Le Président de la région Bretagne administrative, Loïg Chesnais-Girard se rendra à la conférence sur l’identité celte de la Bretagne, en ce début de Festival Interceltique.
Il est positif de voir celui qui n’est pas intervenu au moment de la querelle sur le fameux point d’interrogation de l’exposition Celtique? du Musée de Bretagne, témoigner d’un soutien à notre celtitude, ou si l’on préfère, à la manière selon laquelle les Bretons se perçoivent aujourd’hui.
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Cela étant dit, avec ce que l’on sait du personnage, il est permis de s’interroger quelque peu.
Si le celtisme exalte la liberté aux dépens des cadres institutionnels ou mentaux susceptibles de s’imposer à nous, on peut s’interroger sur la compatibilité de sa présence à la conférence au regard de la politique qu’il mène.
S’il a voté le vœu prononcé par l’assemblée du Conseil régional en avril 2022 pour l’autonomie législative et fiscale, il ne cesse de reculer pour donner des gages au système et aux réseaux de pouvoir. Pour lui, il n’est plus question d’une prise en compte spécifique de la Bretagne par le droit, mais d’un maintien sous le joug du droit commun, autant dire aucune autonomie.
A le suivre, la Bretagne ne serait pas suffisamment spécifique dans son peuple, son Histoire et ses intérêts fondamentaux pour justifier une quelconque particularité normative. Nous resterions donc soumis à la généralité de la norme édictée par Paris, et bien sûr aux forces du marché.
Je ne vois pas trop ce qu’il y a de celte dans ce positionnement, si l’on entend par celtitude cette soif inextinguible de liberté pour les communautés qui refusent de vivre sous le joug d’autrui, au point de refuser parfois toute forme d’institutionnalisation.
Or Chesnais-Girard aime l’institutionnel.
Il est assis sur l’institution régionale.
Or c’est l’institutionnalisation qui tue le politique entendu comme la recherche de l’émancipation et la capacité à affronter les véritables problèmes de l’heure.
C’est le drame de la décentralisation, que nous avons si mal pensée.
La décentralisation serait notre amie ?
Mais c’est elle qui contribue à notre domestication quotidienne. A partir du moment où la décentralisation existe, il ne sert de questionner le système le plus centralisé d’Europe.
Il faut comprendre que selon ce schéma de pensée, la collectivité régionale a moins pour objet de rechercher l’émancipation du peuple que de contrôler ses forces vitales.
C’est ce que nous voyons à l’œuvre en Bretagne avec une région qui a mis au pas le mouvement culturel breton, à coups de démantèlement des instances issues de la charte culturelle de 1978, de subventions et de strapontins offerts. Celui qui court les strapontins ne songe plus à ses libertés.
C’est encore ce qui se produit sous nos yeux avec les liens étranges qui semblent désormais unir la région administrative et Produit en Bretagne.
Tout ce qui fonctionne bien en Bretagne encourt le risque d’une récupération politique à moindre frais.
Et nous vivons sous le joug d’un redoutable système de pouvoir sans même y songer, à l’image des Chinois persuadés de vivre sous le meilleur régime démocratique et de loin, le plus sécuritaire.
La méfiance instinctive celte pour tout ce qui relève de l’institutionnel nous permet de penser les formes quotidiennes de domination.
Chesnais-Girard le triste Celte, défend-t-il la langue bretonne ?
Il est le premier à avoir baissé la somme dérisoire allouée à notre langue, dans un silence étourdissant des militants.
Il nous dit que les moyens manquent sans pour autant exiger les compétences budgétaires et fiscales qui nous permettraient de faire tant de choses.
N’est-ce pas le degré zéro de la politique ?
Chesnais-Girard le triste Celte, défend-il le patrimoine breton ?
Il ne s’est pas mouillé pour défendre le manoir de Bouvron / Bolvronn, propriété du secrétaire de Duc de Bretagne. Le manoir sera vraisemblablement détruit faute de soutien politique. Il n’a rien dit quant à la défense de nos menhirs de Karnag, apportant même un hommage appuyé au maire de cette commune.
Chesnais-Girard le triste Celte, défend-t-il encore le droit de vivre au pays ?
C’est lui qui va, pour le compte de l’état central, mettre en œuvre la ZAN qui rendra encore plus aléatoire ce droit fondamental pour les Bretonnes et les Bretons.
Je ne serai pas à la conférence, mais si certains d’entre vous y sont, posez-lui donc la question suivante :
« Qu’est-ce qu’un Celte, Mr le Président, qui n’aspire pas à vivre sous ses propres lois ? »
Un triste Celte assurément.
Illustrations de NHU Bretagne