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Lettre ouverte à Madame Béatrice Macé : une Bretonne vous écrit
Le contexte ne peut occulter le propos.
Lettre ouverte à Madame Béatrice Macé.
Constatant le manque de représentation féminine sur les scènes des festoù-noz (1), Madame Béatrice Macé, vice-présidente à la culture de Bretagne administrative, lâche : « Je dirais qu’on n’est plus en cercle celtique danse traditionnelle, on est chez les attardés. »
Contactée par Le Télégramme, Madame Béatrice Macé s’excuse, rétropédale, rame : elle ne voulait pas parler exclusivement des festoù-noz (est-ce mieux ?), s’excuse d’une formulation inadéquate (est-ce suffisant ?).
Dont acte.
La Bretagne Terre de Culture.
Une identité forte, une Histoire riche, une tradition de conteurs, une imagination foisonnante, une ouverture sur le monde, le goût de la musique et la volonté de se rassembler et d’accueillir font de la Bretagne une terre de Culture dynamique et florissante.
De quoi s’inquiète donc Madame Béatrice Macé ?
De la sous représentation féminine sur la scène des Festoù-Noz avec 75 % de présence masculine.
Voilà qui est très regrettable voire préjudiciable à l’image que renvoie la Bretagne d’elle-même. Ce constat ne peut s’inscrire dans le temps et les acteurs culturels doivent travailler à la valorisation de la place des femmes dans ces rassemblements festifs, c’est indéniable.
Une parole publique.
Pour autant faut-il en oublier que la Culture, quelque soit l’Art, est communication, transmission et Madame Béatrice Macé en est l’une des plus importante représentante en Bretagne administrative. Or, la parole, publique, et à ce titre pouvant être retransmise, de Madame Béatrice Macé dans cet épisode a été désastreuse.
Désastreuse et blessante.
Le diriez-vous, Madame Béatrice Macé ?
En 1930, Jane Evrard, violoniste virtuose est la première femme chef d’orchestre en France, elle fonda et dirigea l’Orchestre Féminin de Paris.
En 2024, seul 4% des chefs d’orchestre en France sont des femmes. « A l’Opéra, en France, on est chez les attardés. »
Le diriez-vous, Madame Béatrice Macé ?
En Corse, les chants polyphoniques sont constitués d’une large représentation masculine et ce n’est qu’en 1989 que deux groupes composés exclusivement de femmes voient le jour. « Avec les chants polyphoniques Corses, on est chez les attardés. » Le diriez-vous, Madame Béatrice Macé ?
Un mot mal choisi ou le mépris d’une certaine » culture » pour certaines cultures de Bretagne ?
« On est chez les attardés » La préposition « chez » indique bien une situation de lieu et d’appartenance.
« Attardés » ne peut être entendu qu’en terme d’insulte.
Il n’en fallait pas plus pour que cette phrase mette le feu aux poudres. Comment ne pas le comprendre ? De « ploucs » à Bécassine, des « illettrées de l’entreprise Gad » à la « Mafia Bretonne », la Bretagne et les Bretons n’en finissent pas d’être insultés.
Serait-ce l’insulte de trop, celle qui ne passe plus ?
Quelle terre de France a essuyé tant d’insultes ?
Ainsi, Jean Dutourd, académicien, en 1985 s’indignait : « Monsieur Lang ayant créé un Capes de patois breton, pourquoi ne pas créer un Capes de mendicité ? » (France-Soir Magazine, 1985).
Souvenons-nous d’Arlette Laguiller sur TV Breizh, en 2002 : « Je crois que [les écoles bretonnes] limitent le développement, que ça peut limiter le développement intellectuel des enfants. »
Plus près de nous Richard Ferrand justifie d’avoir engagé son fils car il est « Difficile de trouver en centre Bretagne un jeune qui sait lire et écrire correctement et aller sur Internet »
Sans oublier les assignations devant un juge pour les parents qui veulent simplement appeler leur fils Fañch.
Arrêtons là, la liste en est trop longue.
Enfin, est-il possible de s’interroger sur cet « attardé » venu instinctivement à l’esprit de Béatrice Macé dès lors qu’il s’agissait de Musique Traditionnelle ? La place des femmes est-elle plus valorisée dans les groupes de Jazz ou les scènes du Rap ? Cet adjectif aurait-il alors été aussi spontané les concernant ?
Refermez cette blessure Madame Béatrice Macé, en tant que vice-présidente chargée de la Culture au Conseil Régional de Bretagne administrative vous ne pouvez ignorer la valeur des mots.
En tant que co-fondatrice des Rencontres Trans Musicales de Rennes, vous savez combien tout mouvement musical est respectable et combien l’organisation de festivals est difficile. La Musique Traditionnelle, comme le Fest-Noz, expression la plus communicative, la plus immersive, la plus joyeuse de la Culture Historique et ancestrale Bretonne et classé au Patrimoine immatériel de l’UNESCO, ne méritent pas l’injuste parole dégradante que vous avez prononcée.
Un Fest-Noz c’est un lien indéfectible entre le passé et le présent et un élan vers l’avenir.
Un Fest-Noz c’est le souvenir des anciens et l’accueil aux nouveaux arrivants. Alors, bien sûr, vous me direz qu’il y a bien d’autres sujets plus préoccupants et bien plus graves.
Mais la fierté, Madame.
Ce Cheval d’Orgueil au cœur des Bretons, y songez-vous ?
Refermez cette égratignure avant qu’elle ne devienne profonde blessure. Madame Macé publiez vos excuses, le monde de la diversité Culturelle Bretonne, dont vous portez le rayonnement, n’en sortira que grandi.
(1) Festoù-Noz (Breton) : littéralement « Fêtes de Nuit », singulier : Fest-Noz.
Pour les fêtes se déroulant la journée on parle de Fest-Deiz. Le fest-noz est un rassemblement festif basé sur la pratique collective des danses traditionnelles de Bretagne, accompagnées de chants ou musiques instrumentales. (définition de l’UNESCO, site : unesco.org)
Nota, Fest-Noz, pour aller plus loin lire : Je suis fou de Fest-Noz, par Adrien Montefusco publié sur NHU Bretagne
2 commentaires
Digne représentante de ces » droits de l’homme » à la française. Sujet sur lequel, les bretons pourraient vraiment beaucoup s’attarder…!!!.
Des choses plus importantes? En êtes vous bien sûr? Vous êtes, ici, bien diplomate avec Mme Macé quand la question repose, plutôt et fondamentalement, sur le pourquoi de la stigmatisation des cultures originelles et singulières de l’hexagone, de la Culture Bretonne en ce qui nous concerne. Ces gens n’ont jamais supporté de ne pas être suivis où aimé comme on admire le génie d’un artiste; c’est bien leur problème justement… C’est un complexe narcissique qui se révèle dès que leur pensée unique est ignorée… Pour nous il s’agit de liberté dans notre façon d’être au monde, pour eux il s’agit de nous dominer pour exister car ils n’ont, eux, pas grand chose à offrir… ce qui explique leur complexe. La mondialisation a tout gommer sauf que: « ur geriadenn vihan a stourm ouzh an alouberien « galloudus » c’hoazh hag adarre!