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Le pape et la Bretagne : une histoire oubliée, entre foi, politique et légende
Alors que le pape François vient de décéder, les Bretons se souviennent de liens anciens et parfois méconnus entre la Bretagne et la papauté. Terre de spiritualité, la Bretagne a entretenu au fil des siècles des relations fortes avec Rome. Du passage de Jean-Paul II à Sainte Anne d’Auray / Santez Anna Wened à la légende de Saint Cornély, en passant par les relations diplomatiques du duché avec les papes du Moyen Âge, retour sur une histoire à redécouvrir.
Jean-Paul II à Sainte-Anne-d’Auray : le pape des Bretons
Le 20 septembre 1996, le pape Jean-Paul II foule la terre bretonne.
Sa visite à Sainte Anne d’Auray / Santez Anna Wened marque à jamais la mémoire collective. Il célèbre une messe géante, devant plus de 150 000 fidèles. Dans son homélie, il rend hommage à la Bretagne :
« Bretagne, terre de foi, terre de fidélité, terre de culture ! »
Cette phrase raisonne encore aujourd’hui. Elle consacre l’attachement des Bretons à leur spiritualité, à leur culture, à leur identité. Le choix de Sainte Anne d’Auray / Santez Anna Wened, sanctuaire majeur dédié à Sainte Anne, patronne des Bretons, ne doit rien au hasard. Il souligne le lien direct, fort, entre le peuple breton et la foi catholique.
Jean-Paul II restera le seul pape à avoir visité la Bretagne.
Ce geste symbolique renforce l’idée d’un respect mutuel entre Rome et ce peuple du bout du monde.
Un pape meurt, et la mémoire d’un autre renaît
La mort du pape actuel François ravive forcément ce souvenir.
La Bretagne n’est pas une simple « province » d’un Hexagone. Elle est une nation historique, avec une foi populaire enracinée. Et c’est cette foi que Jean-Paul II était venu saluer.
La Bretagne d’aujourd’hui se souvient, et observe la succession romaine avec attention, non pas comme une affaire lointaine, mais comme une question qui touche l’âme même du peuple breton.
Saint Cornély : un pape en exil… en Bretagne ?
Peu de gens le savent : un pape aurait trouvé refuge en Bretagne, selon la tradition populaire. Il s’agit de Saint Cornély / Sant Korneli, dont la légende est encore très vivante dans le Morbihan.
- Il aurait été pape de 251 à 253, persécuté par l’empereur Trébonien Galle.
- Fuyant Rome, il se serait exilé à Karnag, où il est devenu protecteur du bétail.
- Une église lui est aujourd’hui dédiée à Saint-Cornély, commune du Morbihan.
Même si cette histoire relève probablement davantage du mythe que de l’histoire, elle témoigne d’un fait essentiel : la Bretagne est perçue comme une terre d’accueil, de refuge et de sacré. Y compris pour un pape.
La diplomatie religieuse du duché de Bretagne avec Rome
Avant l’annexion forcée à la France en 1532, la Bretagne était un duché indépendant, et ses Ducs jouaient leur propre diplomatie… y compris avec le Vatican.
- Les ducs envoyaient des ambassades à Rome, notamment pour défendre les intérêts du clergé breton.
- Certains monastères bretons, comme Landevenneg ou Redon, étaient directement liés à Rome.
- La Bretagne cherchait à se détacher de l’archevêché de Tours, jugé trop français, en affirmant l’archevêché de Dol comme indépendant.
Ce conflit religieux était aussi politique.
Il s’agissait pour les Bretons de renforcer leur autonomie, y compris dans les affaires spirituelles. Rome a parfois reconnu ces demandes, avant que le royaume de France ne tente de centraliser l’Église, comme le reste, dans son giron.
Des légats du pape en Bretagne, pas de visites officielles
Hormis Jean-Paul II, aucun pape n’était venu en Bretagne avant le XXe siècle.
Mais la Bretagne a vu passer plusieurs légats du pape, représentants directs du Vatican, notamment lors des grands conciles ou des arbitrages entre évêques.
Leur présence montre que Rome prenait au sérieux les affaires religieuses bretonnes, au même titre que celles d’autres royaumes.
Aujourd’hui, quels liens entre Rome et la Bretagne ?
- La Bretagne reste profondément marquée par le catholicisme populaire, même si la pratique religieuse décline.
- Des sanctuaires comme Sainte Anne d’Auray / Santez Anna Wened, ou Le Folgoët / Ar Folgoad attirent encore des milliers de pèlerins.
- Certains Bretons espèrent que le futur pape pourra reconnaître davantage la diversité des peuples au sein de l’Église catholique.
Le message est clair : la Bretagne ne demande pas un traitement spécial, mais elle souhaite que son identité religieuse propre soit respectée et écoutée.
Une relation millénaire à réactiver ?
Alors que le Vatican se prépare à élire un nouveau pape, les Bretons se souviennent.
Jean-Paul II les avait honorés. Saint Cornély reste un symbole fort. Et le passé diplomatique du Duché indépendant avec Rome rappelle qu’une Bretagne souveraine savait parler d’égal à égal avec le monde.
Aujourd’hui, cette mémoire peut redevenir une source d’inspiration.
Pour penser une Bretagne spirituelle, fière de son Histoire, et capable de dialoguer avec tous les centres de pouvoir, y compris à Rome.
3 commentaires
L’archevêché de Rennes, c’est B4+PDL.
Jean XXIII est venu au Bourg de Batz (fille de Landevenec et paroisse de St Gwenolé) mais quand il était Nonce apostolique
En plus avant que la Bretagne soit annexée à la France, la Bretagne avait sa propre chapelle à Rome : St Yves des Bretons (chapelle qui existe toujours et reste le témoignage que la Bretagne était reconnue comme un pays indépendant