vents contraires

Des vents contraires se lèvent en Bretagne, par Alan Le Cloarec

de Alan LE CLOAREC
Publié le Dernière mise à jour le

Tout mouvement politique évolue dans des vents qui lui sont parfois porteurs, parfois contraires.
Il est des temps où il faut lutter pour faire du sur-place, d’autres où il suffit d’un pas pour être propulsé en avant.
Ce XXIe siècle est probablement, pour l’Emsav, une période où les vents se mettent à souffler dans le bon sens.

Depuis l’annexion de 1532…

La Bretagne se sent faible face à une France lumineuse, brutale et condescendante. Dès la répression des Bonnets Rouges de 1675, le message avait été envoyé : l’annexion était faite et aucun trouble à l’ordre français ne serait toléré.

Nous étions la glaise et la boue, l’odeur du fumier, les miséreux d’un autre temps que le progrès allait balayer. Dans sa chevauchée, il devait faire place nette pour d’authentiques nouveaux individus, Français, cela va sans dire. Noms de villages, de familles, d’individus ont beau avoir été francisés, la population bretonne stigmatisée et tenue au col, le nationalisme breton combattu en tous lieux, par tous les moyens et dans tous les milieux …
Rien n’y fait, nous avons résisté malgré tout.

Nous sommes encore là et la France qui nous fait face n’est ni celle de 1532, ni celle de 1675, ni celle des années « folles », « glorieuses » ou autres.

Dans le passé, il fallait sans cesse faire descendre la France de son piédestal, de sa prétention au progrès et à l’universalité. Il nous fallait chasser cette nation auréolée de toutes les qualités dans un imaginaire collectif forgé à coups de trique par les instituteurs républicains.
Aujourd’hui il suffit de se taire.
La France s’effondre d’elle même dans une déconfiture politique et sociétale accablante. Tout a changé.

Les vents ne portent plus les mêmes mélodies.

De nombreuses générations bretonnes sont passées par le reniement. Pour préférer la France, pour l’adorer, lui jurer fidélité et la servir sans condition. Puis on a arrêté de parler gallo, breton, on est devenu « Français » de papier. Car il le fallait, car c’était le progrès.

Avant la France représentait l’espoir, le renouveau politique, la libération, l’enrichissement, le bonheur. Aujourd’hui elle vit de l’ultra-autorité de l’État, de la précarisation, des crises, des destructions de services publics, de perte de sens et d’identité. L’édifice si beau et si puissant vrille sous les assauts des tempêtes, il se rend enfin compte qu’il n’était qu’un colosse aux pieds d’argiles, maintenu debout grâce à l’auto-persuasion d’une existence et d’une supériorité française, un roman savamment entretenu mais aujourd’hui révolu.

S’il n’y avait pas les victoires de l’équipe de football de France, il n’y aurait personne à arborer le drapeau tricolore en Bretagne. L’école, la télé, le foot, ici la France n’existe pas au-delà.

Il est vrai malgré tout qu’une forme de contrat social tenait l’édifice France en Bretagne, comme ailleurs.

Mais les gouvernements parisiens successifs le détruisent depuis plusieurs décennies. C’est ce qu’on nomme en bon français « scier la branche sur laquelle on est assis ».
Les Bretonnes et les Bretons reniaient tout, leurs langues, cultures, territoires, costumes, organisations sociales, habitats, histoires, identités, nation …
Les hommes partaient mourir à la guerre et les femmes pleuraient en silence. L’abandon était total, il fallait se donner entièrement à la France, pour qu’elle donne en retour un peu du fruit de sa puissance, de ses richesses et de son prestige.

Il faut d’ailleurs toujours se donner pour la France.

Sauf que la France, elle, de son côté ne donne plus grand chose.
Ainsi se lèvent les vents contraires.
Maintenant la honte bretonne n’est plus. Et la fierté française s’est émiettée sous l’érosion du temps. La France perd son sens, elle ne sait plus vraiment qui elle est. Car elle n’a probablement jamais su qui elle était si ce n’est une fiction. En face la Bretagne reste solide. Elle a vécu sur des temps plus longs, elle gagne du sens dans les cœurs et les esprits à mesure que la France se décompose.

C’est un constat simpliste duquel découlent des conséquences en cascade.

Les nouvelles générations vont grandir dans un monde de plus en plus terrifiant, où la question bretonne sera peut être la seule sécurité à laquelle se raccrocher.
La France était vorace, elle a voulue détruire la Bretagne jusqu’à la racine.
Nous avons tenu. Maintenant les vents tournent et ils tournent vite.
Approchez donc, on en ressent déjà la brise …

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1 commentaire

Penn kaled 30 avril 2021 - 9h04 Répondre

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