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Et si la Bretagne avait été annexée par l’Angleterre et non par la France ?
Une Uchronie est un récit qui imagine un déroulement historique alternatif à partir d’un point de divergence réel.
La Bretagne a toujours oscillé entre deux autres puissances. Depuis le Moyen Âge, son destin s’est écrit entre la France et l’Angleterre. Tantôt alliée de l’une, tantôt protégée de l’autre, elle a longtemps gardé son indépendance grâce à un subtil jeu diplomatique.
Mais si l’Histoire avait pris un autre tournant ?
Et si la Bretagne avait été intégrée à l’Angleterre ?
Explorons cette uchronie : que serait devenue une Bretagne anglaise ?
Une Bretagne anglaise : rêve ou cauchemar ?
Commençons par planter le décor. À la fin du XVe siècle, la Bretagne subit une pression croissante de la France. Après la mort du Duc de Bretagne François II, sa fille Anne devient Duchesse, mais doit faire face à une guerre d’annexion.
En 1532, après une invasion militaire, la France finit par annexer le duché.
Mais que se serait-il passé si, au lieu de céder à la France, Anne de Bretagne avait épousé un prince anglais ?
Ou si l’Angleterre avait gagné la guerre de Bretagne grâce à une intervention militaire décisive ?
La Bretagne serait alors passée sous contrôle anglais, bien avant que l’Écosse et l’Irlande ne soient intégrées par l’Angleterre.
Un statut proche de l’Écosse ou du Pays de Galles ?
Regardons ce qu’il en est aujourd’hui des autres nations celtiques intégrées au Royaume-Uni.
- L’Écosse possède son propre Parlement, un gouvernement autonome, une politique éducative et de santé distincte, et une forte conscience nationale.
- Le Pays de Galles / Cymru a lui aussi son Parlement, bien qu’avec des compétences plus limitées.
- Le nord de l’Irlande bénéficie d’un système politique complexe issu d’accords de paix spécifiques.
Une Bretagne anglaise aurait probablement suivi un schéma similaire, avec une dévolution progressive des pouvoirs au XXe siècle. On peut imaginer une Assemblée de Bretagne, siégeant à Rennes / Roazhon ou à Nantes / Naoned, dotée de compétences sur la langue, la culture, l’environnement, la santé, les transports et d’autres aspects économiques.
Et si la Bretagne avait été annexée par l’Angleterre, la langue bretonne serait-elle plus parlée aujourd’hui ?
C’est l’un des points les plus sensibles. Le gallois a survécu et est aujourd’hui parlé par près de 20 % de la population du Pays de Galles. Il bénéficie d’un enseignement obligatoire généralisé, de médias publics, et d’une signalétique bilingue obligatoire.
Dans une Bretagne anglaise, le breton aurait-il eu le même sort ?
Oui sans doute. Londres, malgré sa politique de domination, a laissé survivre les langues celtiques plus que Paris. La langue bretonne aurait pu être protégée, soutenue et enseignée, notamment grâce à une réelle autonomie régionale.
On aurait vu fleurir des chaînes télé en breton, des écoles publiques immersives, et un usage officiel du breton dans les institutions locales.
Une société plus décentralisée
Le Royaume-Uni, malgré sa centralisation historique, est aujourd’hui un État asymétrique. Les différentes nations y disposent de statuts différenciés et d’identités affirmées. Une Bretagne anglaise aurait donc conservé son drapeau, son hymne… et surtout son sentiment d’appartenance.
Mieux encore, elle aurait pu obtenir une reconnaissance symbolique au même titre que les autres nations britanniques.
Son Histoire aurait été enseignée dans les écoles. Ses héros, ses traditions, sa géographie spécifique auraient été valorisés.
La Bretagne participerait aux Tournoi des 7 Nations de rugby …
Un développement économique différent ?
Impossible d’ignorer l’impact économique.
Une Bretagne sous domination anglaise aurait connu une trajectoire industrielle et agricole différente. Probablement plus tournée vers la mer et les échanges atlantiques. Moins encadrée par la centralisation jacobine française, elle aurait sûrement mieux conservé ses ports, ses chantiers navals, sa flotte de pêche, et ses circuits agricoles courts.
À l’image de l’Écosse ou du Pays de Galles, elle aurait pu bénéficier de fonds de développement spécifiques. Le Royaume-Uni, notamment via les fonds européens avant le Brexit, a soutenu de nombreuses zones rurales et côtières.
Et la capitale : Rennes ou Nantes ? Roazhon pe Naoned ?
Un autre point crucial. Dans une Bretagne anglaise, la partition entre Bretagne occidentale et orientale n’aurait peut-être jamais eu lieu. Nantes / Naoned serait restée capitale de la Bretagne, et l’intégration de la Loire-Atlantique aurait été naturelle et durable.
Les autorités anglaises n’auraient pas vu d’intérêt à redécouper artificiellement le pays. Le poids économique de Nantes / Naoned aurait renforcé la cohérence bretonne et permis à l’ensemble du pays de s’organiser autour d’un pôle métropolitain fort.
Une résistance bretonne à Londres ?
Mais tout n’aurait pas été rose. Le centralisme anglais, notamment sous les Tudor ou les Hanovriens, aurait pu heurter les élites bretonnes. Des révoltes auraient éclaté, comme celles des Écossais ou des Irlandais. Peut-être même une insurrection majeure au XIXe siècle, à l’image de l’indépendantisme irlandais.
Aujourd’hui, un mouvement Yes Breizh fort existerait probablement, à côté des Yes Scotland écossais et Yes Cymru gallois.
La question de l’indépendance aurait été débattue, testée par référendum, peut-être même obtenue partiellement.
La Bretagne anglaise face au Brexit
Dernier point, et non des moindres. Une Bretagne intégrée à l’Angleterre aurait quitté l’Union européenne en 2020, contre son gré. Comme l’Écosse, elle aurait voté majoritairement pour rester. Ce choc politique aurait relancé la question de son avenir dans le Royaume-Uni.
En parallèle, les comparaisons avec la Bretagne française auraient été fréquentes. Et inversement, depuis la Bretagne réelle, on aurait regardé cette « Bretagne anglaise » avec curiosité, voire admiration : plus libre, plus respectée, plus développée localement.
Et si la Bretagne avait été annexée par l’Angleterre : une autre Histoire, mais pas irréaliste
Imaginer une Bretagne anglaise n’est pas une simple fantaisie. C’est une manière d’interroger notre propre Histoire, nos choix, nos pertes. Car la réalité est là : intégrée à la France, la Bretagne a été dépossédée de son autonomie, de sa langue, de son pouvoir.
Un autre chemin était possible.
Il l’est peut-être encore.
Car si les Écossais et les Gallois peuvent négocier leur avenir, pourquoi pas les Bretons ?
La Bretagne anglaise aurait probablement obtenu un statut d’autonomie avancé alors qu’aujourd’hui elle est totalement sous tutelle de Paris. Elle aurait pu défendre sa langue, ses ports, sa culture et ses intérêts vitaux. Mais elle aurait aussi affronté le centralisme londonien, l’éloignement du pouvoir, et les aléas d’une autre domination.
Ce scénario uchronique montre bien à quel point l’actuelle situation bretonne est le fruit d’un effacement organisé.
Et que l’avenir, lui, reste à écrire.
Alors, et vous, auriez-vous préféré aujourd’hui être Britannique plutôt qu’hexagonal ?
Et si la Bretagne avait été annexée par l’Angleterre : illustration header NHU Bretagne
5 commentaires
Il n’était pas question que l’Angleterre annexe la Bretagne, d’ailleurs les Bretons ne l’auraient jamais acceptés. Elle soutenait son indépendance d’abord par ce celle-ci était dans ses intérêts. Le problème c’est la guerre entre les Lancastre et les York qui a eu pour conséquence l’abandon du soutien à la Bretagne par les Tudor vainqueurs de cette guerre des deux roses. Le soutien de Landais à Edouard de York a été une erreur, car réfugié en Bretagne Henri Tudor s’est enfui et a rallié le roi de France. Cependant il y a eu une intervention héroique des archers de l’ile de Wight sous le commandement de Richard de Woodville ami de François II, tous morts, sauf un survivant qui a son retour sur l’ile a traumatisé la population par le récit du massacre de ses compatriotes. L’Angleterre d’aujourd’hui n’est plus la même que celle des siècles précédents qui a opprimée les peuples celtes de l’ile, c’est sans doute le pays d’Europe qui respecte le mieux les cultures et langues de ses voisins celtes, dont elle partage elle même une part de cet héritage, tout comme celui des britto romains dont nous sommes les héritiers. La Bretagne devrait rien que part intérêt stratégique et sa proximité géographique avoir des relations privilégiés avec ce pays, c’est une des conditions capitales de son émancipation.
Ici on est pas dans l’Histoire. C’est juste une uchronie.
Merci du commentaire
En effet, le Royaume Uni d’aujourd’hui traite beaucoup mieux ‘ses’ nations celtiques que la France traite la Bretagne. Et en effet encore, développer nos relations avec les éléments constitutifs de l’UK est clef pour le futur.
On pourrait t aussi penser qu’ une Bretagne anglaise aurait subi les mêmes vicissitudes que l’Irlande ce qui aurait pu amener les Bretons à la révolte et à la création d’une république indépendante ? Par contre concernant la langue, la situation du gaélique irlandais n’est guère enviable…
Peut-être en effet car il y aurait eu le conflit ‘protestantisme-anglicanisme vs catholicisme’, ceci dit à la fin les irlandais s’en sont quand même mieux sortis que nous même avant 1916. Et même si compâraison n’est pas raison (comme on dit), nous avons eu quand même une guerre sanglante entre catholicisme et anti catholicisme au moment de la révolution française).
Par contre, si on continue à imaginer, nous aurions pu avoir le statut de l’Ecosse ou de Galles (même celui actuel de l’irlande du Nord) et par rapport à ce que nous avons avec la France, cela aurait fantastique.