en Bretagne

En Bretagne, jusqu’à quand allons-nous subir sans bouger ? par Alan LE CLOAREC

de Alan LE CLOAREC
Publié le Dernière mise à jour le

Ne plus subir

La Bretagne ne peut être une vaincue de l’Histoire, car son histoire est loin d’être finie. Bien sûr, les carcans qui la privent de ses libertés politiques et culturelles sont encore bien en place. Chaque génération, à son tour, doit lutter comme le disait Morvan Lebesque entre la découverte ou l’ignorance.

À notre époque, si la honte de l’identité est tombée, il n’en va pas de même pour la question politique. Trop peu, bien que le nombre grandit, osent se réclamer des idées bretonnes. Individuellement, nous n’avons plus à porter le sabot autour du cou comme aux temps de la IIIe république, mais le peuple breton tout entier l’arbore encore. Sous domination politique française, il n’y a pas d’entre deux, il ne reste que le choix entre la Bretagne libre ou la Bretagne honteuse.

Nous subissons toujours une morne région, dont les compétences sont si infimes que la plupart des Bretonnes et des Bretons les ignorent complètement.

L’existence de la région est encore plus symbolique que réelle. Le pays nantais n’y est toujours pas intégré, même si le référendum de réunification semble se rapprocher à grand pas. Néanmoins, réunifiée ou non, la Bretagne est plus que jamais en sursis.
Le Grand Est a déjà été fait, le Grand Paris est en construction, et le Grand Ouest est toujours dans les cartons de l’administration française. Ce projet qui se construit déjà à l’échelle des banques, des médias, des universités, nous ramènerait au temps de la révolution française, lorsque la bourgeoisie parisienne assumait pleinement de balayer de la carte les pays réels, pour mieux y imposer une France fictive et hors-sol.

Rien n’est jamais acquis tant que l’État français restera sur notre terre.

La Bretagne ne survivra que dans les combats, petits et grands, qui seront menés en son nom. L’assimilation française, dont le but est de faire disparaître les peuples et les pays d’une façon ou d’une autre, ne cessera jamais, que ce soit dans la répression sanglante, dans la folklorisation, le dénigrement, l’effacement administratif ou la spoliation des terres sur lesquels se jettent la bourgeoisie.

Ici se trouve le nœud du problème, car nous ne pourrons subir éternellement cet épée de Damoclès qui menace chaque génération. Il faut dire que la Bretagne partage ici le sort de nombreux peuples à travers le monde et l’histoire, celui de réussir à vivre libre ou à mourir, d’une façon ou d’une autre, quelle soit douce ou brutale.

Cet instinct de liberté, notre pays l’a défendu pour préserver son indépendance, puis pour la restaurer depuis qu’elle fut perdue.

Aux temps modernes est venu le nationalisme breton moderne, comme le maillon nécessaire d’une chaîne à transmettre. Ce mouvement a travaillé de mille façons, il a bravé bien des obstacles et s’est manifesté avec éclat dans ses défaites comme dans ses victoires. Une forme de honte pèse malgré tout bien lourdement sur ces idées. Beaucoup n’osent pas dire tout haut les évidences que nous pouvons assumer sans haine ni crainte : notre existence comme nation et les droits à la liberté qui s’y rattachent.

Le mouvement politique lui même n’ose que trop peu assumer son autonomie, par rapport aux idéologies et aux mouvements français en particulier.

Si les mouvements écologistes et féministes avaient fait la même stratégie, c’est-à-dire bâillonner ses idées pour plaire aux mouvements de l’époque, alors aujourd’hui personne ne parlerait de féminisme et d’écologie. Au contraire, ils ont assumé leurs façons de penser, de faire, leurs idées, leurs mots d’ordres et leurs objectifs, sans rien attendre des groupes déjà en place.

Si le nationalisme breton n’est pas une exception hors du monde, il a comme tout autre mouvement qui se suffit à lui même un besoin vital d’autonomie, idéologique, politique et stratégique. Beaucoup de barrières françaises et régionalistes sont encore à enfoncer, et il manque des mots, des concepts, des volontaires pour les porter et les diffuser.

Faire des détours pour affirmer ce que nous sommes et ce que nous voulons, c’est se perdre en chemin. Nous ne sommes ni la France ni une de ses régions, voilà une idée simple qui renferme tout un monde et de multiples combats à mener à qui veut bien s’y joindre.

Le mouvement a plus que jamais besoin de bras, et de têtes et de cœurs, et il en faudra encore beaucoup car le travail est immense.

Tout le pays est aux mains de partis politiques parisiens ou de leurs valets locaux. Il y a toute une classe politique à évacuer pour que la Bretagne commence sérieusement à reconstruire sa liberté.

La campagne des régionales en cours ne fait que confirmer le phénomène. On pouvait espérer des débats sur la création d’une assemblée de Bretagne, mais la question est invisible. La Corse l’a fait et les élites politiques bretonnes regardent passer le train. Seule la question du statut de résident ou des langues de Bretagne sort le débat des régionales de l’ornière où il se trouvait coincé, entre inexistence et médiocrité. Nous sommes finalement dans la continuité des années précédentes, celle du mandat d’un président inconnu car non élu, qui n’a manifesté que du vide quand la Bretagne attendait des réponses, sur la réunification, sur la gestion de la crise du Covid, sur les questions agricoles, sur le statut de résident et la spéculation immobilière.

Espérons maintenant que sur la question bretonne comme sur d’autres choses, cette élection régionale 2021 est un chant du cygne, celui d’une vieille classe politique de notables endormis.

C’est le peuple breton et ses éléments les plus organisés qui en donneront la réponse.
Il vient toujours un moment où, à force d’encaisser, on ne peut plus subir. Ni un pays amputé et défiguré, ni la honte et le tabou qui pèse sur le combat indépendantiste, ni cette classe politique française pour qui Bretagne ne veut dire que manne électorale et postes à prendre.
Nous valons définitivement bien mieux que cela, car depuis des siècles sur cette terre, nous faisons nation par cette idée : la Bretagne n’est ni à vendre ni à prendre, elle est à défendre et à libérer.

L’appel breton n’a pas fini de résonner et il ne manque que les volontaires, par centaines et par milliers, pour que son destin change radicalement.
C’est maintenant à nous de choisir, car la réponse est en dedans.
Pourquoi attendre, alors que le temps est bien venu.

Fin de la série
Sept textes pour la Bretagne libre
Bro Poc’her 2021.

« Ils ne sont grands que parce que nous sommes à genoux » … alors levons-nous!
Étienne de La Boétie
Discours de la servitude volontaire
1530-1563

Soutenez votre média breton !

Nous sommes indépendants, également grâce à vos dons.

A lire également

2 commentaires

AFB-EKB 10 juin 2021 - 16h09

Alan Ar C’hloareg a skriv mat…perag pas dond da stourm gant an AFB-EKB evit pinvidikaat he oberezh ?

Répondre
Johan Siquer 12 juin 2021 - 7h43

l’état fr nous cache notre traité de souveraineté de 1499 , ils mettent les projecteurs sur 1532 soit disant traité d’alliance ou mariage à fr alors que ce n’est qu’un vulgaire édit sans valeur juridique entre deux pays souverains (Anna da Vreiz n’était pas un zombie en 1532 , comme sont décès date de 1514 ) de se fait la royauté , les « révolutionnaires » de 1789 , les napoléons de 1 à 3 puis la république fr jusqu’à aujourd’hui sont coupables d’occupation et de crimes graves contre l’humanité envers Breizh et toutes les conventions internationales sont violées même à ce jour …
Un peu de lecture pour remettre les choses en ordre .
Bevet Breizh Dieub ha Digaberst or bro !
http://anb.asso.free.fr/LIVRE-BLEU-BRETAGNE.pdf

Répondre

Une question ? Un commentaire ?

Recevez chaque mois toute l’actu bretonne !

Toute l’actu indépendante et citoyenne de la Bretagne directement dans votre boîte e-mail.

… et suivez-nous sur les réseaux sociaux :

Notre mission

NHU veut faire savoir à toutes et tous – en Bretagne, en Europe, et dans le reste du monde – que la Bretagne est forte, belle, puissante, active, inventive, positive, sportive, musicienne…  différente mais tellement ouverte sur le monde et aux autres.

Participez

Comment ? en devenant rédacteur ou rédactrice pour le site.
 
NHU Bretagne est une plateforme participative. Elle est donc la vôtre.