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Le Vison d’Europe en Bretagne
Le Vison d’Europe en Bretagne.
Autrefois fort répandu sur notre continent, le Vison européen (Mustela lutreola) a connu une si forte régression qu’il est aujourd’hui menacé de disparition à court ou moyen terme. Il aurait perdu 85% de son aire de répartition et 90% de ses effectifs.
Présent autrefois en Bretagne, notamment sur la façade atlantique, il a disparu de notre pays au cours des années 80-90 : la dernière observation y aurait été effectuée en 1992. Des programmes de réintroduction ont été diligentés en Nouvelle Aquitaine. À contrario, son cousin américain (Mustela vison) introduit en France dans les premières décennies du XXe siècle, connait une forte expansion démographique. Cette espèce pourrait, au moins en parti, avoir contribué à la régression drastique de notre mustélidé autochtone.
Éléments biométriques
Taille : 35 à 45 cm pour un mâle et 30 à 40 cm pour une femelle
Poids : 500 grammes pour une femelle à 800 grammes pour un mâle
Longévité : cinq ans à l’état sauvage et dix ans en captivité
Maturité sexuelle : un an
Statut de conservation UICN : en danger critique
Portrait et comportements
Aisément confondu avec le Vison américain (Mustela vison) et le Putois européen (Mustela putorius) notre mustélidé, discret et crépusculaire, voire nocturne, présente une houppelande brune avec parfois quelques nuances roussâtres. Au niveau du museau, il arbore une tâche blanche plus ou moins étendue sur la lèvre inférieure et supérieure. Sa silhouette fusiforme est parfaitement adaptée au milieux aquatiques et semi-aquatiques. Le Vison européen est un carnivore généraliste et opportuniste.
On retrouvera donc dans son ordinaire, des micromammifères tels que, campagnols amphibies, rats musqués, musaraignes, mulots … Seront également appréciés, amphibiens, crustacés, mollusques, oiseaux … En Europe occidentale, le rut a lieu en janvier et février. Les jeunes, de deux à cinq, naitront entre avril et juin. Les visonneaux sont prédatés essentiellement chez nous, par le Renard roux et la Buse variable. Le Vison d’Europe peut à l’occasion faire preuve de grande mobilité, se déplaçant d’un site à l’autre, parfois sur près de 70 kilomètres.

Répartition et habitats
Le Vison d’Europe occupait autrefois la majeure partie du continent européen.
Depuis la seconde moitié du XIXe siècle, sa démographie s’est à ce point effondrée, qu’il a disparu de plus de vingt pays. Il réside encore en Russie, en Roumanie, en Estonie. Il est encore présent sur la façade atlantique de la France (7 départements de Nouvelle Aquitaine) et dans la partie septentrionale de la péninsule ibérique. Le Vison européen fréquente essentiellement les abords des lacs et des étangs, les marais et les tourbières, les prairies humides.
Dynamique des populations
Jusqu’au début du XXe siècle, le Vison d’Europe est souvent confondu avec le Putois d’Europe. Il est alors nommé par les trappeurs putois d’eau ou putois de rivière ou encore putois à tête de loutre. On sait pourtant depuis 1839, grâce aux travaux du naturaliste Edmond Sélys de Longchamp (1813-1900), que le Vison européen est un taxon. Il est décrit pour la première fois en Bretagne en 1857, quand une femelle morte est découverte dans les Marais de Goulaine. Le Vison européen est ensuite très régulièrement observé en Loire Atlantique. Sa présence en Ille et Vilaine et dans le Finistère est confirmée de la seconde moitié du XIXe siècle à la première moitié du XXe siècle. Une capture est réalisée à Kemper en 1959. À la même époque, le petit carnivore est observé dans les Côtes d’Armor. Dans le Morbihan, il faut attendre les années 80 pour que sa présence soit attestée. C’est pourtant sur la façade atlantique, qu’il fut sans doute le plus présent.
Les trappeurs bretons témoignent de son rapide déclin au décours des années 50 et 60. Les prises se font rares. Un signalement est effectué en 1971 dans le Morbihan (Marais de Noyalo) et au début des années 80 en Ille et Vilaine et en Loire Atlantique dans les Marais de Brière. Sa présence est également signalée aux environs du Lac de Grand Lieu. Un cadavre est découvert en 1992 à Séverac / Severeg.
Puis, plus aucune observation en Bretagne. Une étude de 2004 estimait sa population française à 250 individus. Entre 2010 et 2015, puis en 2020 et 2025, sa présence est détectée sur les bassins versants de la Charente, de la Gironde et de la Dordogne. Selon les dernières investigations, la population charentaise au cœur des Marais de Rochefort serait la seule survivante en France.
Quelles sont les raisons de sa régression ?
Elles ont multiples !
La première d’entre elles est sans doute les chasses outrancières (piégeage) pour sa fourrure perpétrées au cours des siècles précédents. Le vison européen a subi un sort identique à celui de la loutre et du castor. Assèchement des zone humides, canalisation des cours d’eau, remembrement, urbanisation, pollution des eaux, usage de poisons tels que les rodenticides, croissance de la circulation routière vers le milieu du XXe siècle sont autant de facteurs pouvant en partie expliquer la raréfaction du Vison européen. Il demeure cependant que le Vison américain semble se jouer de ces conditions néfastes. Celui-ci entrerait en compétition avec notre autochtone occupant son biotope et puisant sans vergogne sans ses ressources alimentaires.

Un malaisant cousin d’Amérique
Le Vison d’Amérique (Mustela vison) a été introduit en France dans les années 20. La crise économique de 1929 a entrainé un rapide déclin des grands et des petits élevages. C’est dans ce contexte que de nombreux visons ont été relâchés dans la nature. Après la seconde guerre mondiale, de nouvelles visonnières sont bâties. En Bretagne, une de ces fermes, compte alors plus de 40.000 individus nourris par les sous-produits de la pêche. Le premier individu férale y sera observé en 1964. Au début des années 60, la France ne compte pas moins de cinq cent fermes qui connaitront une apogée à la fin des années 70, et un rapide déclin, à partir des années 80.
De nos jours, Mustela vison est bien établi dans les cinq départements bretons. Son incidence sur la faune autochtone reste difficile à évaluer. Des perturbations et des destructions ont cependant été constatées sur des oiseaux nicheurs, la Sterne de Dougall par exemple. En 2012, il avait été observé sur l’Ile Tomé au large de Perroz Gireg. Une étude menée en 2019 révèle que la population d’oiseaux nicheurs y aurait été divisée par onze !
Des opérations de piégeages sont conduites pour limiter son expansion. Bretagne Vivante a récemment lancé un appel au public pour signaler la présence du mustélidé US en Baie de Morlaix via la plateforme Trégor Gestion Vison.

Quel avenir pour le Vison d’Europe ?
Sans intervention sérieuse le Vison européen pourrait disparaitre dans un proche avenir.
L’espèce bénéficie d’un Plan National d’Action (PNA) pour une période de 10 ans (2021 – 2031). Le DREAL Nouvelle Aquitaine soutient financièrement ce projet en collaboration avec l’OFB qui assure le suivi technique et scientifique. Le Vison d’Europe est une espèce protégée au niveau communautaire (1) national (2) et international (3).
Une opération de réintroduction a été menée en août 2025 dans la vallée de la Charente. Les dix individus relâchés sont nés à Zoodyssée (79) et à la Réserve zoologique de Calviac (24). Ils seront suivis durant une période de six mois à un an.
Par ailleurs, la LPO participe également aux suivis des visons en collaboration avec le Groupe de recherche et d’Étude pour la Gestion de l’Environnement (GREGE). La LPO, dans le cadre du programme LIFE VISON, avait participé entre 2017 et 2023 à un projet financé par l’Union Européenne qui a entrepris la restauration d’habitats naturels et l’aménagement d’ouvrages d’art pour rétablir la continuité écologique des cours d’eau.
- Inscrit comme espèce d’intérêt communautaire prioritaire des annexes II et IV de la Directive Habitats 92/43/EEC.
- Inscrit sur l’arrêté du 23 avril 2007 fixant la liste des mammifères terrestres protégés sur l’ensemble du territoire français et les modalités de protection.
- Inscrit sur la liste des espèces strictement protégées – Annexe II – relative à la conservation de la vie sauvage et des milieux naturels européens.
Vison d’Europe : bibliographie
• Atlas des Mammifères de Bretagne, éditions Locus Solus, ouvrage collectif coordonné par Franck Simonnet, Groupe Mammalogique Breton, parution 4e trimestre 2015, 304 pages
• Loutres et autres mammifères aquatiques de Bretagne, éditions Biotope, les cahiers naturalistes de Bretagne, Lionel Lafontaine, parution 01 mai 2005, 160 pages
Sitographie
Life Vison : https://lifevison.fr/
Tregor Gestion Vison : https://cotedegranitrose-septiles.n2000.fr/actualites/tgv-tregor-gestion-vison
Acronymes
DREAL : Direction Régionale de l’Environnement et du Logement
OFB : Office Français de la Biodiversité
LPO : Ligue pour la Protection des Oiseaux
Iconographie
Image 1 : @ martinmecnarowski / deux visons européens
Image 2 : @jsteinmet / un vison
Image 3 : @ nolwennpons / une espèce difficile à reconnaitre
Image 4 : carte répartition vison Europe / UICN