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Eau chaude, eau froide
La lutte serait donc terminée, comme nous le montre l’hirondelle.
Ces derniers temps, un grand chanteur breton, dont la probité n’est pas à remettre en cause, a repris ce vieux titre qu’il avait écrit au début des années 1970.
À cette époque, le remembrement ravageait la campagne bretonne, la jeunesse s’exilait, la langue bretonne disparaissait. Comme ce tableau semble toujours d’actualité ! Pourtant, selon la nouvelle version de la chanson, l’hirondelle est revenue …
Les temps noirs sont terminés.
Ce qui en donne le signe, selon le texte, ce sont les festoù-noz, qui rassemblent de façon magnifique à travers les âges et les milieux partout en Bretagne. C’est vrai, il est plaisant de se réchauffer au feu de la culture, de ne plus avoir honte de danser. Mais l’agriculture intensive ravage toujours les campagnes bretonnes. La langue survit péniblement autour de 100 000 brittophones. Moins encore pour la langue gallèse, sur pas loin de cinq millions de Bretonnes et Bretons.
Et la jeunesse continue de s’exiler.
On peut danser, se plonger dans le bain d’eau chaude de la culture, là où la question bretonne est raisonnable et ne chahute pas trop. Sauf qu’autour de nous, le monde se refroidit, et le seul fait culturel, aussi vivace soit-il, n’y changera rien.
Comment pourra t-on faire comprendre le combat pour une langue bretonne si elle est celle d’une terre où on ne trouve plus ni eau potable ni terre fertile ?
Quel peuple peut-il faire vivre sa culture s’il n’a pas su défendre la terre qu’il habite, pour qu’elle continue à pouvoir accueillir la succession des générations ?

L’avenir de la Bretagne réside dans sa jeunesse
Ces problèmes peuvent sembler lointains, ils sont pourtant plus que jamais contemporains et quotidiens.
Plus près de nous, comment les Bretonnes pourraient-elles continuer de faire vivre les Bagadoù du pays si des prédateurs sexuels y trônent en toute impunité. Parfois dans le silence honteux et ahurissant du mouvement culturel ?
Et à quoi bon l’identité bretonne si des pans entiers de chaque génération quittent la Bretagne sous la pression de la spéculation immobilière, pour le mirage d’une carrière dénuée de sens ou par un manque d’espoir dans l’avenir du pays ?
Le monde se refroidit et la revendication bretonne a bien besoin de plonger la tête dans l’eau glacée.
Sans cela, il y a tout à parier que les maigres acquis identitaires ou culturels seront ballottés puis balayés dans le décalage face aux réalités de l’époque.
Ce monde toujours plus inquiétant, dont l’ambiance se refroidit à mesure que l’atmosphère se réchauffe, voit tout naturellement les idées politiques reprendre plus d’intensité que jamais. Même si les temps à venir s’annoncent difficiles, l’Histoire montre que ces périodes peuvent aussi être celles qui font éclore les grandes avancées nécessaires.
Les idées d’une autre vision du monde et de l’humain prennent déjà place dans les débats qui commencent à transformer la société.
Il y a encore beaucoup à construire, pour repenser le monde dans la diversité, l’harmonie avec l’environnement. Puis l’égalité qu’importe les genres ou les identités. Également l’économie tournée vers la satisfaction des besoins et de la sobriété plutôt que le profit et la croissance. Enfin, la véritable démocratie, construction politique future à partir de la base, des lieux de vies, de travail, des territoires.
Ces idées qui avancent dans la société résonnent parfois depuis longtemps en Bretagne.
Les défis et les difficultés du XXIe siècle sont aussi des lieux d’espoirs, pour recréer du commun, du possible, de la force collective. La Bretagne y est un terreau plus que fertile. Le temps des grands universalismes, des modèles uniques à appliquer partout de la même manière à travers le monde, est bel et bien désuet.
Fini, echu.La porte s’ouvre sur un autre monde, nouveau, sur des pays nouveaux, construits à partir du local, par lui et pour lui.
Pour que réussisse toutes ces transformations dans notre pays, c’est d’une Bretagne politique et politisée dont nous avons besoin.
Il est temps de plonger la tête dans l’eau froide, de sortir du bain d’eau chaude, pour mieux retrouver les hirondelles.
Il est temps de s’organiser, de revendiquer, de construire une Bretagne libre.
1 commentaire
En ce qui concerne les jeunes qui quittent la Bretagne ,ce sont souvent des personnes qui ont un haut niveau d’études , les offres d’emplois correspondants à celles ci sont déficitaires en Bretagne .Par contre il y a des secteurs qui recrutent en Bretagne et peinent à trouver des employés ,pourtant ces emplois sont de plus en plus qualifiés , par exemple en agriculture , y compris biologique ,vu que c’est en Bretagne qu’elle se développe le plus sans compter les circuits courts gourmands en main d’oeuvre .Alors je pense que certaines ,certains ,s’ils veulent vivre et travailler en Bretagne , devraient commencer par crocher dedans également ,mais parfois la terre est basse ….