L’autonomie est un terme valorisant d’une manière générale.
Valorisant et positif, lorsqu’il est accolé à « la personne », « les entreprises » ou « les universités ».
Alors, comment se fait-il et par quelle perversité de l’esprit a-t-il pu prendre une charge si négative lorsqu’il s’applique cette fois aux « régions » ?
Du moins en France, ce pays surprenant qui , en Novembre 1789 détruisit sans aucune consultation populaire, les institutions nationales – États et Parlement – d’une « province réputée étrangère », la Bretagne.
L’autonomie régionale, le fédéralisme, c’est la manière normale de gérer et d’administrer un État moderne, surtout depuis la fin de tous les régimes fascistes ou fascistoïdes qui pour leur part établissaient un rapport direct entre l’individu et l’État en détricotant tous les corps intermédiaires.
En France où l’on a l’art de faire passer les vessies pour des lanternes, une bonne partie de la classe politique prospère sur les peurs engendrée par un transfert de compétence aux régions.
Si l’on excepte l’occasion manquée du référendum sur la régionalisation de De Gaulle en 1969, et un premier pas, timide mais significatif, réalisé par Mitterrand en 1982, force est de reconnaître que la France a stagné remarquablement sur le chemin de la démocratie locale.
A tel point que le Congrès des Maires a pointé récemment le danger d’une centralisation qui les étouffe de plus en plus chaque année. Dans ce contexte où la France apparaît comme une anomalie dans une Europe où les États décentralisés ou fédéraux sont la règle et les États ultra centralisés l’exception, l’annonce par le gouvernement français, au printemps 2022, de l’ouverture de négociations avec les Corses sur un futur statut d’autonomie, a autorisé des espoirs légitimes et encouragé le Conseil Régional B4 à réclamer pour la région Bretagne les droits que Paris se dit prêt à accorder aux Corses.
Sommaire
Plus d’autonomie pour la Bretagne : depuis, l’idée a fait son chemin.
Le mot autonomie adossé à celui de « région » ou au nom de Bretagne, est comme détabouisé.
La peur, la honte de soi, la crainte du maître parisien qui animaient nos pères semble évanouie depuis ces avancées de langage et la main tendue de l’État central, intervenue, il est vrai, après la mort tragique du combattant britto-corse Yvan Colonna . On peut regretter qu’une fois de plus ce soit le petit maître parisien qui ait donné le la et que les Bretons aient été jusque-là si timorés.
Mais mieux tard que jamais.
La peur et la honte de soi semblent même si loin dans le rétroviseur qu’un sondage récent établit que 81 % des Bretons souhaitent l’autonomie
Si l’on tient compte du fait que l’école de la république n’enseigne pas le fonctionnement des institutions et que nombre de nos compatriotes confondent autonomie et indépendance, on peut estimer qu’une très grande majorité des Bretons n’a plus qu’une confiance relative en un État central qui les rackette et les terrorise chaque jour davantage, tout en n’assumant plus aucune des fonctions que les gens attendent de lui.
N’en doutons pas, dans un pays où tous les coups, même les plus malhonnêtes sont permis, la route qui mène à la liberté et à l’autonomie, en attendant l’indépendance, sera longue et parsemée d’embûches.
Déjà, beaucoup d’observateurs et de journalistes- parmi lesquels notre confrère Bretons, évoquent « plus d’autonomie », pour ne pas dire « statut d’autonomie ».
Plus d’autonomie ne veut rien dire ou si peu.
Car comment un pays qui ne dispose d’aucune autonomie peut-il avoir « plus d’autonomie » ?
Ne négligeons pas non plus le poids des formations politiques jacobines dont le RN n’est que le dessus de l’iceberg. Déjà, Maël de Calan et un certain nombre de barons, y compris proches d’une Macronie qui entrouvre des portes cadenassées jusqu’ici, condamnent un « projet politique qui coupe progressivement les liens avec la République ».
Le statut d’autonomie de la Corse devra entrer dans la Constitution et pour cela, recueillir les trois cinquièmes des voix du Congrès, ce qui n’est en soi pas démocratique.
Et il a comme argument principal le caractère insulaire de l’île et non l’existence du peuple corse. De quoi les Bretons pourront-ils se prévaloir, demain, pour négocier avec la France un statut qui leur permette de respirer un peu ?
De leur caractère péninsulaire ?
Enfin, force est de reconnaître que les 81 % de Bretons qui avouent souhaiter l’autonomie se donnent assez peu les moyens de l’obtenir et d’établir avec l’État français le rapport de force qui seul est à même de faire sauter les verrous jacobins .
Ne boudons pas cependant notre plaisir.
Réjouissons nous de cette demande de Loïg Chesnais-Girard et de son institution – à l’exception du groupe de Gilles Pennelle qui, comme d’habitude brille par sa bêtise et sa servilité par rapport à ses patrons parisiens- et souhaitons que les Bretons parlent enfin, dans un futur proche, haut et fort pour que leurs doléances puissent être entendues depuis une ville qui se prend pour le nombril et la lumière du monde.
1 commentaire
C’est irrésistible. Quand je lis de tels article qui me remplissent d’espoir et de désolation parce que nous sommes apparemment encore si loin du but, à savoir retrouver notre indépendance en passant par l’autonomie s’il le faut, j’entends immanquablement les voix éteintes de mes grands parents qui protestaient contre les beaux parleurs en hochant la tête. Qu’est-ce qu’ils nous proposent hein? On sait bien d’où qu’on vient. La France paie nos retraites. Qu’ils m’expliquent qui les paiera si ce n’est pas elle? Pour le reste ça ne regarde que nous. Actuellement, de mon point de vue les Bretons de souche ou d’adoption sont conscients de l’existence des multiples petits pays de Bretagne et ils se fondent dans le paysage. Personne ne pourra rien y changer. Question de logique. Mais pour s’organiser entre eux et sans la France, il faudra les convaincre que c’est possible. Qui paiera les retraites et comment? Là est la question. Les beaux parleurs ont-ils les bonnes solutions? Il ne suffit pas de dévider des idées, mais d’argumenter sur des faits.Et les faits sont quotidiens. Qui paiera nos retraites en cas d’indépendance, pourrait être la question à poser à une convention citoyenne tirée au sort pour éviter les conflits d’intérêt . Il y faudra examiner les solutions possibles à l’aide d’experts. Et en Bretagne ce n’est pas ce qui manque. Il faudra largement diffuser les travaux de cette convention citoyenne pour que les gens soient informés. Ensuite ils pourraient eux aussi poser leurs questions. On sait faire. On sait aussi que l’intelligence collective est performante. A notre époque elle peut être alimentée par la mémoire artificielle que les fanfarons appelle intelligence artificielle. De cette manière on pourrait mobiliser les esprits sur la bonnne question qui les taraude. Ce sera tout de même mieux que d’obéir aux directives mondialisées entièrement tournées vers le profit dont bénéficient une vingtaine de personnages capables de détruire la planète. Ce que j’en dis …