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Les interviews de NHU Bretagne : Biographies de Bretagne
Depuis quelques mois, Biographies de Bretagne, en breton Skridoù-buhez Breizh, propose de collecter la mémoire contemporaine des Bretons pour permettre sa transmission grâce à la publication de livres ou d’articles biographiques. Christian GUYONVARC’H, son créateur, explique cette démarche.
Sur votre site, on peut lire que le fil conducteur de Biographies de Bretagne, est : « Mémoire des humbles, mémoire des Hommes ».
Qu’entendez-vous par là ?
Pourquoi ce choix des biographies ?
Collecter, préserver et transmettre la mémoire est un enjeu majeur de civilisation. Chacun connaît le dicton populaire : « Savoir d’où l’on vient pour savoir où l’on veut aller ». Cet adage a d’autant plus de valeur à une époque où la globalisation et l’accélération des moyens de télécommunication, avec internet et les réseaux sociaux, peuvent inciter à vivre dans l’instant, sans se poser de question sur le sens de ce que l’on fait.
Sur cet enjeu de la mémoire, la Bretagne fait figure de précurseur, depuis longtemps, dans le domaine culturel. Il y a tout le travail de Dastum, depuis les années Cinquante, sur la mémoire sonore, les chants et les musiques traditionnels, un travail qui a été reconnu par le Conseil de l’Europe pour son exemplarité.
Puis il y a aussi le travail de Kendalc’h qui, avec le projet Heritaj, s’attache à mettre en ligne une banque de données accessible à tous sur les costumes et les danses de Bretagne. Il y a encore le site internet Bretania, dont s’occupe l’association Bretagne, Culture, Diversité (BCD), en lien avec la Région Bretagne, et qui vise à mettre à la disposition de chacun toutes les sources numérisées qui se rapportent au patrimoine de la Bretagne.
L’effacement de la mémoire.
Mais, hors le champ de la culture, que faire pour ne pas laisser s’effacer la mémoire des Bretons. Celle des familles, celle des petites ou moyennes entreprises, des associations, des clubs sportifs, des écoles, des établissements de santé… ? Cette mémoire, que d’aucuns pourraient considérer comme « ordinaire », n’est rien moins que l’histoire « au fil de l’eau » du peuple breton.
J’ai créé Biographies de Bretagne pour que cette mémoire-là ne se perde pas.
Pourquoi ai-je choisi d’investir ce sujet ?
Historien de formation, je suis un « pur » produit de l’École des Annales qui a voulu sortir la discipline historique du récit événementiel mettant en valeur d’abord les puissants (monarques, conquérants, faiseurs de guerres…), pour préférer raconter le peuple, les humbles, ceux qui font la société au fil des générations. Pour comprendre la marche cahotique du monde, il est plus utile de savoir comment la conquête des Amériques et l’accumulation de richesses qui en a découlé ont permis aux États et au capitalisme européens de dominer le monde pendant plus de 400 ans que de connaître précisément l’année où Colomb a posé le pied sur une île des Bahamas.
Après plusieurs expériences professionnelles qui m’ont éloigné de mon premier métier d’enseignant mais ayant toujours aimé écrire, j’ai voulu réunir ces deux passions : l’Histoire sociale et populaire et l’écriture. Le choix de la Bretagne comme « terrain de jeu » allait de soi.
J’ai imaginé Biographies de Bretagne comme le chaînon manquant entre les études locales savantes, qui s’adressent à un public de spécialistes ou d’amateurs très éclairés, et les biographies traditionnelles qui se présentent souvent sous la forme de récits ne faisant pas ou peu le lien avec les époques, les mentalités, les lieux où la vie des personnes s’est déroulée.
Je veux que le récit de vie que j’écris entre en résonance avec la propre vie du lecteur, aussi différente soit-elle. Il s’agit en quelque sorte de raconter notre histoire à tous à travers des portraits singuliers. Je crois que c’est la seule façon de franchir la barrière des générations.
À qui ces biographies s’adressent-elles ?
Biographies de Bretagne propose ses services à différents publics. Il y a les individus, couples ou familles. Il y a les entreprises, pour autant qu’elles soient de tradition familiale ou que leur centre de décision se trouve en Bretagne. Et il y a ce que j’appelle les « communautés d’activité ». C’est-à-dire toutes les formes d’organisation qui structurent la société : associations, syndicats professionnels ou de salariés, clubs sportifs, établissements scolaires, de formation ou de santé, maisons de retraite, etc. Pour les entreprises et les « communautés d’activité », à l’enjeu de la transmission de la mémoire et de certaines valeurs viennent s’ajouter ceux de la cohésion interne et de la promotion vers l’extérieur.
Biographies de Bretagne propose aussi des récits biographiques dans un format plus court qu’un livre (articles, chroniques). Cette offre s’adresse aux magazines, grand public ou professionnels, et aux collectivités locales. La collecte et la transmission du patrimoine immatériel d’une commune, via le témoignage des anciens, est un enjeu majeur à une époque où les populations se déplacent beaucoup et où les ruptures générationnelles sont fréquentes.
Alors que de nos jours la vie sociale est souvent très cloisonnée en fonction des activités obligatoires et des centres d’intérêt de chacun, connaître et comprendre la communauté où l’on s’installe, où l’on grandit, c’est un enjeu de prévention des conflits et de cohésion sociale pour toutes les communes. La citoyenneté ne se construit pas sur du sable.
Avez-vous déjà commencé certains portraits ?
J’ai achevé la rédaction de deux biographies qui, d’ailleurs, ont trouvé un éditeur. Elles devraient paraître au printemps. Elles concernent deux acteurs du réveil des idées bretonnes à partir des années 1950. Deux personnes qui ont eu aussi un parcours professionnel riche et diversifié.
J’écris actuellement deux autres biographies individuelles. Mais aussi l’histoire incarnée d’une association qui fêtera son demi-siècle en 2019. Chaque histoire de vie est différente mais toutes me permettent de dépeindre des mutations qui ont bouleversé le quotidien des Bretons depuis les années 1950 : basculement d’une civilisation rurale vers une société urbaine, sécularisation (recul de l’influence de l’Église), libération des mœurs, irruption des technologies modernes de communication et informatisation, réveil économique et culturel de la Bretagne, émergence du fait politique breton (timide régionalisation).
De qui d’autre aimeriez-vous faire la biographie ?
Je me consacre exclusivement à la mémoire populaire qui se rapporte à la Bretagne, Loire-Atlantique incluse évidemment. Je peux donc travailler sur la vie de Bretons d’adoption ou de Bretons expatriés qui ont regagné le pays.
J’aimerais me « confronter » à la psychologie féminine. Sans démagogie, les femmes répugnent souvent à se mettre en avant, préférant le « nous » au « je ». Raconter le parcours de plusieurs générations de femmes d’une même famille, par exemple dans une entreprise. Ou d’un collectif de femmes engagées au plan professionnel ou associatif serait un défi que j’aimerais relever.
Comment se passe ce travail ?
Je rencontre la ou les personnes qui voudraient solliciter mes services. Ce premier entretien, qui est sans engagement, me permet de comprendre les attentes et de préciser comment je peux y répondre. Le site internet répond déjà à beaucoup de questions. Ensuite, je propose une méthode de travail et un devis, puis les choses se font ou ne se font pas.
Je peux travailler exclusivement sur la base d’entretiens, qui durent de deux à quatre heures. Leur nombre varie selon la longueur que la personne veut donner à la biographie. Celle-ci peut d’ailleurs évoluer au cours du travail, à la demande de la personne. Car chaque entretien fait l’objet d’une restitution écrite avant la tenue du suivant. Je peux aussi, toujours à la demande de la personne, compléter ces entretiens par un travail d’analyse d’archives, privées ou publiques. Tout ce travail est placé sous le sceau de la confidentialité.
Avant l’impression, le texte et l’iconographie sont validés par le client. Nous assurons la mise en page et la maquette. Ensuite, le client peut soit disposer de la biographie sur un support numérique que nous lui remettons, soit faire appel à une imprimerie pour une sortie papier.
Biographies de Bretagne / Skridoù-Buhez Breizh, 20 bd Molière 29490 Gwipavaz/Guipavas.
Tél. 06 68 73 54 96. Courriel : contact@biographiesdebretagne.bzh
Site web : https://www.biographiesdebretagne.bzh/