intégration ou sécession Bretagne

Bretagne colonie, chapitre 2 : Intégration ou sécession, par Alan Le Cloarec

de Alan LE CLOAREC
Publié le Dernière mise à jour le

Bretagne : intégration ou sécession ?

N’est-ce pas la grande question, pour toutes les populations issues d’une histoire coloniale ?
C’est en ce sens qu’ici, comme à travers le monde, l’indépendance a toujours l’été l’espoir principal pour mettre fin à ces dominations.

Puisque la colonisation commence toujours par l’annexion, il semble logique de vouloir revenir sur cet état de fait à l’origine de tout, pour s’assurer une pleine liberté. Néanmoins, la question que pose ce dilemme ne se limite pas à l’indépendance, même si elle ne s’en éloigne jamais non plus totalement.
Entre les deux, précisons déjà qu’ils diffèrent de nature.

L’intégration, en effet, n’est pas un choix.

Elle est l’exigence de la nation dominante, car elle sait que sa supériorité ne souffrira plus de remise en cause quand tout le monde ne sera plus que Français·e. En France, le moindre petit espace de vie communautaire non français est combattu avec frénésie et hystérie comme nulle par ailleurs en Europe et peut être même dans le monde.

L’intégration est ancienne, exigée et exigeante. Elle est l’ordre donné par le conquérant pour que l’autochtone oublie toute forme de liberté particulière. À la base, c’est donc un phénomène unilatéral, qui part d’en haut pour s’exercer vers le bas, mais à force d’assimilation, la mécanique finit par se suffire à elle même. Signe qu’un fait colonial est bien vivant, les populations concernées finissent le travail par elles-mêmes, elles n’ont plus besoin d’être stigmatisées pour se délaisser de leur être originel. Elles l’ont oublié.

La sécession quant à elle est un choix…

Un acte politique de séparation officielle et volontaire entre deux pays, deux nations et potentiellement deux États. Dans ce cas, plus de souffrances liées à une particularité reniée et brisée, plus de nation dominante versus dominée, plus de honte mais de la fierté.

Ce dilemme de l’intégration ou de la sécession est multiple, il peut correspondre à l’orientation massive d’un peuple, aux petits gestes et aux petites idées de tous les jours, mais aussi bien sûr aux choix, aux stratégies et aux idéologies politiques.
Logiquement, dans une histoire de colonisation et de résistance à cette dernière, le nationalisme est le mouvement du pays qui porte le choix de la sécession. Il en est l’incarnation même. Chez nous rien n’est aussi clair et une bonne partie du mouvement breton préfère l’intégration, ou élude la question, plutôt que d’assumer ce qui est tout à fait naturel et évident pour un combat comme le nôtre.

En Europe, les cinq nations qui avancent dans leurs combats respectifs sont sur des logiques de sécession …

En Écosse comme au Pays Basque, en Catalogne, en Corse et au Pays de Galles. Cette logique ne signifie pas forcément défendre l’indépendance, comme rappelé précédemment, c’est l’un des aspects possibles mais non absolu.
La différence est sur le plan idéologique comme stratégique. D’un coté la sécession pose l’idée qu’il y a deux nations en présence ; de l’autre, l’intégration se revendique un morceau particulier d’une plus grande nation. D’un coté la sécession travaille naturellement dans un débat national, alors que dans l’intégration, les composantes du mouvement national travaillent avec les tendances politiques du pays dominant qui sont proches de leurs positions politiques sur les sujets de société, autrement dit droite-gauche.

YesBreizh, ou parler sereinement de l’indépendance de la Bretagne

On peut aussi lister quelques éléments spécifiques qui vivent toujours dans l’Emsav actuel, là où ils ont disparu depuis longtemps dans les autres pays précédemment cités.

C’est une spécificité bretonne que la majorité des leaders du mouvement se revendiquent toujours officiellement du « régionalisme » et parlent de leur pays comme s’il était une simple région française au particularisme marqué. Si on ajoute à cela les définitions autonomistes qui rejettent l’idée nationaliste, on arrive même à la quasi totalité des leaders. C’est l’un des points de divergences majeures avec les autonomistes d’autres pays comme la Corse ou le Pays de Galles.

Là-bas, l’autonomisme est bien plus proche de ce qu’il était à l’origine en Bretagne, quand les Breiz Atao ont été les premiers à la populariser. Dans ces cas, l’autonomie est l’une des solutions politiques possibles, à coté de l’indépendance, pour une nation libre de ses choix. Ce n’est pas une question de décentralisation ni de régionalisme, mais de droit des peuples à disposer d’eux mêmes.

Une fracture existe donc entre ces deux visions, d’où découlent de nombreuses orientations stratégiques et idéologiques. D’un côté, il y a ce que la France veut faire de ses « territoires », de l’autre il y a ce que des nations bretonne, corse ou autres, se permettent d’exiger comme droits politiques.

Lire la suite dans le livret Bretagne Colonie paru chez Yoran Embanner, l’Éditeur des Peuples Oubliés

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1 commentaire

boned ruz 28 février 2022 - 22h20

Personnellement, je pense que le discours qui prend pour références l’autonomie, l’indépendantisme, le séparatisme, le régionalisme… est un discours mené par la nation dominante et colonisatrice.
En réalité il n’y a que deux états possibles : celui du pays libre ou celui du pays colonisé. Joël Cornette dans sa nouvelle approche de l’histoire de Bretagne ( après un certain nombre de ses confrères qui avant lui sont arrivés à des conclusions similaires) apporte la preuve de l’état de colonisation de la Bretagne en ce qu’elle à été annexée militairement; les choses sont claires aujourd’hui! L’avantage de cet auteur c’est qu’il est reconnu tant sur le plan professionnel et universitaire qu’au niveau des maisons d’édition…Sa parole peut faire référence plus facilement que la parole de ses confrères même si ces derniers seront probablement reconnus quand l’état de Bretagne colonie sera connue.
Nous avons donc un peuple breton colonisé qui ne le sait probablement pas pour la grande majorité. Faire la promotion de cet état de colonisation est donc naturelle. Cependant, un peuple ne reflète pas de couleur politique; il est multiple dans sa pensée. Peut-être que cet état de peuple colonisé doit être enseigné en toute neutralité politique. C’est une question d’efficacité.
D’autre part, j’utilise le terme d’enseignement pour expliquer le terme de colonie car bon nombre de Breton se croit libre; ils ne le sont que si ils se déclarent Français; dans le cas contraire, ils n’ont aucun droit… Cela mérite enseignement!

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