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Dinard, un lieu privilégié pour les vacances de Jacques Chirac.
Le décès de Jacques Chirac ce jeudi 26 septembre marque la fin de l’un des derniers grands politiques français du 20e siècle. Alors que la France entière rend un dernier hommage au corrézien, il serait intéressant pour nous Bretons de dresser un bilan de son action pour notre région.
L’un des premiers points marquants de la relation entre le Président Chirac et la Bretagne est sa popularité auprès du monde agricole, comme le témoignent ses nombreuses visites au salon d’élevage Space à Rennes (y compris un certain 11 septembre 2001 avant d’inaugurer la chambre des métiers de Ker Lann). De même le monde maritime pourra se souvenir de son implication dans la création du porte-avions Charles de Gaulle ou de l’hommage qu’il a rendu à Eric Tabarly à la base de Lanvéoc-Poulmic le 19 juin 1998.
Un président ouvert à la décentralisation de la République française.
Au-delà de son image populaire auprès de la France des régions, c’est la question du bilan matériel du « président de tous les Français » qui se pose pour la Bretagne. Incontestablement, c’est la réforme constitutionnelle de 2003 pour l’Acte II de la décentralisation qui nous intéresse le plus.
En effet, le président Chirac souhaite marquer son second mandat par une nouvelle étape dans la décentralisation de la République après les lois Defferre de 1982. Il convient de rappeler que la décentralisation est un processus de transfert de compétences depuis un État centralisé vers des collectivités territoriales indépendantes.
Un pas vers l’autonomie financière des collectivités locales …
La loi constitutionnelle du 28 mars 2003 modifie le premier article de la Constitution française de 1958. Et consacre la décentralisation de l’organisation de la République comme étant un principe constitutionnel. Cette réforme crée également de nouvelles formes de démocratie locale directe. Telles que le droit de pétition des électeurs des collectivités. Ou même l’organisation de référendum locaux. De même, elle constitue un premier pas vers l’autonomie financière des collectivités locales.
En somme, c’est l’organisation des collectivités territoriales qui évolue. La Bretagne dispose en théorie de nouveaux outils pour assurer elle-même ses propres décisions. Cependant si le Président a pu se montrer ouvert quant à la question de la décentralisation de la France, il est néanmoins resté sourd aux revendications des Bretons.
A quand une réforme constitutionnelle reconnaissant une véritable autonomie à la Bretagne ?
Une ouverture seulement d’apparence.
La langue bretonne n’aura pas progressé durant ces mandats. Durant sa présidence il a refusé de ratifier la Charte européenne des langues régionales et minoritaires. Et ce même si Lionel Jospin (premier ministre de l’époque) a pu lui proposer un projet de révision de la Constitution permettant pleinement d’intégrer la charte au droit français. Notamment en modifiant le principe d’indivisibilité de la République française. En vain. Le jacobinisme de la République française continuera de prévaloir sur les intérêts de millions de Bretons.
Également aucune avancée n’est à noter concernant la réunification de la Bretagne.
Durant ses mandats présidentiels plusieurs politiques de droite se sont déclarés favorable au rattachement de la Loire-Atlantique à la Bretagne. Tels que François Goulard (secrétaire d’État aux Transports et à la Mer de 2003 à 2005 puis ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche de 2005 à 2007). Ou Alain Madelin (ministre de l’Économie et des Finances en 1995). Cependant le Président Chirac n’interviendra pas en faveur d’un réel débat politique quant à la situation de la Loire-Atlantique.
Par ailleurs, même si la réforme constitutionnelle de 2003 semble marquer une nouvelle étape dans la décentralisation de la France, il est regrettable que les avancées soient trop timides. La délégation aux régions et aux départements de la gestion du personnel non-éducatif de l’Éducation nationale ne s’est pas traduit en contrepartie d’une augmentation nécessaire des ressources financières des collectivités territoriales. Les nouvelles missions dédiées aux régions et départements sont trop peu nombreuses et peu importantes pour le quotidien des Bretons. Contribuant ainsi à nourrir un sentiment de distance entre le peuple et le lieu de la prise des décisions.
… et si Jacques Chirac n’en était pas responsable ?
Dès lors un bilan se pose. Si Jacques Chirac a jouit d’une forte popularité en Bretagne (il est arrivé en tête au second tour en 1995 dans quatre des cinq départements bretons) cela ne s’est pas traduit par des actions concrètes pour le quotidien des Bretons.
Néanmoins nous ne pouvons pas reprocher au Président de la République Française de ne pas faire assez pour la Bretagne. Le jacobinisme reste fort dans un pays qui a toujours craint les mouvements autonomistes. En conséquence c’est aux politiques bretons d’agir. En obtenant davantage de missions et en représentant au quotidien les Bretons dans leur intégralité.
Le décès de Jacques Chirac met en lumière que nous autres, Bretons, n’avons toujours pas de véritable gouvernement à notre tête. Contrairement à l’Écosse, au Pays de Galles ou à la Catalogne. La réforme constitutionnelle de Jacques Chirac n’y a rien changé. La prochaine étape de décentralisation promise par le Président Emmanuel Macron y apportera-t-elle quelque chose ?