crise du logement

Comment un manifeste sur la crise du logement change le débat en Bretagne

de NHU Bretagne
Publié le Dernière mise à jour le

La Bretagne, les Cornouailles et le Pays de Galles ont beaucoup de points communs, tant dans nos cultures que dans notre histoire.

Mais, étant donné notre situation de petites nations sans État propre, nous sommes aussi souvent confrontés aux mêmes problèmes.

L’un d’entre eux, l’invasion des résidences secondaires, est récemment devenu un problème très sérieux.
En Bretagne, Nil Caouissin de l’UDB (Unvaniezh Demokrakel Breizh/ Union Démocratique Bretonne) vient de publier un Manifeste pour un statut de résident en Bretagne, qui expose le problème et ses conséquences pour les populations locales et propose des solutions.

Ce livre a provoque beaucoup de réactions en Bretagne mais aussi à l’extérieur et suscité de nombreux commentaires dans les médias et sur les réseaux sociaux, générant approbations et critiques.
En tout cas, il a ouvert un ébat très souvent passionné ce qui est la preuve, s’il en fallait une, de la gravité du problème.

Il y a une véritable urgence en Bretagne.

Dans certaines zones côtières, le nombre de résidences secondaires représente jusqu’à 80% de l’ensemble des logements. Pour le seul département du Morbihan, le pourcentage est de 18% et, avec la crise du Covid, de nombreux citadins fortunés ayant tente de trouver refuge dans de magnifiques régions éloignées, ce chiffre pourrait augmenter.
Selon une estimation récente, ces résidences secondaires ne sont occupées en moyenne que trois mois par an et seuls 11 % des propriétaires envisagent de s’y installer définitivement.

Avant la pandémie, environ 330 000 résidences secondaires étaient recensées en Bretagne, ce qui permettrait de procurer un logement pour au moins 600 000 personnes, selon les estimations.

statut de résident en Bretagne

statut de résident en Bretagne

Conséquences et problèmes.

Ces nouveaux arrivants sont pour la plupart originaires des grandes villes (beaucoup viennent de Paris, mais beaucoup sont originaires des plus grandes villes bretonnes, Nantes / Naoned et Rennes / Roazhon), où le pouvoir d’achat est beaucoup plus élevé. L’effet est direct.

Les prix augmentent, souvent de façon exorbitante, et les habitants locaux ne peuvent plus se permettre d’acheter. Ainsi ils doivent déménager, se voyant ainsi privés de leur droit de vivre dans leur région d’origine là où ils travaillent.
Pendant un temps, la solution a été d’étendre les zones constructibles. Mais ce n’est plus compatible avec la nécessité de protéger les terres agricoles. On aboutit alors à une situation totalement absurde où les populations locales ne peuvent plus accéder au logement dans des zones où un nombre considérable d’entre eux sont vides.

En plus de cela, beaucoup de ces personnes, qui sont obligées de vivre plus loin, doivent utiliser leur voiture tous les jours pour aller travailler.

Ce qui, naturellement, n’est pas très bon du point de vue de l’environnement.
Enfin, cette multiplication des résidences secondaires évince progressivement les populations locales, vide des communautés entières. Les commerces, les activités culturelles et sportives, les services et les écoles, disparaissent. Ces lieux sont alors vides une grande partie de l’année, entièrement dédiés au tourisme de gens fortunés et aux vacances d’été.

Le statut de résident.

Dans son Manifeste, Nil Caouissin propose une année obligatoire de résidence avant d’avoir le droit d’acheter en Bretagne. Notamment dans les zones fortement impactées.

Il insiste sur le fait qu’il n’y aurait pas de critères d’origine (Bretons ou non Bretons par exemple) et que les personnes voulant vivre et travailler en Bretagne sont les bienvenues.
Les Corses ont déjà proposé une mesure similaire, et dans leur version, le temps de résidence avant l’achat d’un logement était de cinq ans. L’idée a reçu un soutien important du Parlement Européen et de la Ligue des Droits de l’Homme.

Mais elle a été rejetée par l’État français, qui la juge « discriminatoire ».

On peut bien sûr se demander ce qui est le plus discriminatoire : protéger les populations locales ou laisser des zones entières être occupées à leur détriment par le pouvoir de l’argent et de la spéculation.

Il est important de noter que ce statut, ou quelque chose de très similaire, a déjà été appliqué dans différentes parties de l’Europe. Ainsi dans l’archipel d’Aland en Finlande et Bolzano dans le Tyrol du Sud, qui fait maintenant partie de l’Italie.
Pour Nil Caouissin, cette mesure permettrait de lutter contre la spéculation immobilière, de stabiliser et de faire baisser les prix. Elle permettrait de libérer des logements pour la location ou l’achat. De plus, en donnant la priorité aux populations locales pour l’acquisition de biens immobiliers, elle leur permettrait de rester et de vivre dans leur région d’origine ou la ils travaillent.

Le Manifeste a suscité beaucoup de réactions et a été très bien accueilli en Bretagne, et ce n’est pas étonnant.

S’éloigner de sa région d’origine, non par choix mais sous la pression financière, est considéré comme extrêmement injuste. Il déstabilise des communautés entières et génère beaucoup de frustration et de ressentiment.

De plus, comme ce remplacement de population se fait très souvent dans des zones où la langue bretonne/brezhoneg est encore parlée, il affaiblit encore plus une langue déjà en danger.
Vu l’ampleur du phénomène et l’augmentation très probable à laquelle on peut s’attendre dans les années à venir, il est évident qu’une solution doit être trouvée, et rapidement.

Ce sera certainement un enjeu majeur pour l’UDB et pour toutes les forces engagées dans l’émancipation du peuple breton. Sans aucun doute, il en sera de même dans toutes les petites nations d’Europe occidentale confrontées au même problème.

Écrit en anglais par Jean LUCAS et publié en anglais chez notre confrère gallois Nation Cymru – Autorisation de publication en langue française de Nation Cymru.
Traduit en langue française par Guy-Christopher COPPEL pour NHU Bretagne.
Vidéo NHU Bretagne : village de résidences secondaires aux trois-quarts vide sur la côte du Morbihan, en mai.

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Nation Cymru

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