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Transmettre le breton, aussi à la maison

de NHU Bretagne
Publié le Dernière mise à jour le

La langue bretonne n’aura pas d’avenir si nous ne parvenons pas à relancer la transmission familiale…

Diwan, Div Yezh, Dihun.

Depuis plus de quarante ans, le fer de lance du combat pour la langue bretonne concerne son apprentissage à l’école.
C’est sans doute une bonne chose, mais pour que notre langue reste vivante encore faut-il la transmettre à la maison avant toute chose.
Où en est-on en la matière ?

Allons à la rencontre de Katell Chantreau qui réalise une thèse sur cette question.

Pour mener à bien son travail elle a interrogé 450 personnes qui parlent breton à leurs enfants.
Ces pères et mères sont nés entre 1970 et 1995 et connaissaient déjà la langue bretonne à l’arrivée de leur premier enfant. La majorité de celles et ceux qui ont répondu au questionnaire habitent en Bretagne occidentale. Alors que 16% résident en Bretagne orientale. Et quelques 6% habitent soit en France, soit dans un autre pays, et ce jusqu’en Australie.

Ces personnes sont sur-diplômées ce qui m’a étonné. Car 85% d’entre eux ont un niveau d’étude équivalent à Bac+3 ou supérieur.
C’est beaucoup plus que la moyenne de la population bretonne.
Selon les résultats, la transmission du breton se fait essentiellement par les pères.

Le breton ne serait plus une langue maternelle ?

Plusieurs raisons peuvent expliquer cette différence entre hommes et femmes.
En premier lieu il y a une différence d’appréciation de son niveau de breton.
Les hommes ont plus confiance en leur niveau et en leurs compétences linguistiques. Il apparaît également que les compagnes des hommes ont un niveau de breton plus important que les compagnons des femmes.

On note toutefois qu’il y a plus de femmes en couple avec des hommes ignorant totalement la langue.
Une autre explication peut être avancée, les hommes militent plus pour le breton, utilisent plus la langue avec leurs amis, avec des brittophones de naissance…

Transmettre le breton …

Le fait d’avoir appris le breton résulte plus d’un choix personnel de leur part. Tandis qu’il y a plus de femmes qui ont acquis la langue à l’école, suivant la volonté de leurs parents.
Les personnes qui ont appris le breton au sein de leur famille, ou en famille et à l’école simultanément, ont tendance à plus transmettre la langue que celles qui l’ont apprise à l’école et rien qu’à l’école.

En ce qui concerne les adultes, celles et ceux qui ont appris la langue à l’âge adulte, on note une grande différence entre les hommes et les femmes.
Donc, les hommes qui ont appris à l’âge adulte transmettent fortement à leurs enfants. Tandis que les femmes transmettent, elles, un peu moins que la moyenne.

Les personnes qui n’ont acquis la langue qu’à l’école sont celles qui transmettent le moins.

Ces chiffres montrent qu’il n’est pas évident pour ceux qui ont appris la langue à l’école de la transmettre par la suite à leurs enfants.
Encore faut-il préciser que les personnes ayant répondu sont les plus motivées.
Le fait que ce soit une langue purement scolaire fait qu’il leur manque peut-être de quoi exprimer les choses du quotidien ou relatives à la vie affective…
Les choses ne se passent pas de la même manière d’une famille à l’autre.

Katell a établi quatre niveaux de transmission :

  • D’abord le niveau fort, lorsque le breton est la seule langue parlée.
  • Puis le niveau intermédiaire, proche de l’équilibre linguistique.
  • Le niveau faible, lorsque le breton n’est parlé que de temps en temps.
  • Enfin le dernier niveau concernant des pères et mères brittophones mais qui n’utilisent jamais le breton en famille.

Certains ont une stratégie monolingue. Ainsi ils ne parlent donc que breton à leurs enfants. Alors que d’autres ont une stratégie bilingue et utilisent donc les deux langues au sein de leur famille.
Ce que je trouve très intéressant est de voir comment les stratégies peuvent changer pour les pères comme pour les mères.

La compétence linguistique.

Beaucoup de parents adaptent leurs façons de faire en fonction de la vie, de la situation, des gens autour d’eux. Ainsi que de l’âge de leur progéniture, ou en fonction de leur vie. Par exemple quand ils changent d’emploi cela peut avoir une influence. Ou lors d’une séparation ce qui peut amener à des changements.

Je trouve très intéressant d’essayer de comprendre comment peut être influencée la transmission en fonction des événements de la vie.
Il n’est pas facile de parler breton au quotidien à ses enfants. Et c’est sans doute pour cela que tout le monde ne le fait pas.
L’une des difficultés majeures en matière de transmission, c’est la compétence linguistique.

Il y a beaucoup de personnes qui ne sont pas à l’aise en breton.

Certes elles sont brittophones, mais comparent toujours leur niveau de français. Et se disent : « bon, je parle bien mieux français, il faut donc que je parle cette langue à mon enfant« .

Une autre difficulté très souvent rencontrée, surtout pour les mères, est le fait que le conjoint ne parle pas breton. C’est le cas de beaucoup de conjoints. Alors les mères en sont très gênées pour parler breton devant quelqu’un qui ne le comprend pas. Tandis que pour les pères, il ne semble pas si difficile de parler breton devant leur conjointe qui ne maîtrise pas la langue.
Il faut aussi dire que cela a un effet car beaucoup de conjointes non-brittophones deviennent ainsi brittophones. Ou du moins maîtrisent un peu la langue. Au moins assez pour la comprendre.
Une difficulté supplémentaire vient de la faible vie sociale en breton qui existe de façon générale dans la société.

Si vous voulez avoir une vie en langue bretonne il faut faire des efforts.

Le breton ne vient pas à vous comme cela. Il faut aller le chercher. Un autre problème vient du fait que le breton des enfants est limité.
Lorsqu’un enfant préfère parler en français, cela décourage tout le monde. Et fait que le breton est peu à peu abandonné.
Je souhaite dire à ces personnes qu’il ne faut pas se décourager. Il faut tenir bon !

Quelles sont les solutions pour améliorer la situation ?

Il faut renforcer les compétences linguistiques des 20-30 ans, pour qu’ils aient confiance en eux au moment de devenir parent.
Travailler à dynamiser la vie sociale en breton peut aider à créer des réseaux de familles brittophones dans chaque région. Également construire un certain nombre d’outils qui pourraient être utiles…
Beaucoup de choses peuvent être faites. Mais pour l’instant, la politique linguistique du Conseil Régional n’est un document de 40-50 pages environ. Et seules trois lignes concernent la transmission familiale.

Je suis convaincue depuis longtemps que la transmission familiale est la clé de l’avenir du breton.

La langue ne survivra pas si nous ne parvenons pas à relancer la transmission au sein des familles… Transmettre le breton est primordial.
Le travail de Katell n’est certes pas fini, et ne vaut pas pour tout le monde en Bretagne.

Il nous est cependant utile pour comprendre la situation d’aujourd’hui.
Un exemple qui sort du lot : parmi les personnes qui transmettent le plus le breton à leurs enfants 28% d’entre eux ont appris la langue à l’école contre 46% qui l’ont apprise
à l’âge adulte.
Voilà de quoi réfléchir afin d’ajuster le tir, car le temps nous est compté !

Transmettre le breton, entretien réalisé par Brezhoweb – 4 munud

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