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Dans toute cette effervescence des victoires bretonnes eh bien il y a un perdant.
C’est Lambert II de Nantes / Naoned. Lambert II de Nantes, qui bien que réconcilié avec Charles le Chauve, va tenter en vain de s’implanter dans le Maine. D’ailleurs il sera tué le 1er Mai 852 par Gauzbert le Jeune. Lui-même décapité un an plus tard par Charles le Chauve sous prétexte d’alliances avec les Bretons.
A ce moment-là, donc il y a eu des problèmes d’invasion de Scots et d’invasion Vikings qui ont obligé Erispoë à se concentrer sur le territoire plus proche de la Bretagne des origines. Ainsi qu’à conforter son pouvoir sur le pays nantais, y compris le pays de Retz/Raez. Ensuite Erispoë a poussé jusqu’à la Mayenne.
Erispoë avait peut-être l’intention de se rapprocher des Francs ?
En effet, il a été obligé d’amorcer un rapprochement parce qu’il y avait ces invasions Vikings qui mettaient tout le monde en difficulté. Donc il a limité ses conquêtes jusqu’au fleuve de Mayenne. Puis il essaie de marier sa fille à Louis le Bègue, un prince carolingien. Là, cela se passe très très très mal parce que les oncles de son entourage ne veulent pas. Et il va se faire assassiner par Salomon qui est son cousin germain.
Peut-être ! Parce qu’on a de gros problèmes du point de vue généalogique.
Salomon va reprendre l’action sur une grande échelle et va imposer à Charles le Chauve d’abord une nouvelle défaite et puis un traité qui va accorder la Mayenne d’abord, et jusqu’à la Sarthe ensuite. Également accorder aux Bretons l’Avranchin et les îles anglo-normandes.

Décapitation de Lambert II de Nantes/Naoned, par les Francs
Qui est Salomon ?
Il est cousin d’Erispoë. Soit par les hommes, soit par les femmes. On repère sa naissance entre 810 et 820. Il aurait d’ailleurs été élevé par Nominoë. Il est le fils de Riwalan, le frère de Nominoë. Par sa naissance il devrait avoir des terres sur la Bretagne. Terre qui lui auraient été confisquées par les conquêtes d’Erispoë. Charles le Chauve le sait et il a proposé donc ces mêmes terres à Salomon. Ce sont des terres qui se situent peut-être du côté de Nantes / Naoned, et de Rennes / Roazhon. Charles le Chauve ainsi manoeuvre habilement parce qu’il crée un conflit larvé entre les deux cousins. D’ailleurs Salomon va devoir contresigner pas mal d’actes effectués par Erispoë.
Notamment lorsqu’il engage ses fameuses terres.
Alors la problématique du futur mariage entre la fille d’Erispoë et le fils du roi Charles le Chauve va considérablement inquiéter Salomon. Parce qu’il risque de perdre justement ces fameuses terres. Peut-être aussi a t-il des motivations patriotiques ? On ne le saura jamais. Il va fomenter un coup d’état contre Erispoë. Mais il ne va pas le faire tout seul. En effet il va faire appel à un Franc qui s’appelle Alcmar, dont la mémoire disparaîtra de celles des hommes.
Pourquoi ?
Parce que Erispoë est un roi puissant. Sûrement entouré de sa garde, sûrement dans un camp retranché et sûrement qu’il a aussi lui en tant que roi guerrier la possibilité de se défendre. La date est décidée. On va repérer Erispoë dans sa demeure à Talensac / Talenseg. Talenseg n’est pas loin de Rennes / Roazhon. C’est une demeure qui avait déjà été occupée par d’autres rois bretons. Il faut savoir que Talenseg a dans sa toponymie plus de 13% de noms d’origine bretonne issus des premières vagues d’émigration des Bretons. Donc Erispoë y est en toute quiétude. Et c’est une véritable opération commando qui va se dérouler. Et elle réussit cette opération commando.
A tel point que les troupes d’Erispoë sont surprises. Que lui-même a juste le temps de s’enfuir de sa demeure retranchée, en-dessous de l’église de Talenseg, à quelques centaines de mètres. Puis se réfugier justement dans cette même église, endroit sacré par excellence. Mais le côté sacré de l’église de Talenseg ne va pas du tout impressionner les Francs qui vont sacrifier Erispoë devant l’autel de cette église.

Localisation des villes citées dans cet épisode.
C’en est fini : la Bretagne n’a plus de roi .
C’est sûrement ce que va dire d’ailleurs Charles le Chauve qui va apprendre très vite la nouvelle et qui va mobiliser ses troupes. Il est temps d’agir, il n’y a plus de roi.
Et bien non, Salomon avait préparé son coup. Il s’est auto-proclamé roi. Puis a rassemblé très vite ses troupes et a fait sa démonstration de force aux frontières de la Bretagne. Depuis cent cinquante ans la guerre britto-franque est à son paroxysme et les Bretons savent se battre. Et pas qu’à cheval comme nous allons le voir …
On a des récits de combats qui durent très longtemps.
Des batailles qui durent quatre heures, etc … Ce ne sont pas quatre heures de combat non-stop. Comme dans toute bataille, même une bataille moderne, il y a des temps dans la bataille, des mouvements, des phases de repli. Puis on se regroupe, on se reforme, on essaie … Donc, dans la logique militaire, au temps de Nominoë, c’est une armée mobile. D’abord composée d’une grande partie de cavalerie pour se redéployer et se positionner correctement sur le champ de bataille. Puis une partie de fantassins armés avec les boucliers. Justement pour bloquer, tenir une partie du champ de bataille pour que le verrou puisse se refermer.
Ce sont des principes moteur simples, comme le levier, la percussion à des endroits, qui montrent que le soldat n’était pas le premier paysan venu à qui donner un outil.
Donc cela est un spectacle que vous allez faire.
En effet c’est un bon entraînement
Là on était sur un bouclier en écu 14e siècle à peu près, et là on va être sur des boucliers justement carolingien, mérovingiens. Boucliers qui ont persisté aussi durant toute la période des Vikings. La particularité c’est qu’à l’époque on est encore avec ce qu’on appelle des boucliers avec des manipules. Donc la manipuler protège au niveau de la main par ce qu’on appelle une partie en fer appelée umbo. Ainsi la manipule permet de faire des rotations pour ouvrir ou fermer le bouclier. Donc l’intérêt du combat est vraiment de se caler l’un à l’autre pour être vraiment en formation bien placée.
Ce qui fait que chaque combattant protège la gauche de son partenaire. Voilà pour la logique. En formation serrée, on s’appuie umbo contre umbo. Ainsi on est bien calé et là vraiment on peut tenir une ligne de front. Par ailleurs, le bouclier est toujours tenu un peu à bout de bras avec un léger écart pour pouvoir justement à voir ce mouvement-là. S’il est ici on se le prend. D’ailleurs c’est pour ça que le bouclier est relativement lourd. Celui-là doit faire quatre ou cinq kilos.
L’énarme.
Puis il y a eu des améliorations avec l’apparition d’énarmes. L’intérêt d’une énarme qu’on se passe autour du cou permet de tenir son arme et de soulager le poids. Par ailleurs, je peux la tenir et ça me permet aussi de figer la distance qu’il y a en distance de corps.
Donc là j’ai toujours la même distance de corps.
Ceci est apparu tardivement ? Justement l’énarme apparaît progressivement quand on arrive au haut Moyen-Âge (476/987). D’abord pour les cavaliers parce que c’est pratique pour porter son bouclier. L’autre intérêt de l’énarme est qu’on peut combattre avec une lance. En effet, si je combats avec une lance, le fait d’avoir une énarme me permet d’être protégé avec mon bouclier tout en combattant avec la lance.
Ils portent l’équipement du guerrier des Carolingiens de l’époque au temps du roi Nominoë.
D’abord on à la lance. Il peut y avoir aussi de petits javelots, des javelines. Surtout une épée courte, une épée de côté. Celle-ci est un peu plus tardive parce qu’on a déjà une garde. En fait l’épée à cette époque-là a juste une garde en amande et non une garde aussi prononcée. Ce qui fait qu’au niveau de la protection de la main une épée mérovingienne ou carolingienne n’est pas encore aussi efficace. Celle-ci est une épée qui a été notamment amélioré par les forgerons rhénans exportés par les invasions vikings.
Les épées font soixante-dix centimètres pour les plus courtes. Jusqu’à quatre vingt dix centimètres pour les plus longues. Pourquoi ?
Il y a tout simplement une raison au niveau du travail du métal. Car on ne connaissait pas encore le les hauts fourneaux. Donc les épées été forgées avec une âme. C’est à dire qu’il y avait un noyau ferreux qui était retravaillé, recuit, replié sur lui-même, et qui servait à la souplesse. Quant aux tranchants, au double tranchant, il était assuré par l’adjonction au forgeage d’un autre métal avec un autre composite ferrite carboné qui était plus tranchant. Mais qui pouvait être rematé régulièrement.
Donc les armes n’étaient pas forcément si solides.
Mais à cause des principes métallurgiques, elles ne pouvaient pas être beaucoup plus longues ni beaucoup plus pointues. Comme celles que l’on a par exemple à la fin du Moyen-Âge où on a des épées très longues, très pointues et très effilées. Ce qui permettait d’avoir des coups d’estoc très très efficace.
La taille est effectivement pratique. Avec des tests pratiqués par des historiens avec des participants qui font notamment des arts martiaux historiques européens, et qui travaillent sur l’archéologie du geste, ont travaillé sur les tests de coupe avec un gant bison. Ce gant bison est un gant rembourré avec du lin ou d’autres matières et plusieurs couches de laine qui permet d’amortir l’impact. Ainsi, on a remarqué que sur de la coupe franche le gant bison offrait une protection efficace.
Le gant bison …
Le problème du gant bison est que les coups arrivent toujours généralement sur les mêmes surfaces exposées. Ainsi, au bout d’un moment, la laine se coupe et la protection devient de moins en moins efficace. Généralement le guerrier carolingien à une armure de cuir, soit faite de petites plaques, des petites écailles en fait. Si jamais on a un guerrier qui est bien protégé contre les coups de taille, on va vraiment utiliser l’inertie de l’arme pour envoyer avec le plus de vélocité possible la pointe de l’arme. Donc vraiment pour choquer l’adversaire. Il faut vraiment jouer sur le poignet, sur l’inertie de l’arme. Puisque le poids est vraiment très vers l’avant. Donc la pointe peut aller très très vite si on la chaque vers l’avant.
Le principe du combat au bouclier à l’époque …
Quand on est en garde, garde à gauche, puisque le principe le bouclier c’est un combat en formation. Alors on essaie d’avoir le bouclier assez loin du corps, puisque le bouclier est une arme de percussion. On va essayer de s’appuyer sur le côté pour ouvrir le bouclier, pour ouvrir la ligne. Donc vas-y Thibaud, tu vas taper sur bouclier varègue. On a des coups qui sont vraiment percussifs sur le dessus, sur le dessous, pour vraiment ouvrir, forcer la ligne. Avec la manipule ça va vraiment obliger à ouvrir la ligne. Quand on porte un coup, on ne fait pas comme dans les films hollywoodiens des années 50-60. C’est-à-dire qu’on ne s’ouvre pas. Au contraire le bouclier est un cône de déviation, une protection.
Alors on essaye d’être toujours protégé par son arme.
Donc on passe par des positions qu’on appelle des gardes, qui permettent d’ouvrir des lignes ou d’en protéger certaines. Dans l’idée par exemple, d’attaquer et tout de suite je vais me reprotéger. Mais quand je fais un coup, j’essaye toujours de me protéger et le bouclier sert à protéger ma main. Ma main armée est protégée par mon bouclier. Donc je ne sors pas ma main de la zone de protection du bouclier. Puisque là, forcément, si je le fais … Faites la démo les gars ! voilà donc là il est protégé et maintenant sorte à main
Justement la qualité d’une armée efficace, c’était une armée entraînée qui savait travailler en groupe et ensemble
Charles le Chauve a battu en retraite, ce qui permettra une fois de plus, à Salomon d’agrandir le territoire de la Bretagne
Avec la participation de Jean Jacques MONNIER et de Frédéric MORVAN, tous deux Historiens bretons; Fabrice PATIN, Maître d’armes à Pondi / Pontivy, Anthony GUILLEMOT et Thibaud HAMON.
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