Bretagne Écosse bases des sous marins nucléaires

Bretagne, Écosse et bases de sous-marins nucléaires

de NHU Bretagne

Deux nations celtiques sous tutelle nucléaire : la Bretagne et l’Écosse face à leur paradoxe atomique

Deux nations celtiques, et deux bases sous-marines nucléaires.
L’une, Faslane, au nord de Glasgow en Écosse, abrite les sous-marins britanniques armés de missiles Trident.
L’autre, l’Île Longue, dans la rade de Brest en Bretagne occidentale, accueille les sous-marins français équipés de missiles M51.
Deux lieux secrets, stratégiques et ultra-protégés.
Deux territoires sans souveraineté, choisis pour loger les armes les plus destructrices du continent européen.

Ainsi, la Bretagne et l’Écosse, nations anciennes sans pouvoir d’État, portent sur leur sol la dissuasion des puissances qui les dominent.
Un paradoxe politique et moral qui interroge : que deviendraient-elles si l’indépendance redevenait possible ?

Faslane, le cœur nucléaire du Royaume-Uni

Située sur la côte ouest de l’Écosse, la base navale de Faslane (HM Naval Base Clyde) est le cœur battant de la dissuasion nucléaire britannique.
C’est là que stationnent les quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins (SNLE) de la classe Vanguard.
Chacun d’eux porte jusqu’à seize missiles Trident II D5, fournis par les États-Unis et capables d’atteindre n’importe quelle cible à plus de 7000 kilomètres.

Construite dans les années 1960, au plus fort de la guerre froide, Faslane fut choisie pour sa géographie : des eaux profondes, abritées, à bonne distance de Londres.
Mais ce choix n’a rien d’anodin.
Londres préféra placer son arsenal atomique dans une nation périphérique, politiquement dominée, loin des regards et des risques pour la capitale.

Le SNP Scottish National Party contre la dissuasion nucléaire

Depuis des décennies, le Scottish National Party (SNP) s’oppose ouvertement à la présence de l’arme nucléaire sur le sol écossais.
Le parti indépendantiste considère Faslane comme une anomalie stratégique et morale.
Son objectif déclaré : une Écosse indépendante, membre de l’ONU mais sans armes nucléaires.

Cette position est constante et très populaire dans la société écossaise.
De nombreuses associations pacifistes, des églises et même d’anciens militaires soutiennent cette ligne.
Mais elle crée un problème géopolitique majeur : en cas d’indépendance, que deviendrait Faslane ?

Le Royaume-Uni n’a pas de site alternatif prêt à accueillir sa flotte nucléaire.
Les ports d’Angleterre ou du Pays de Galles (qui seront sans doute sur la même position que les Écossais) ne disposent pas des infrastructures nécessaires, ni des conditions maritimes adaptées.
La fermeture de Faslane serait donc un cauchemar stratégique pour Londres.

Position officielle du SNP sur Faslane

« Nous soutenons un investissement à long terme dans HMNB Faslane en tant que base militaire conventionnelle. Le SNP, dans le cas où l’Écosse deviendrait indépendante, utiliserait ses nouveaux pouvoirs souverains pour retirer les armes nucléaires du territoire écossais. »

Source : What is the SNP position on nuclear weapons? – snp.org

Pressions américaines et verrouillage de l’OTAN

Derrière Faslane, il y a aussi Washington.
Les missiles Trident ne sont pas britanniques : ils appartiennent à un stock commun américano-britannique basé à Kings Bay, en Géorgie.
Londres loue et entretient ses missiles auprès de la marine américaine.
Autrement dit, le nucléaire britannique dépend techniquement des États-Unis.

Une Écosse indépendante décidant de fermer Faslane remettrait en cause un pilier du dispositif nucléaire occidental.
Les États-Unis, comme l’OTAN, y verraient une menace directe pour la sécurité du flanc nord de l’Europe.
Washington exercerait donc de fortes pressions pour maintenir une présence militaire, quitte à négocier un bail ou une base conjointe.

Le SNP le sait : revendiquer la paix, c’est aussi s’aliéner les puissances dominantes.
C’est pourquoi la question de Faslane est souvent présentée comme le plus grand obstacle à l’indépendance écossaise.

L’Île Longue, le secret atomique français en Bretagne

De l’autre côté de la Manche, la situation bretonne est tout aussi symbolique.
La base de l’Île Longue, sur la presqu’île de Crozon/ Kraozon, abrite les quatre SNLE français de la Marine nationale française.
Chacun porte seize missiles M51, conçus et assemblés en France, capables de frapper à plus de 8000 kilomètres.

C’est le cœur de la dissuasion nucléaire française.
Tout y est centralisé : entretien, stockage des ogives, formation des équipages, zones de confinement ultra-sécurisées.
Le site est si sensible que son accès est strictement interdit, même aux élus locaux.
Une base d’État dans un territoire sans pouvoir.

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Une base imposée à la Bretagne, sans consultation

Pourquoi l’Île Longue ?
Dans les années 1960, le général de Gaulle cherchait un lieu discret, protégé, à proximité d’un grand arsenal militaire.
La rade de Brest offrait des caractéristiques idéales : profondeur, isolement, infrastructures navales existantes.

Aucune consultation n’eut lieu.
Aucun débat démocratique en Bretagne.
Et depuis plus de soixante ans, le silence reste total.
On parle peu des risques, des rejets radioactifs, des impacts écologiques.
Le sujet est tabou, protégé par le secret défense.

La Bretagne, bras armé de l’État central

La Bretagne héberge donc, sans mot à dire, l’arme suprême de la République française.
Les emplois directs sont nombreux, certes, mais le pouvoir reste ailleurs.
Les décisions sont prises à Paris, les missiles appartiennent au pouvoir central, les opérations sont menées sous commandement central.

Ainsi, la Bretagne sert de plate-forme stratégique, mais n’a aucune souveraineté sur ce qui s’y déroule.
Un paradoxe frappant : comme en Écosse, une nation sans autonomie politique porte sur son sol le symbole ultime de la puissance d’un pouvoir central lointain.

Deux situations politiques, deux niveaux de conscience

L’Écosse, grâce à son Parlement et à son autonomie politique, discute ouvertement du futur de Faslane.
Les médias, les partis et les citoyens y débattent régulièrement.
La base nucléaire est devenu un enjeu politique national.

En Bretagne, au contraire, rien.
Aucun parti politique, qu’il soit français ou breton, aucun élu majeur n’ose évoquer la question de l’Île Longue.
Les médias régionaux l’abordent à peine.
L’absence de reconnaissance institutionnelle de la Bretagne étouffe le débat stratégique.

Ce silence contraste avec la vitalité démocratique écossaise.
Là-bas, l’indépendance est pensée aussi comme un choix de société : une Écosse pacifique, sans ogives.
Ici, la Bretagne reste un territoire soumis à la raison d’État.

L’enjeu des alliances militaires

Faslane et l’Île Longue ne sont pas seulement des bases navales. Ce sont également des nœuds essentiels de l’architecture militaire occidentale.

  • Faslane, c’est le bras britannique du système nucléaire américain.
  • L’Île Longue, c’est le pilier français de la dissuasion européenne.

Dans les deux cas, ces sites inscrivent les nations celtiques au cœur d’alliances qui les ignorent. Ni Édimbourg / Dùn Èideann ni aucune capitale bretonne ne décident de leur sort. Leur destin géostratégique dépend d’autres capitales : Londres, Paris, Washington.

Et tant que ces bases resteront actives, toute revendication d’indépendance ou d’autonomie se heurtera à la logique de l’OTAN.

Souveraineté, écologie et paix : l’autre voie

Au-delà des enjeux militaires, ces bases posent une question morale.
Peut-on parler de souveraineté nationale quand le sol même d’une nation abrite des arsenaux nucléaires étrangers ?
Et peut-on parler de transition écologique quand on garde sous la mer des réacteurs atomiques et des missiles intercontinentaux ?

L’Écosse a déjà esquissé une réponse : faire de son territoire une zone sans armes nucléaires, comme la Norvège ou l’Irlande.
La Bretagne, elle, reste muette.
Pourtant, l’idée d’un Atlantique celtique sans ogives résonne avec l’histoire profonde de ces peuples : celle de nations maritimes, libres, ouvertes sur le monde, et non repliées dans les arsenaux des empires.

La paix comme horizon des nations celtiques

En Écosse comme en Bretagne, les bases sous-marines nucléaires symbolisent la dépendance ultime : celle d’un territoire asservi à une politique militaire qu’il n’a pas choisie.
Faslane et l’Île Longue sont les deux faces d’un même paradoxe : les nations celtiques hébergent les armes des empires qui les dominent.

Mais dans les deux cas, une idée progresse : la souveraineté ne se résume pas à lever un drapeau, elle implique aussi de décider ce que l’on accepte de porter sur sa terre.
Entre le feu nucléaire et la paix durable, le choix appartient encore aux peuples.
Et c’est peut-être là, dans ce débat, que renaît la vraie liberté.

Illustration ChatGPT5 pour NHU Bretagne

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3 commentaires

Penn kaled 12 novembre 2025 - 9h52

Cela aurait été plus objectif de consacrer votre article à l’ile longue qui constitue un danger majeur pour la Bretagne, ce n’est pas comparable à l’Ecosse qui dispose d’une autonomie dont on se contenterait bien. Cela dit toutes ces installations mériteraient d’être éradiquées de toute la surface de la terre, mais il est des pays ou rien que le fait de le dénoncer peut au mieux vous conduire en prison.

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Colette TRUBLET 13 novembre 2025 - 16h18

En cas de conflit on peut imaginer qu’une attaque sur l’île longue détruirait ensemble la Bretagne et le Contentin. En cas de paix armée durable parce que suffisamment dissuasive, la Bretagne indépendante pourrait facturer un loyer à la France pour un espace maritime et terrestre qui serait d’un bon rapport financier pour la Bretagne… Nous n’avons que ces deux alternatives, de mon point de vue…

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Kreizteiz Breizh 8 décembre 2025 - 12h28

Comment est-on passé et quand de Enez Hir à l’Ile Longue ?

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