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Tu connais le mistral et la tramontane, mais pas le gwalarn et le suroît.
Tu connais bien sûr le nom de certains vents qui soufflent à mille kilomètres de la Bretagne et que tu ne vois jamais, parce que certaines météos les citent nommément et régulièrement.
La tramontane, du latin « transmontanus » et à prononcer avec l’accent du soleil.
Le mistral, du provençal « maestral » : oh peuchère qu’on sait son nom à celui-là !
Le vent d’autan et le marin, le levant et le ponant …
C’est marrant, ceux-là, dès qu’ils soufflent, on nous en parle en les appelant par leur petit nom.
Ce sont tous des vents méditerranéens.
Les vents interdits en Bretagne ?
N’existerait-il aucun autre vent soufflant sur d’autres territoires de la carte hexagonale ?
Ce qui expliquerait alors, en effet, que les présentateurs et présentatrices de ces bulletins météo ne nous citent nommément que ceux-là ?
Pourtant régulièrement, ces mêmes présentateurs et présentatrices, toutes et tous formés, à moins que ce ne soit formatés, à l’ENM, nous annoncent des phénomènes venteux ailleurs que sur le pourtour de la « belle bleue » (!). L’ENM est l’organisme officiel de formation météorologique dépendant directement du Ministère français de l’Environnement et basé à Toulouse dans le sud ouest de la France.
La présentatrice météo annonce : « La tramontane et le mistral souffleront en Méditerranée. Tandis qu’en Bretagne le kornog et le mervent atteindront les 100 km/h« .
Mais non on déconne : vous n’entendrez jamais la deuxième phrase.
Pourquoi ?
Et les nôtres en Bretagne, ces vents interdits qui font notre quotidien, qui en parlent dans ces mêmes bulletins météo ?
On nous cache notre Mer Celtique, alors pourquoi pas nos vents ?
En Bretagne, on connaît tous le nom de vents qu’on ne connaît pas mais on ne connaît pas le nom des vents qu’on connaît !
Quand as-tu entendu pour la dernière fois citer les noms de tes vents : Noroît, Gwalarn, Kornog, Mervent, Nordet, Suroît, Suet … ?
Tu sais, celui qui a soufflé toute la nuit et t’a empêché de bien dormir ?
Tu sais, celui qui a cassé un arbre dans le jardin et fait quelques dégâts autour de chez toi ? Le journal, un peu mouillé, que tu as été chercher dans ta boîte aux lettres en fait son principal titre « coup de tabac dans l’ouest« .
Au mieux, tu entendras quelques marins les citer dans nos ports, ou le suroît et le noroît, mots français. Mais des vents portant des noms bretons, certainement pas.
Qu’en dites-vous, Météo Bretagne ?
Donne ton nom à la prochaine tempête
On t’explique au moins que c’est du « vent » et au plus qu’il vient de l’ouest, du nord ouest ou du nord. Tous termes génériques qui peuvent s’appliquer à n’importe quel autre territoire de notre planète. Mais sans jamais donner son identité. Ni en français (Noroît) et donc encore moins en breton (Gwalarn). Tu imagines la présentatrice du bulletin météo sur une grande chaîne de télévision au journal de vingt heures. Qui précise que le mistral soufflera fort dans le couloir rhodanien et que le gwalarn se renforcera la nuit prochaine en Bretagne. Si elle tient à sa place, il vaut mieux qu’elle oublie le gwalarn.
De plus en plus souvent maintenant, tu as le prénom du coup de vent.
C’est l’Institut Météorologique de Berlin qui depuis 1954 donne des prénoms aux dépressions et aux anticyclones. Depuis 2002, le public peut acheter des prénoms sur Adopt a Vortex, qui sont, comme vous pouvez l’imaginer et logiquement, plutôt germaniques. Le prix d’acquisition d’un prénom de tempête se situe entre 200 et 300 euros.
L’habitude est une année, de donner un prénom masculin aux dépressions et un prénom féminin aux anticyclones. Et d’inverser l’année suivante. Étonnamment, on retient surtout les prénoms des dépressions amenant des tempêtes spectaculaires. Pas les prénoms des anticyclones moins démonstratifs.
Comment sont attribués les prénoms des tempêtes ?
Au niveau mondial, ce sont six listes de vingt et un prénoms chacune, en rotation annuelle qui servent de listes de base au choix des prénoms, qui sont anglais, espagnols ou français pour l’Atlantique nord et qui concerne donc la Bretagne, et établies par le Centre National des Ouragans basé à Miami en Floride. Et lorsqu’une tempête est majeure et ravage une zone plus large, c’est alors l’OMM Organisation Météorologique Mondiale qui préside à la nomination. Et c’est elle qui choisira un prénom qui ne sera jamais plus utilisé par la suite.
C’est un peu comme pour les « entrées maritimes« . Les mots utilisés sont différents selon que cette météo officielle nous parle de la Bretagne ou d’autres territoires figurant sur la carte hexagonale.
Régulièrement la Bretagne est balayé par le puissant Noroît ou Gwalarn venant d’un nord-ouest bien frais et pluvieux. Ou le plus doux mais pas moins humide Suroît ou Mervent. Vous retrouverez les autres sur la rose des vents de nos marins comme le Kornog, le Reter …
Et si on se cotisait pour acheter quelques prénoms de prochaines dépressions ?
Jakez, Derc’hen, Adraboran ou Fañch pour les masculins.
Derwella, Bleuenn ou Berc’hed pour les féminins ?
Oui mais c’est vrai que certains de nos prénoms, aussi, sont interdits.
Qui d’autre que NHU pour vous le dire ?
#CroirePlusEnNous
#FaireNousMemes
#DeciderNousMemes
12 commentaires
Avel barz ar viz ,glav ken kliz !!
Bonjour
Petite question suite à cet article. On parle des « seizh avel », mais sur la rose des vents (roud-avel) ils sont 8 (eizh) : quel est celui qui manque ?
Désolé mais n’en savons rien.
Merci de nous lire et n’hésitez pas à rejoindre nos réseaux sociaux
C’est sans doute un nombre symbolique.
durc’haet d’ar seizh avel (exposé à tous les vents)
ober e seizh gwellañ (faire tout son possible)
On dit aussi :
dindan ar seizh amzer (par tous les temps)
embann d’ar seizh avel (crier sous tous les toits)
ar seizh dienez (la misère noire)
lavarout ar seizh seurt ruz eus unan bennak (raconter pis que pendre à propos de quelqu’un)
teuler ar seizh anv divalav war unan bennak (crier sur quelqu’un)
Oui, ce qui est dit est exact.. Mais il y a bien d’autres vents sur la méditerranée dont on ne parle pas, le Cers, le Grec, par exemple.. On réduit les vents sur le golfe de Lion à un couple antagoniste Mistral/Marin, ce qui est très simplificateur..
Il faut convenir que le Mistral est quand même très spécifique, très fort, très prévisible.. Déjà Jules César parlait de ce vent « magistral », qui marque la vallée du Rhône. Beaucoup de gens ne voudraient pas habiter an Avignon ou Arles à cause de lui… ce qui ne doit pas être le cas de beaucoup de vents..
Jean Pierre, toutes ces précisions sur des vents méditerranéens qui soufflent à plus de mille kilomètres de la Bretagne sont intéressantes. Mais notre question est de savoir pourquoi les services météo français, et même / surtout les bretons, n’évoquent jamais les noms des vents qui soufflent dans nos jardins et sur nos plages en Bretagne. Serait-ce parce que ces noms sont en breton ?
La non-évocation des noms de vents en Bretagne me semble à mettre en perspective avec d’autres : l’omission systématique des chansons actuelles en langue bretonne sur les chaînes radio-tv et médias centralisés et dits »nationaux », la dissimulation des oeuvres littéraires dans cette langue, l’amnésie totale sur les liens entre la langue bretonne et les autres langues celtiques, la part scandaleusement ridicule accordée à la langue bretonne et autres langues dans la presse »locale », la hiérarchisation défavorable et quotidienne entre les langues dépendantes de l’administration, etc…
Il n’y a qu’une langue sur le »territoire ».
Tant qu’Internet est utilisable, que nos éditeurs et nos radios locales tiennent le coup, il reste un petit chemin creux qui conduit aux vents rafraîchissants de la mer comme »avel gwalarn » …
Avel est masculin mais entraîne des mutations comme un féminin !
an avel gornôg, an avel vervent, an avel walarn, an avel viz …
A Nantes, le long de la Loire, on a « le vent d’aval » d’ouest en est. Il y a aussi « le vent d’amont » qui s’apparente à une bise, donc venant du nord-est.
Vous évoquez le sens étymologique de la tramontane et du mistral. Et aucune explication pour les autres !
GWALARN du français (et gallo) galerne (sans doute d’origine gauloise, comme le français jaillir. En gallois et en vieil irlandais, gal signifie fureur.)
MERVENT « vent de mer » (le latin ventus a donné le breton gwent)
BIZ du français bise (peut-être du latin bis, dans le sens de divergent)
KORNOG korn (coin, corne, cor) -où (pluriel) -eg (ensemble, abondance : -aie)
RETER rag (devant) -der
GEVRED kevred (concert) de kev- (co- con-) red (cours, courant)
NORZH et SU de l’anglais par le français
Noroît, suroît, nordet, suet sont perçus comme une altération normande du « bon français » nord-ouest, sud-ouest, nord-est, sud-est, pourtant lui-même « altération » de l’anglais north-west, south-west, north-east, south-east. L’expression vent de galerne pourrait être utilisée, mais ce mot évoque un épisode de la chouannerie (la virée de galerne).
Comme le verbe l’indique, on s’orientait vers l’orient. L’est, c’était donc le devant, d’où reter en breton, rhacter en gallois.
Comment expliquer kornôg ? Y aurait-il un lien avec les deux Cornouaille (Kernev et Kernev-Veur) qui pointent vers l’ouest ?