Philippe Wahl

Courrier à Philippe Wahl, Directeur Général La Poste

de NHU Bretagne

Philippe Wahl, la toponymie bretonne est en danger

Monsieur le directeur général,

Le rendez-vous que nous avions fixé le Mardi 11 Juin 2024 en votre présence, par l’entremise de Monsieur le député Marc Le Fur, a dû être reporté pour cause de dissolution de l’Assemblée Nationale et nous le regrettons.

Nous ne manquerons pas de revenir vers vous tant le rôle de La Poste SA est incontournable dans la sauvegarde de notre toponymie ancestrale bretonne.

Les gens sont choqués en Bretagne et prennent soudainement conscience de l’étendue du drame culturel qui se déroule depuis plusieurs années déjà et qui voit nos lieux-dits millénaires en langue bretonne sortir de l’adressage au profit de noms de rues hors sol et souvent en langue française.

Personne ne peut admettre qu’un lieu-dit en langue bretonne chargé de sens et vieux de 1 500 ans soit soudainement remplacé par une « Rue des Alouettes ».

De partout remontent aujourd’hui des exemples de noms de lieux-dits disparus, de rues en langue bretonne débaptisées pour permettre aux « gens qui ne savent pas le breton de comprendre ». Il apparaît que souvent les gens avaient été rassurés au motif que le nom du lieu-dit resterait dans l’adressage après le nouveau nom de rue.
Or, il n’en est rien.

Si toutes ces débretonnisations ne sont pas imputables à La Poste SA, votre société y contribue largement en préparant l’adressage pour le compte de communes dépourvues de moyens, en proposant des listes de noms de rues en langue française et en avançant la nécessité d’une mise aux normes au nom d’impératifs techniques ou de présupposés liés à la meilleure qualité des services publics.

Philippe Wahl, votre société La Poste participe à un processus décisionnel qui conduit souvent au pire.

L’image de La Poste SA en devient détestable à force de s’éloigner de l’humain, comme en témoignent les articles de presse, les dessins ou même les chants qui remontent du peuple et figurent au présent dossier.

Depuis le début de la mobilisation bretonne et notamment la saisine de l’UNESCO, vous avez déjà évolué quelque peu en acceptant que vos commerciaux reçoivent une formation à la protection de la toponymie bretonne par l’Office Public de la Langue Bretonne.
Nous vous en remercions.

débretonnisation
Harz d’an divrezhonekaat Stop à la débretonnisation

Nous pensons qu’il vous faut encore aller plus loin pour que notre toponymie bretonne soit intégralement respectée pour les adressages en cours.

Les associations culturelles bretonnes regroupées dans le collectif du 1er juin vous demandent de bien vouloir associer l’Office Public de la Langue Bretonne au processus de préparation des adressages dont vous avez la charge. Ainsi qu’en conviant ce service lors des visites sur le terrain et en obtenant sa validation avant toute proposition faite aux municipalités. Le travail accompli par l’Office Public de la Langue Bretonne OPLB, service rattaché au Conseil Régional de Bretagne administrative, permet de concilier le respect de notre patrimoine immatériel avec la densification de la population et l’accès légitime aux services publics.

Mais il faudra encore réparer les dégâts repérés ici ou là, comme à Plouezoc’h.

Nous sollicitons votre accord pour contribuer dans la mesure de vos moyens à la régularisation qui s’impose, en lien avec le Conseil régional de Bretagne administrative, l’Office Public de la Langue Bretonne, les autres collectivités intéressées sur les cinq départements bretons, les associations culturelles bretonnes, et nous l’espérons l’Unesco.

Il conviendra de dresser l’inventaire précis des atteintes par commune et de proposer à chaque municipalité un nouvel adressage respectant notre toponymie ancestrale. Le député Paul Molac, en charge de l’OPAB, nous a fait savoir que la région Bretagne administrative était disposée à réfléchir à la meilleure manière de procéder en lien avec les différents partenaires.

Enfin, votre société nous assure toujours que la topologie – rue, impasse – doit être mentionnée en français au nom d’un communiqué de la Commission nationale de la toponymie daté de 2019 qui invoque la loi Toubon de 1994 et la nécessité pour les Français de se comprendre entre eux.
Il est aisé de vous répondre que la loi Toubon, par son article 21, dispose qu’elle s’applique sans préjudice de la législation et de la réglementation relatives aux langues régionales de France et ne s’oppose pas à leur usage, ce qui résulte encore des débats parlementaires de l’époque.

lieux dits en langue bretonne menacés
merci de signaler toute atteinte à la toponymie en brezhoneg

Il nous faut encore rappeler que nos langues régionales ont un fondement constitutionnel sous l’angle du patrimoine et que la France a ratifié les conventions protectrices de l’Unesco relatives à la protection de la diversité culturelle et du patrimoine immatériel de l’humanité.

La Poste SA n’a jamais eu mandat légal pour accélérer le processus de débretonnisation en installant la langue française là où elle n’a jamais eu de place. Cette pratique consistant à mettre « rue », «place » avant l’appellation en langue bretonne conduit à mélanger les deux langues pour un résultat souvent fâcheux, aboutissant parfois à des doublons ou des contresens.

Adressage intégral en langue bretonne.

Nous vous demandons de reconnaître le droit pour nos communes de procéder à un adressage intégral en langue bretonne dans le respect de notre patrimoine immatériel ancestral.

Enfin, la particularité linguistique de la langue bretonne, le Ñ ou le C’H, constituent autant d’obstacles à la bonne diffusion des courriers. De nombreux messages nous ont été remontés faisant état de retard ou de refus d’adresser des courriers en breton.

Il est par ailleurs avéré que pour les courriers industriels, la normalisation s’impose via des sociétés lucratives de RNVP -Restructuration Normalisation Validation Postale – et les adresses en langue bretonne comportant ces signes caractéristiques ne sont pas postés dans les mêmes délais. Au nom de quoi les nécessités normatives liées au meilleur acheminement du courrier devraient-elles prendre le pas sur la langue bretonne au point de nécessité un surcoût ?

Nous vous demandons de bien vouloir prendre toutes les dispositions pour mettre un terme à ces discriminations choquantes dans l’exercice d’un service public, et nous reviendrons vers vous à la rentrée pour fixer un nouveau rendez-vous.

En vous remerciant pour votre écoute, nous vous prions de croire, Monsieur le Directeur Général, en l’assurance de notre meilleure considération.

Pour le collectif du 1er Juin,

Yvon Ollivier, Président de Koun Breizh
Gwenael Henry, Président de Bretagne Majeure

Lire l’original du courrier co-signé par douze importantes associations bretonnes

Les signataires du courrier à Philippe Wahl

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