Calendrier de Coligny

Le Calendrier de Coligny expliqué en détails

de Maelig TREDAN
Publié le Dernière mise à jour le

« […] pour comprendre les époques historiques passées,
il faut d’abord saisir la manière dont elles ont mesuré le temps »
(J-M Le Contel, Paul Verdier, Un Calendrier Celtique)

Qui ne s’est jamais demandé d’où venait notre actuel calendrier ?

La culture gréco-romaine dont on nous a abreuvé depuis l’enfance ne manque pas de nous informer de son origine latine. Un calendrier solaire, qui ne tient pas compte des cycles lunaires. Trop compliqué à accorder dirons-nous. Et pourtant, les Celtes avaient semblerait-il déjà résolu l’équation leur permettant de réaliser cette prouesse…

Un divorce entre la lune et le soleil.

C’est en 46 av-JC que César instaure officiellement un calendrier basé sur l’année solaire : 365,25 jours sur douze mois. Un petit quart de jour demeure, mais si facile à combler en ajoutant, tous les quatre ans, une journée supplémentaire.

Simple comme bonjour peut-être, mais si désynchronisé avec la nuit. Celle avec laquelle les Celtes faisaient commencer le jour. Impossible pour eux d’accepter un tel décalage. Comment faire alors coïncider ces deux rythmes ?

Observations fines, ajustements permanents, mais surtout compréhension du monde, de la terre et de ses cycles, ont permis aux Druides, les « très savants », de réaliser cet exercice subtil, à l’instar des Chinois et des Hindous.

Le trésor de Coligny.

C’est dans l’Ain, en l’an 1897, qu’est découvert le Calendrier de Coligny par Alphonse Roux, agriculteur. Brisé en plusieurs fragments de bronze, dont de nombreux sont manquants, il est pris en charge par Paul Dissart, conservateur de musée, qui entreprend de le reconstituer pour en percer les secrets. Vaste entreprise, qui durera des dizaines d’années et nécessitera l’appui de nombreux chercheurs…

Daté aux alentours du 1er siècle avant J-C, ce calendrier aux dimensions respectables (1,48 m sur 0,90 cm) révèle une organisation de soixante-deux mois, nommés en gaulois, sur cinq années, soit visiblement 1838 jours. En face de chacun d’eux, numérotés en chiffres romains, est percé un petit trou, destiné à recevoir une goupille pour indiquer la date précise.

calendrier de coligny

Calendrier Celtique de Coligny – détail

Des mois et des lustres :

Comment lire et comprendre ce calendrier de Coligny?

Quelques éléments pour commencer :
Une « année lunaire » (autrement dit, douze lunaisons) comporte 355 jours (354,36 jours pour être précis). Alors qu’une année solaire en compte 365,242.
Les années regroupent dans la majorité des cas douze mois lunaires, lesquels comptent jusqu’à trente jours. Ces mois sont systématiquement divisés en deux parties, nommées quinzaines. Un terme que l’on emploie aujourd’hui couramment pour désigner un intervalle de temps de deux semaines… Signe que les habitudes de langages se sont perpétuées à travers les âges !

Ces quinzaines correspondent aux phase lunaires.

On marque la séparation entre ces deux parties par le mot Antenoux, qui signifierait « retour à la nuit ». Différentes théories s’affrontent concernant le jour du cycle lunaire à retenir pour commencer le mois. Il semblerait logique et simple que le premier jour soit remarquable, et corresponde à une pleine ou une nouvelle lune. Pourtant, Pline l’Ancien, dans son Histoire Naturelle, apporte une information intéressante « Avant tout, il faut que ce soit le sixième jour de la Lune, jour qui est le commencement de leur mois, de leurs années et de leurs siècles, qui durent trente ans ; jour auquel l’astre, sans être au milieu de son cours, est déjà dans toute sa force » .

Ainsi, le mois commencerait au premier quartier d’une lune montante.

Quant aux lustres, comme celui représenté sur le calendrier de Coligny, ils comptent cinq années. Mais 5×12 font 60. La terre, qui poursuit sa course autour du soleil, a besoin de 62 mois pour effectuer 5 révolutions. Au terme d’un lustre de 60 lunaisons, elle a donc deux mois de retard.
Devant ce constat, les druides ont choisi de venir intercaler 30 jours de mois intercalaire tous les 30 mois, c’est-à-dire tous les deux ans et demi, à la fin de chaque demi-lustre (12 + 12 + 6 mois).
Trente jours qui semblent récapituler les 30 derniers mois et permettent au soleil de rattraper la lune.
Trente années pour un siècle.

Un lustre celte compte donc 62 mois.

Quant aux siècles… ils durent aussi 30 ans ! Soit six lustres. C’est à Pline que nous devons à nouveau cette précieuse information.
Une fois de plus, attention aux décalages. En effet, 30 années solaires contiennent l’équivalent de 371 lunaisons. Mais le siècle celtique compte 6 lustres x 62 mois, soit 372 mois. Il s’agit donc, tous les 30 ans, de sauter l’un des deux mois intercalaires (probablement celui précédent Samon).
30 jours, 30 mois, 30 ans pour accorder le temps :

Quelle serait alors notre exacte correspondance avec le calendrier celtique ?

En croisant les informations issues des recherches autour du calendrier de Coligny, les témoignages de Pline, les cycles lunaires et les données astronomiques, certains passionnés ont relevé le défi. A l’instar de la rédaction de Keltia Magazine notamment (http://www.keltia-magazine.com/), qui une fois par an propose un calendrier de l’année en cours basé sur celui de Coligny et faisant correspondre les semaines lunaires.

Ces travaux permettent de revivre cette logique, de la confronter au rythme des saisons, des évènements, des fêtes rituelles et des temps forts du cycle de la terre : solstices et équinoxes. Ils permettent aussi de se frotter à cette complexité à laquelle les Celtes, par l’intermédiaires de leurs Druides, ont su faire face, prouvant à quel point les connaissances astronomiques et mathématiques de la classe sacerdotale pouvaient être fines.

Certes, de nombreuses zones d’ombres demeurent, et il s’agit de considérer ces informations pour ce qu’elles sont : c’est-à-dire des hypothèses. Ce sujet passionnant, pilier dans l’organisation de la civilisation celtique, continue à être étudié et gagne à être davantage connu. Nul doute que les indices archéologiques et historiques, couplés aux observations empiriques, contribueront à lever les mystères du temps…

Sources :

Les Druides, Christian-Joseph Guyonvarc’h, Françoise Le Roux, Editions Ouest France
Un Calendrier Celtique, Le Calendrier Gaulois , J-M Le Contel & Paul Verdier, Editions Errance
La nuit celtique, Donatien Laurent, Michel Treguer, Terre de Brume
https://icalendrier.fr/
Xavier Romagné, pour Keltia Magazine

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1 commentaire

Juhela 1 mai 2021 - 18h20

Nous n’avons pas fini d’explorer ce que signifie de travail, (calculs, partages, transmissions, observations, vérifications) l’élaboration de ce calendrier luni-solaire. Le cairn de Barnenès est utilisé depuis 7000ans av JC. approximativement. Les études portent essentiellement sur son aspect en tant que mausolée. Il me semble que nous pourrions éclairer les recherches à partir du fait que le recueil des rayons au fond du couloir du monument au moment des solstices, nous indique clairement que les peuples de cette époque, des Indo-Européens nomades devenant peu à peu et très lentement sédendaires, savaient repérer les trajets des astres dans le ciel jusqu’à avoir cette idée de faire des calculs extrêmement compliqués qui leur ont permis d’élaborer ce calendrier luni-solaire. Les alignements de pierres levées pourraient sans doute figurer les astres fixes repérés sur la voûte céleste pendant que d’autres tels le soleil et la lune répètent indéfiniment des trajectoires qui finissent par définir des points de repères, concernant l’écoulement du temps, les dimensions parcourues, les cycles saisonniers en relation avec les plantes, les eaux, la longitude et la latitude. etc etc. A mon avis la civilisation néolithique a été pour l’essentiel occupée par un travail scientifique extrêmement prégnant dont nous bénéficions encore. La mort et le soleil semblent être les deux pôles à la base de leurs recherches. Ils ont expérimenté l’efficacité de leur intelligence collective en nous laissant un héritage émouvant que nous avons de la peine à déchiffrer. Il est vrai que l’invention des religions née, semble-t-il, avec la sédentarisation est venue produire un changement de paradigme qui a produit une sorte d’apocalypse dans la manière de se situer dans le temps entre naissance et mort, et dans l’espace puisque le chant bardique (Barzaz Breizh – Chant des séries) précise : les douze signes sont en guerre. Il y a eu bousculade entre des mondes différents avec des calendriers différents, des croyances différentes puisqu’un seul Dieu unique se voulait vainqueur de la mort : Cette unique nécessité incontournable …

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