Série Nominoë et les Rois de Bretagne.
Sommaire
Épisode 6, seconde partie : l’Armorique devient Bretagne.
Avec Olivier CAILLEBOT, notre guide d’Histoire de Bretagne, nous allons avec les Bretons quitter peu à peu la (grande) Bretagne et venir nous réfugier en Armorique. Cette terre d’accueil qui va devenir peu à peu une (petite) Bretagne : la Bretagne.
Les Bretons ont failli plusieurs fois disparaître littéralement.
Littéralement, on peut dire oui, tout à fait. Il y a eu de grandes batailles. Ces batailles se sont déroulées naturellement d’abord au plus près des envahisseurs. C’est à dire dans la région de Douvres. La région qui était le plus menacée. Les Anglo-Saxons avaient des implantations de l’autre côté dans le Boulonnais juste en face. Donc il leur est très facile d’envahir l’île de Bretagne à partir de là.
Donc les premières batailles ont eu lieu dans ces régions-là. Puis au fur à mesure que le temps passait, les Bretons étaient contraints de reculer. Jusque vers 530 les Bretons seront face à face sur des positions figées à la hauteur à peu près de l’île de Wight. Cette île de Wight se situe à peu près à mi-longueur en quelque sorte du littoral sud de la Grande Bretagne.
C’était surtout les populations qui se trouvaient prises en étau sans pouvoir se défendre.
A mon avis c’est à cette période-là que se déroule la plus grande migration des Bretons qui quittent l’île de Bretagne pour venir chercher leur salut en Armorique.
Ils avaient été précédé par des migrations infiniment moins importantes sur le plan démographique. Dont nous avons gardé le souvenir par les vieux Saints. Saint Maodez, Saint Samson … Ils sont arrivés un petit peu avant 490. Donc quand on voit l’évolution des événements après, on peut dire qu’ils ont constitué une sorte d’avant garde.
La migration des saints est bien avérée.
Elle est avérée au 6e siècle sous les termes de britannia, de britannic. Et que l’on retrouve notamment chez Grégoire de Tours. Marius d’Avenches ou Venance Fortunat. Donc des poètes contemporains qui connaissent la Bretagne mais ce sont des observateurs extérieurs.
Nous sommes à l’embouchure du Gouët entre Plerin et Saint Brieuc / Sant Brieg.
D’ailleurs, le nom Saint Brieuc est directement liée à cette vague d’immigration. Brieg est un moine qui est originaire de Cardigan / Aberteifi au Pays de Galles. Il aurait débarqué avec cent soixante-huit des ses compagnons en Armorique.
Puis ils se seraient établis le long du Gouët.
Probablement plus en amont entre deux vallées qui étaient arrosées par une fontaine. Cette fontaine que la mémoire a conservé comme un lieu emblématique avec la Chapelle Notre Dame de la Fontaine qui a été construite par Marguerite de Clisson, la fille du célèbre connétable Olivier de Clisson.
Dans toutes les sources hagiographiques on trouve des chiffres qui sont souvent les douze comme les apôtres. Également 72 comme le nombre des disciples dans la Bible. Dont aussi 33 comme l’âge du Christ. Je pense à 33 comme ceux qui entourent Sant Malo. Puis Gwenole aussi à Landevenneg qui débarque avec onze compagnons, et lui même, donc chiffre 12. On a donc souvent des chiffres symboliques qu’il faut prendre avec précaution.
Mais le cadre idéal donne à imaginer, donne à voir, ce que pouvait être un lieu de débarquement des premiers migrants au début du IVe siècle.
La Manche c’était notre Mare Nostrum de l’époque.
Ce n’est pas une frontière. Car il ne faut que vingt-quatre heures pour traverser. Vous prenez un bateau à voile vers l’Aber Wrac’h et le lendemain midi ou à seize heures vous êtes en Cornouailles. Ce n’est pas grand-chose vingt quatre heures sur le plan météorologique pour des bateaux qui sont à la voile. Donc on peut très facilement prévoir une croisière et profiter d’une période de beau temps pour traverser.
Revenons aux Saxons parce que c’est quand même sanglant ce qui s’est passé.
Sanglant, le terme est tout à fait exact. Là encore c’est la toponymie qui va nous permettre de l’autre côté de la Manche dans l’île de Bretagne d’y voir. Effectivement les batailles du côté de Douvres et puis ensuite de plus en plus vers l’ouest, vers l’ouest …
Dans ces régions-là si vous regardez la carte de Grande Bretagne d’aujourd’hui vous ne trouver aucun nom breton dans la toponymie.
Ainsi on peut dire que tous ces régions-là ont été écrasé culturellement. Ce n’est pas un excès de le dire. Car c’est un auteur anglais qui récemment a dit que les Bretons avaient subi un apartheid tout simplement. Il y a des textes qui disent, qui précisent que le statut des Bretons était alors un statut de servage. Que la parole d’un Breton ne valait la moitié de celle d’un Anglo-Saxon.

Nominoë et les Rois de Bretagne – l’Armorique devient Bretagne – hillfort
Ce fut une colonisation.
D’ailleurs si vous regardez la carte, vous retrouverez des noms bretons dans l’extrême ouest de la Grande Bretagne. Notamment dans qu’on appelle le Devon aujourd’hui, les Cornouaille ainsi que le Pays de Galles. Ces régions ont en commun de ne pas avoir été colonisée par les Anglo-Saxons. Il y a des témoignages affreux de l’époque où les gens sont obligés de gagner les montagnes comme ils disent. Car s’ils avaient le malheur de se rendre, ils étaient ont été soit massacrés, soit réduite en esclavage. Ce fut une abomination.
Il y a eu un massacre à Bath notamment.
En effet, mais il y a eu partout. Partout les temps étaient durs.
C’est à dire qu’il y a vraiment une volonté d’éradiquer ? Oui d’impérialisme la part des Anglo-Saxons. Chacun voulant se constituer son royaume. Dont le Wessex, l’Essex, le Sussex. Et tout cela avec des rois pour le moins violents, il faut bien dir. Effectivement le but était de conquérir le pays, mais au sens absolu du terme.
L’origine du mot Saxon ?
Ce mot nous ramène à l’indo-européen. Sax veut dire pierre? C’est ce qui constituait les premiers poignards. D’ailleurs vous connaissez l’expression « mettre à sac ». « Mettre à sac » ce n’est pas les voleurs qui arrivent avec des sacs pour mettre leur pillage. Non sax c’est le poignard qui tue tout le monde.
Mais les Bretons ont quelquefois des soubresauts vainqueurs …
Mieux que des soubresauts. En effet ils se défendent pied à pied et c’est tout à fait remarquable, ce qui s’est passé pendant 150 à 200 ans. Il y a aussi une supériorité technique des Bretons qui ont gardé l’organisation à la romaine. Pendant pratiquement 150 ans ils s’affrontent régulièrement, et sont souvent vainqueurs contre les Anglo-Saxons.
Il faut dire qu’ils ont hérité des Romains une organisation militaire sans faille. Ils ont eu la sagesse de garder cette organisation et il y a un personnage qui émerge des brumes du temps de l’époque. C’est Ambrosius Aurelianus, dont le nom laisse supposer qu’il était de filiation romaine. Et il semble bien que c’est lui qui a relancé en quelque sorte l’organisation technique des armées bretonne.
Évidemment, au fur et à mesure du temps les batailles vent se se dérouler de plus en plus vers l’ouest.
Ainsi, les Anglo-Saxons vont finalement arriver au coeur du pays des Bretons.
Je pense aux trois villes principales les plus riches qui était Bath, Cirencester et Gloucester. Ces trois villes là étaient des villes très riches. Et on voit que régulièrement les Anglo-Saxons lançaient des corps de troupes à l’assaut de ces villes. Villes qui s’étaient dotées aussi de structures militaires solides. Notamment ils occupaient ce qu’on appelle des hillforts du côté britannique . En fait des collines fortifiées sur lesquelles ils bâtissaient des citadelles qui étaient très difficiles à maîtriser.
Donc ils pouvaient partir de ces trois cités pour réorganiser la résistance ?
Tout à fait. D’ailleurs ces hillforts étaient bâties à côté des villes.
Les Bretons ont eu leur Austerlitz …
C’est la bataille de Badon Hill (Mynydd Baddon en gallois) que l’on situe aujourd’hui du côté de Bath vers 500 ou 503. Ce fut en effet une bataille tout à fait décisive effectivement. Ce fut une Austerlitz parce que les Anglo-Saxons furent sévèrement sévèrement battus. D’ailleurs il semble même que les Bretons aient réussi à poursuivre les troupes anglo-saxonnes en déroute.
Donc ce fut une victoire tout à fait décisive qui a assuré trente ou quarante ans de paix au pays.
Puis arrive le Waterloo …
En effet en 577, soit trente ou quarante ans plus tard, les Anglo-Saxons réussissent une percée. Là se retrouve le meilleur des corps de bataille des Bretons, et les Bretons sont battus. C’est la bataille de Deorham, où on peut dire que c’est le Waterloo des Bretons.
Là les jeux sont faits. A partir de Deorham, on sait qu’on ne pourra plus rejeter les Anglo-Saxons à la mer. Certes, la résistance continue, mais par sauts de puces en quelque sorte.
Les Bretons se replient-ils sur eux-mêmes ou continuent-ils leurs processus d’immigration ?
La grande vague d’immigration vers l’Armorique se situe entre 530 et 560 environ.
Pourquoi se montrer aussi affirmatif alors qu’on était pas là pour vérifier les registres d’état-civil ?
Tout simplement parce que c’est à cette époque-là que la région Armorique commence à être nommée la Bretagne.
Pourquoi ? Parce que les Bretons à cette époque-là commence à être la population dominante. Bientôt vont apparaître les premiers Rois de Bretagne. Lorsque la pression extérieure sera plus forte les Bretons se tourneront vers des personnalités éminentes pour avoir un chef unique.
Quand l’Armorique devient Bretagne
Avec la participation de Jean DANZÉ et Mickaël GENDRY, Historien.
3 commentaires
Sur le génocide des Bretons (peu connu !) au Ve-VIe siècle : « The Anglo-Saxons were worse than the Vikings. Linguistically, the Anglo-Saxons practically eradicated the native Britons. The question is: was it ethnic cleansing ? », http://sciencenordic.com/anglo-saxons-were-worse-vikings, 15/12/2018.
I n fact there are really very very few names of Celtci origine in Devon. Whereas, as soon as one crosses the Tamar into Cornwall there is a striking increase. A quick look at any detailed map will show this.
On parle des méchants anglo-saxons qui ont réduit en esclavage les pauvres bretons, les auraient massacré…mais les bretons arrivant en Armorique étaient-ils eux même des tendre envers les autochtones du coin ?