons, excusez nous de cette arrogance, une autre manière de considerer le progres, la vie en commun, le developpement, la notion de richesse et son partage avec le reste du monde. C’est juste çà notre probleme..
Magnifique 😉 Pas mieux tout est dit , et ça fait du bien de le lire 😉 !!!
Tout est dit . Ou presque. Très bien .