Catalogne, ou la fin des grands ensembles.
Les grands ensembles, hérités du passé, se fissurent de plus en plus, et s’écroulent peu à peu, un à un. Car ils sont confrontés à deux tendances puissantes contraires à leurs dogmes : la modernité et la démocratie. La vraie démocratie, celle qui vient du bas, du peuple.
Ce sont ces deux lames de fond qui ont déjà balayé l’ex URSS et ses satellites comme l’ex Yougoslavie et les États baltes. Le mur de Berlin est tombé aussi sous ces deux aspirations légitimes.
La nature est bien faite.
Quand un système n’est plus adapté à son époque, il disparaît.
Sommaire
Petit tour de la Catalogne.
Ce pays est coupé en deux par les Pyrénées et une frontière purement administrative. Entre deux états : l’Espagne au sud et la France au nord. Au nord globalement le département des Pyrénées Orientales.
Donc presque deux fois plus de population et donc deux fois plus de richesse économique globale avec un PIB vers 260 milliards contre 120 milliards d’euros pour la Bretagne.
Un brin d’Histoire.
Premiers pas d’autonomie relative en 1932. Puis le franquisme balaye tout. Enfin retour en 1977 de la Généralité de Catalogne.
La Constitution espagnole de 1978 déclare que l’Espagne est une nation indissoluble qui reconnaît et garantit le droit à l’autonomie des régions qui la constituent.
C’est d’ailleurs le cas de tous les états modernes d’Europe (sauf en France et en Turquie). Depuis 1979, la Catalogne a donc officiellement le statut d’autonomie reconnu par l’État central.
La Catalogne est reconnue par Madrid comme « nationalité d’Espagne« .
Depuis 2005/2006 Madrid et Barcelona s’affrontent dans un bras de fer juridique. La Catalogne bénéficie de son propre Parlement et vote une grande partie de ses lois. La langue catalane est évidemment obligatoire à l’école et est de plus en plus parlée dans toute la société civile. Ainsi que dans les administrations et les entreprises.
Jusqu’à là, tout va à peu près bien …
Depuis une dizaine d’années, les Catalans ne veulent plus travailler et payer pour le gouffre financier que représente Madrid et l’état central. Ils ont été eux-mêmes durant des siècles et souhaitent très simplement le re-devenir. Ils ne veulent plus être administrés par une capitale trop éloignée de 600 kilomètres (tiens la même distance qu’entre le Centre Bretagne et Paris).
Alors, comme la constitution espagnole le mentionne, ils se disent qu’ils pourraient devenir encore plus eux-mêmes.
L’Europe est en plein bouleversement et des territoires souhaitent de plus en plus se tourner vers le modernisme et la démocratie vraie.
Le Gouvernement Autonome Catalan a donc décidé de consulter le peuple catalan par un référendum et une question on ne peut plus simple : indépendance ou pas ? Modernité et démocratie, ou passéisme et centralisme ?
Tant que les sondages n’alarmaient pas Madrid, il ne se passait presque rien.
Mais les sondages s’emballent, et là rien ne va plus à Madrid.
Toutes les récentes enquêtes d’opinion donnent vers 70% de oui à cette question démocratique.
Même avec une marge d’erreur, fut-elle importante, le peuple catalan aurait donc choisi la modernité pour son avenir et celui de la Catalogne.
Bien entendu le pouvoir central espagnol ne peut accepter de voir éclater l’Espagne à ce point. Madrid utilise en ce moment même des manières policières dignes d’un franquisme que nous croyions sous terre à jamais. Et cela contre la démocratie, contre ses propres lois, contre le peuple. La peur fait souvent commettre de fatales erreurs.
Cela rappelle d’ailleurs, sur bien des points, la situation de l’Écosse face à Londres; ou encore celle de la Corse face à Paris.
La nature est bien faite.
Quand un système n’est plus adapté à son époque, il disparaît.
Nous assistons en direct à la fin de l’Espagne et à une dynamique européenne de modernisation de la vie démocratique.