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Les « attardés » de Béatrice Macé : ce que cela nous dit !
Dire qu’aux festoù-noz nous sommes « chez les attardés », lorsque l’on est Vice-présidente à la Culture et aux Droits Culturels à la région Bretagne administrative, interpelle forcément.
Le peuple breton lutte pour sa dignité depuis si longtemps.
Mais loin de moi l’idée de tirer sur l’ambulance, en joignant ma colère légitime aux cris d’orfraie qui secouent les réseaux sociaux. Je pense sincèrement que l’expression malheureuse n’a pas été voulue et réfléchie, par Madame la Vice-présidente Béatrice Macé.
C’est encore plus grave.
Cette expression malheureuse exprime la pensée profonde ou si l’on préfère la psyché collective où nous baignons depuis si longtemps.
Nous savons tous que ces propos-là ne sont plus entendables aujourd’hui, et pourtant demeure la certitude française et bourgeoise de la hiérarchie des cultures, des langues et des civilisations.
Un internaute récemment me soutenait que la langue française était une « langue supérieure », sans voir le problème. Un intellectuel comme Christian Barbier pouvait affirmer, il y a quelques années encore, que les peuples bretons et basques étaient des « sous-peuples » sans encourir la moindre critique de l’establishment parisien.
Du sous-peuple au sous-homme, il n’y a qu’un pas.
Cette psyché collective explique le dédain pour nos langues et le peu d’intérêt public à la progression de leur enseignement. L’éducation nationale est structurée autour de la hiérarchie des cultures et des hommes : le primat de la civilisation française sur fond d’élitisme républicain.
Dans une chronique récente j’insistais sur l’urgence de modifier les représentations collectives, dans une perspective gramscienne, si nous voulions espérer sauver nos langues et notre culture.
C’est à ce niveau-là qu’il faut se situer.
Même au sein de la région Bretagne administrative, les services administratifs sont peuplés de fonctionnaires convaincus de l’infériorité de notre culture bretonne.
Les « attardés » de Béatrice Macé : pour faire clair, ce n’est pas important, à leurs yeux.
Cette psyché de la hiérarchie des langues et cultures exprime un « racisme civilisationnel », qui peine à s’avouer pour les raisons que l’on comprend aisément. Mais si ce racisme particulier peine à s’avouer, il n’en est pas moins présent partout.
Aussi, je tiens à remercier Béatrice Macé pour la mise en relief de ce « racisme civilisationnel » enkysté dans les structures mentales et qui trop souvent s’ignore.
Mme Béatrice Mace est en charge de la culture à la région administrative, mais aussi des « droits culturels ».
N’est-il pas significatif pour celle qui devrait être la plus sensibilisée à la promotion des droits culturels, de qualifier l’un des fleurons de notre culture minoritaire en grand danger, « d’attardée » ? Elle aurait pu intégrer le fait que le fest-noz figure désormais au patrimoine de l’Unesco, mais cette reconnaissance internationale n’apparaît pas suffisante pour infléchir la déconsidération de notre culture.
Béatrice Macé ne peut ignorer que derrière les festoù-noz, c’est tout un peuple qui s’active et se rassemble pour vivre sa culture.
Le préalable aux droits culturels est l’égale dignité des peuples, des langues et des cultures. Cette conviction humaniste débouche logiquement sur la reconnaissance des droits culturels.
Et si pour Béatrice Macé, les droits culturels se résumaient à ceux de « la civilisation » ou culture supérieure, c’est-à-dire parisienne ou rennaise ?
Mais cette psyché se retrouve aussi en nous.
Je suis assez sidéré de voir l’absence de réaction des associations culturelles bretonnes dont la raison d’être est de sauvegarder et de faire vivre notre culture.
Le silence des associations culturelles bretonnes.
Pourquoi ce silence ?
Je n’ai pas de leçons à donner mais j’aimerais juste que l’on s’interroge un peu.
Le mal est bien là lorsque la main qui nourrit un peu entrave toute liberté parole. Mais peut-être aussi que nombre d’entre nous ont intériorisé l’infériorité congénitale et « régionale » de notre propre culture.
Le mouvement breton n’est plus un mouvement.
Il dort.
Il a oublié le principe d’émancipation de notre peuple et surtout notre égale dignité parmi les peuples.
Il ne s’indigne plus du peu de cas que l’on se fait de notre dignité !
Et si nous commencions par affirmer haut et fort que nous sommes un peuple, que nous nous considérons comme tel, et que jamais nous nous résoudrons au mépris et à l’enveloppe assez grotesque en somme, d’une région administrative.
Illustrations libres de droits de NHU Bretagne
1 commentaire
l’indiférence est le plus grand des mépris !