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Le moustique tigre à l’assaut de la Bretagne ?

de Stéphane BROUSSE

Le Moustique tigre – Aedes albopictus – est d’ores et déjà promis à une belle notoriété.

La bestiole, originaire du sud – est asiatique, serait aujourd’hui présente sur presque toute la planète. Seul, le continent Antarctique échappe à son joug. En 2024, elle est présente dans soixante-dix – huit départements français. Le Moustique tigre serait arrivé en Bretagne au cours du printemps 2022. Si nous n’y prenons pas garde, il pourrait bien, dans les années à venir, gâcher nos étés, mais aussi nos printemps et nos automnes.

Étymologie

Aedes Albopictus est son nom savant. Aedes signifie en grec ancien, désagréable ou déplaisant. Tout un programme. Albopictus signifie en latin, marqué de blanc. Son nom vernaculaire est donc Moustique tigre. Il aurait pu aussi se nommer Moustique zèbre, en raison de sa chitineuse robe noire et blanche, mais les entomologistes ont préféré le nommer, Moustique tigre en raison sans doute de son agressivité et de sa discrétion lorsqu’il se met en chasse.

Identification et comportement

Le Moustique tigre affiche une taille plutôt modeste de 0,5 centimètres. Il est relativement facile à identifier avec sa tenue rayée noire et blanche. Une ligne blanche caractéristique strie son thorax.

Notre maringouin asiatique n’est pas franchement un noctambule.
Il préfère piquer en journée, avec une préférence pour le soir et le matin. Son vol lent est silencieux. Il ne se déplace que de quelques centaines de mètres autour de son lieu de naissance. Il y a donc fort à parier, que cette déplaisante bestiole qui vous importune, soit née chez vous ou chez votre voisin. L’espèce est dite exophile.

Le Moustique tigre préfère en effet demeurer en extérieur.

Des individus plus aventureux, ou plus affamés, pourront néanmoins investir nos intérieurs. Son espérance de vie est de 29 jours à 25° et de 32 jours à 30°. Les moustiques – contrairement à une idée reçue – ne piquent pas pour se nourrir, mais pour se reproduire. Ces gourmets ne se nourrissent en fait que de nectar des fleurs. Seule la femelle est hématophage (1). Elle a besoin de votre sang pour prodiguer des protéines à sa progéniture affamée. Ensuite, elle pond de 50 à 200 œufs toutes les deux semaines. Elle ne se montre guère exigeante quant à la qualité de la pouponnière. Une simple capsule de soda ou de bière fera l’affaire !

Imaginez – vous une décharge de pneus à ciel ouvert après une belle averse orageuse ?
Dans des conditions satisfaisantes, la durée d’incubation n’est que de quelques jours. Les pontes auront lieu de mi – mars à mi – octobre. Les œufs résistent à la sécheresse, et, dans une certaine mesure, aux frimas. Pondus en automne, ils passeront l’hiver en diapause (2).

Origines

Le Moustique tigre est originaire des forêts tropicales et subtropicales du sud – est asiatique.
Ses capacités exceptionnelles lui permettent de s’adapter à de nombreux environnements, et, entre autres, aux zones urbaines et péri – urbaines. Il serait arrivé en Europe par cargo transportant des pneus usagés en provenance des États-Unis vers l’Italie. Les scientifiques ont observé que le Moustique tigre suivait ensuite les grands axes routiers. Il fréquente également les zones aéroportuaires.

Le Moustique tigre est observé pour la première fois en France métropolitaine en 2004 dans le sud – est, et pour la première fois, en Bretagne, en 2021 sur la commune de Domagné / Dovagnieg en Ille et Vilaine, seule commune aujourd’hui considérée comme infectée. Des suivis organisés ont détecté sa présence sous forme d’œufs, de larves ou d’adultes, dans les communes suivantes au cours de cette même année : Rennes / Roazhon (35), Janzé / Gentieg (35), La Gacilly / Gazilieg (56), Camors / Kamorzh (56) et Saint Brieuc / Sant Brieg (22).
L’Agence Régionale de la Santé (ARS) précise que la Bretagne ne peut être pour lors considérée comme une zone colonisée.

Risques sanitaires et mode de transmission des virus

Si le Moustique tigre n’est guère humaniste, il se montre en revanche très anthropophile.
Nous sommes sa proie préférée. En dehors des zones urbaines et péri – urbaines, il se contentera de mammifères, d’oiseaux, et même de reptiles ou de batraciens. L’insecte est vecteur de trois maladies virales ayant acquis une récente notoriété dans les médias : Dengue, Zika, Chikungunya.

Nous ne disposons pas actuellement de vaccins pour ces trois maladies.
Le traitement est donc symptomatique. Des essais cliniques sont en cours d’évaluation. En Nouvelle – Calédonie, une équipe australienne a introduit dans les œufs du Moustique tigre, une bactérie bloquant le développement des virus sus -cités. À la Réunion, des chercheurs stérilisent chimiquement des moustiques mâles, qu’ils répandent ensuite dans la nature, afin que les femelles ne soient plus fécondées. Sur une zone expérimentale de vingt hectares, et sur une année, la population de Moustique tigre aurait diminué de 60%.



Les Moustiques tigres ne sont que des vecteurs de pathologies virales.
Quel est le mécanisme de contamination ?
Une moustique en quête de protéines animales pique un être humain déjà infecté par un des trois virus et se contamine elle – même. L’arbovirus (3) se développe dans son système digestif. Il sera transmis à un autre être humain par le truchement de la salive émise au moment de la piqure. Cette salive, anesthésiante et anticoagulante. C’est ce mucus allergène qui donne naissance à ce bouton prurigineux.

Fort heureusement, aucun cas autochtone n’a été notifié en Bretagne.
Le risque semble pourtant bien réel, puisque 65 cas ont été répertoriés dans le sud de la France. Quelques cas importés ont cependant été identifiés en Bretagne en 2023, notamment aux environs de l’aéroport de Nantes / Naoned.

Comment limiter sa progression ?

Depuis 2020, ce sont les ARS qui ont la charge de surveiller sa progression.
Elles ont confié à la Société Altopicus la gestion de cette engeance piquante. Une trentaine de communes bretonnes sont sous surveillance du 01 mai au 31 octobre. Une cinquantaine de pondoirs ont été installés sur des zones à risques afin d’attirer les femelles gravides à proximité des ports et des aéroports, mais aussi, des zones de stockages de pneus usagés.

Il est demandé aux citoyens de signaler la présence de Moustiques tigre. Une plateforme de signalisation a été mise à disposition. Il est également demandé aux citoyens de lutter par des moyens simples contre la colonisation de la bestiole asiatique en supprimant aux environs de leurs domiciles les sites de pontes : coupelles sous les pots par exemple. Il est également conseillé de couvrir les récupérateurs d’eau d’une gaze.

moustique tigre en Bretagne
Moustique tigre en Bretagne – carte

Le Moustique tigre est aujourd’hui considéré comme une espèce exotique invasive qui a colonisé presque tous les continents. Les scientifiques s’accordent à penser que le Moustique tigre sera bientôt partout présent en Europe et en France métropolitaine.

La Bretagne n’échappera pas à cette colonisation si nous n’y prenons pas garde.
Il convient donc de ralentir par les moyens les plus simples et les plus efficaces son inexorable progression. Ne négligeons pas non plus le rôle de prédation des oiseaux et des chiroptères dont les populations ne cessent – hélas ! – de se dégrader. Rappelons aussi que le réchauffement climatique favorise les migrations et donc la survenue de nouvelles pathologies potentiellement létales. Il serait enfin fort désagréable de se voir gâcher des apéros en terrasse à la belle saison !

(1) Hématophage : qui se nourrit de sang
(2) Diapause : arrêt temporaire du développement des œufs ou des larves
(3) Arbovirus : virus transmis par un insecte à un mammifère

Bibliographie

ARS Bretagne : www.bretagne.ars.sante.fr/la-lutte-antivectorielle-et-les-moustiques-tigresOEB: https://bretagne-environnement.fr/article/le-moustique-tigre-bretagne
Société Altopicus : www.altopictus.fr
Mouches & moustique d’Europe, Denis Richard et Pierre – Olivier Maquart, Delachaux & Niestlé, 320 pages, mars 2024

Iconographie

Crédit photographique @ Smith Chetanachan
Carte de France du Moustique tigre / Ministère du Travail de la Santé et des solidarités
Carte de surveillance du Moustique tigre en Bretagne / Observatoire de l’environnement en Bretagne (OEB)
Schéma du cycle de transmission des arbovirus / Ministère de la Santé

Moustique tigre en Bretagne
Moustique tigre en Bretagne – trois départements bretons sont déjà atteints, Loire Atlantique, Ille et Vilaine et Morbihan

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