Bretagne est exécutée par la Révolution et la République

La Bretagne est exécutée par la Révolution et la République 

de NHU Bretagne

La Bretagne est exécutée par la Révolution et la République : la Bretagne sur l’échafaud

La Bretagne est exécutée par la Révolution et la République : le vingt deuxième épisode de notre Histoire de Bretagne écrite par des Bretons libres.
La Révolution française se présente comme un souffle de liberté. En Bretagne, elle sera un ouragan de mort. Sous les grands mots d’égalité et de fraternité, c’est une autre réalité qui s’impose : la destruction programmée d’un peuple et de son identité.

En quelques années, la Bretagne est rayée des cartes. Ses institutions sont supprimées d’un trait de plume, son économie brisée, ses ports ruinés, ses langues interdites.

Après les supplices de la monarchie viennent les fusils révolutionnaires et les garrots administratifs. Un pays entier bascule dans l’agonie. Ce fut d’abord la fin de l’État breton. Puis la démence meurtrière des armées républicaines. Ensuite, l’asphyxie économique. Enfin, la guerre psychique : celle menée contre la mémoire et la dignité des Bretons. Et pourtant, sous les cendres, la flamme n’a pas disparu.

La Révolution proclame les droits de l’homme.
Puis la république massacre plus de 200 000 Vendéens et Bretons. Aux yeux des Français, Vendéens et Bretons ne sont pas humains.

La fin de l’État breton

Agonie monarchique : un pays déjà affaibli

Sous la monarchie absolue, la Bretagne n’est plus souveraine. Ses États, jadis puissants, sont étouffés par Versailles. Les impôts augmentent, les décisions s’éloignent, les libertés se réduisent. La vieille alliance du prétendu « traité » de 1532 n’est plus qu’un souvenir vidé de son sens.

L’unité du pays tient encore par la force des traditions, par la foi, et par l’enracinement des Bretons dans leur terre. Mais la corde se tend. Les dernières institutions locales s’épuisent. Le peuple sent venir la tempête.

Exécution révolutionnaire : la nuit du 4 août 1789

La Révolution promet la liberté. Elle commence par un crime politique : la disparition juridique de la Bretagne. La nuit du 4 août 1789 abolit tout ce qui restait de son autonomie. Les privilèges bretons sont supprimés sans discussion.

En 1790, Paris trace cinq départements sur la carte. D’un geste froid, la Bretagne est démembrée. Fin d’un État, fin d’une cohérence, fin d’une identité politique vieille de treize siècles. Les Bretons comprennent vite le message. Le pouvoir central n’a pas libéré les peuples : il les a annexés sous une autre forme.

La République universelle commence par une exécution : cinq départements suspendus à la potence parisienne.
En 1941, la France en arrachera un des cinq : la Loire Atlantique.

Le bain de sang : massacres et répression

Massacrée : la Bretagne dans les guerres de l’ouest

La Révolution tourne au bain de sang. À Nantes / Naoned, à Savenay / Savenneg, à Luc-sur-Boulogne, vingt mille personnes sont exterminés. Femmes, enfants, vieillards – tous suspects d’avoir cru en Dieu ou d’aimer leur pays.

Les chiffres donnent le vertige : jusqu’à deux cent mille morts en Vendée. Des villages entiers brûlés. Et des prêtres noyés dans la Loire. Des civils fusillés par milliers. Les colonnes infernales de Turreau sèment la mort dans l’ouest. Ce sont les premières “opérations de pacification” d’une République qui se dit humaniste. Mais ici, c’est un génocide. Un crime contre l’humanité avant l’heure.

Les mots de liberté ont pris l’odeur de la poudre. Les idéaux des Lumières se sont changés en ténèbres. Et la Bretagne pleure ses enfants.

Traquée : la résistance chouanne

Ceux qui refusent la Terreur prennent les armes. Les Chouans naissent dans les bois, les marais, les landes. Ce sont des paysans, des artisans, des prêtres, des officiers fidèles à leur foi et à leur liberté. À leur tête, un homme : Georges Cadoudal. Symbole de courage, d’honneur et de fidélité.

De Quiberon / Kiberen à Auray /An Alre, de Vannes / Gwened à Redon, la Bretagne résiste. Mais la République, implacable, traque, brûle, fusille. Les villages deviennent des champs de bataille. La peur s’installe. Les dénonciations se multiplient. Des milliers de Bretons disparaissent sans sépulture.

La République triomphe. Mais sur des ruines. Sur des cadavres. Sur la peur. Et dans le silence des charniers, une nation se meurt.

L’asphyxie : la mort économique et maritime

Le sang séché sur les terres de l’ouest ne suffit pas. Après les fusils vient la famine. La République nouvelle asphyxie la Bretagne par la ruine. L’Empire donnera ensuite le coup de grâce.

Les grands ports bretons, jadis ouverts sur le monde, se ferment un à un. Lorient / An Oriant, Brest, Saint Malo / Sant Maloù, Nantes / Naoned: tous subissent le blocus continental voulu par Napoléon. L’économie maritime s’effondre. Les chantiers ferment, les marins désertent ou s’exilent. Le littoral, autrefois vivant, se vide. Les quais tombent en silence.

Les activités industrielles ne valent guère mieux. L’industrie de la toile, autrefois prospère dans le Léon et le Trégor, est transférée vers le nord de la France. Les mines, les forges et les tissages bretons meurent faute d’investissements. Les savoir-faire s’éteignent dans l’indifférence générale.

Les campagnes, elles, se couvrent de misère. La population survit de peu. Mendicité, famines, épidémies : les mots de la souffrance remplacent ceux du progrès. Les jeunes fuient. Beaucoup montent vers Paris ou embarquent pour l’Amérique. Entre 1800 et 2000, plus d’un million et demi de Bretons quitteront leur pays. Une véritable saignée.

Mais un point positif mérite d’être noté : les dessertes ferroviaires depuis Paris commencent à se développer dans la deuxième moitié du XIXᵉ siècle. Rennes / Roazhon et Nantes / Naoned sont les premières à être reliées. En vingt ans, les principaux prolongements vers l’ouest seront livrés. Pour les voyageurs comme pour le fret, ce sera un investissement majeur, un atout nouveau pour l’économie bretonne.

Dans les ports abandonnés, les voiles pourrissent au vent. Dans les terres, les maisons se vident. Et au cœur de la Bretagne, une tristesse s’installe : celle d’un peuple privé d’avenir.

Le massacre psychique : l’identité sous interdit

Après la mort physique vient la mort mentale. La République s’attaque désormais aux esprits. C’est une guerre plus sournoise, mais tout aussi efficace : celle menée contre la langue, la culture, la mémoire.

Le nouveau pouvoir invente une morale. Il se dit universel, mais impose son modèle unique. 
Liberté ? Tu as le droit de faire ce qui me plaît. 
Égalité ? Tu dois me ressembler en tout. 
Fraternité ? Je t’apporte mon progrès, puisque tu es incapable d’en concevoir toi-même. 
Ce catéchisme tricolore écrase les différences, les nuances, les racines.

La langue bretonne devient la première victime. Dans les écoles, les enfants apprennent la honte. Parler breton, c’est être arriéré. “Il est interdit de cracher par terre et de parler breton.” Ce slogan infâme restera gravé dans les murs et dans les mémoires. On apprend aux petits Bretons à renier leurs parents, à mépriser leurs origines.

La linguiste Rozenn Milin le rappellera plus tard dans son livre La honte et le châtiment. Elle décrit la persécution méthodique de la langue, la honte transmise de génération en génération. Ce fut un massacre psychique, lent et profond, dont les blessures se lisent encore aujourd’hui.

Dans les villes, on moque l’accent breton. Dans les salons parisiens, on s’amuse de ces paysans “pittoresques”. L’élite française découvre la Bretagne comme un exotisme. Le Barzaz Breizh de La Villemarqué devient, à Paris, une curiosité romantique. Pendant ce temps, dans les campagnes, la langue meurt.

Les Bretons sont désormais ringardisés, folklorisés, réduits à une image sans substance. On leur a retiré le droit de se raconter. Et quand un peuple ne peut plus parler sa langue, il ne peut plus penser librement.

Ainsi, après les fusils et les blocus, la République aura inventé un autre type de massacre : celui de la conscience.

Chair à canon : guerres et abandons

Quand la République n’a plus personne à exécuter chez elle, elle envoie les Bretons mourir ailleurs. De génération en génération, la Bretagne devient un vivier de soldats, une réserve humaine pour les guerres de la France.

Tout commence avec le camp de Conlie, en 1871.

Des milliers de jeunes Bretons y sont rassemblés pour défendre la patrie contre les Prussiens. Mais on les laisse mal vêtus, sans armes, sans vivres, sans soins, voire sans munitions pour des fusils archaïques. Plus de six mille d’entre eux mourront dans ce conflit, en première ligne face aux Prussiens. Le mot trahison n’est pas trop fort. Ce fut une forfaiture d’État.
Seul Jean Moulin, plus tard, aura le courage d’en témoigner publiquement. Le silence officiel, lui, ne sera jamais rompu.

Vient ensuite la Grande Guerre.

Entre 1914 et 1918, la Bretagne verse un sang démesuré. Plus de cent quarante mille jeunes Bretons tombent dans les tranchées. Leurs noms couvrent les monuments de tous les villages. Proportionnellement, la Bretagne, avec l’Auvergne, a perdu plus d’hommes que n’importe quelle autre région de l’Hexagone.
Certains, comme François Laurent, furent fusillés pour l’exemple. Leur seul tort : être nés bretons, parler une autre langue, ne pas comprendre les ordres hurlés en français.

Les décennies passent, les guerres se succèdent. 1939/45, Indochine, Algérie : à nouveau, la Bretagne paie le prix fort. Ses ports sont bombardés, ses villes rasées. Saint Malo / Sant Maloù, Brest, Lorient / An Oriant, Saint Nazaire / Sant Nazer deviennent des cimetières de pierre et de feu.
Puis vient la stigmatisation. Après la Libération, la France se lave les mains de sa collaboration de masse, mais pointe du doigt la Bretagne.
Quatre-vingts collaborateurs bretons, c’est “trop”. Quatre-vingts pour cent de collaborateurs français, c’est “la complexité de l’Histoire”.
Le deux poids deux mesures dans toute sa splendeur.

Une nouvelle saignée commence après-guerre. Les campagnes se vident. Les jeunes repartent vers Paris, Rennes / Roazhon, Nantes / Naoned, ou plus loin encore. Entre 1800 et 2000, selon le Télégramme, un million six cent mille Bretons auront quitté leur terre. Des familles entières déracinées, happées par une modernité qui ne leur laisse plus de place.
La Bretagne devient un pays fatigué, amputé, vidé de ses forces vives. Mais dans le silence et la douleur, quelque chose continue de battre. Une fierté têtue, un souffle ancien.

Résistance culturelle et renaissances

Quand tout semble perdu, la mémoire bretonne trouve refuge dans l’art, la littérature, et la foi. C’est dans la culture que le pays blessé va panser ses plaies.

D’abord, vient le refuge dans la mémoire.

Au XIXe siècle, des hommes comme Hersart de La Villemarqué, Anatole Le Braz ou François-Marie Luzel collectent les chants, les légendes, les contes. Le Barzaz Breizh devient le livre du peuple survivant. Ce n’est pas un simple recueil : c’est une révolte poétique. Une manière de dire “nous sommes encore là”.

Puis surgit le regard émerveillé venu d’ailleurs.

Les artistes étrangers, fascinés par la Bretagne, y voient une terre pure, préservée, mystique. L’école de Pont-Aven réunit Paul Gauguin, Émile Bernard, Sérusier, et tant d’autres. Ils peignent les villages, les pardons, les visages. Ils révèlent au monde une Bretagne intemporelle, à la fois blessée et sublime.

Le réveil ne sera pas que culturel. Il sera aussi politique. Naît alors l’Emsav, le mouvement breton. Des organisations comme l’URB, le PNB ou Breiz Atao redonnent voix à un peuple qui refuse l’effacement. Des penseurs comme Morvan Marchal portent à nouveau l’idée d’une Bretagne consciente d’elle-même, maîtresse de son destin.

Autour d’eux, l’énergie créatrice se rallume.

Le mouvement Seiz Breur, fondé par Jeanne Malivel et René-Yves Creston, incarne cette renaissance artistique. Mobilier, art sacré, graphisme : tout est repensé, modernisé, bretonnisé. Loin du folklore, le Seiz Breur veut une Bretagne moderne, digne et inventive.

Ces renaissances culturelles sont les réponses du pays à deux siècles d’humiliation. Elles disent : “Vous pouvez nous ruiner, nous bombarder, nous interdire de parler, mais vous ne pourrez pas vous baillonner.”

La Bretagne sort de son cauchemar, lentement. Elle reste meurtrie et saignée par les siècles de domination. Mais elle vit. Elle pense. Elle crée. Et à chaque génération, des voix se lèvent pour dire ce que les armes et les lois avaient voulu effacer : la Bretagne n’est pas morte.

Une nation brisée, mais pas soumise

Fusillée par la Révolution, démembrée par l’administration, saignée par les guerres, humiliée par la République… 
La Bretagne a tout subi. Ses ports détruits, sa langue pourchassée, sa mémoire effacée.
Et pourtant, elle a tenu.

Deux siècles de silence forcé n’ont pas suffi à la réduire. Derrière les rideaux des fermes, dans les veillées et dans les chants, le peuple breton a gardé sa flamme.
Une flamme fragile, mais indestructible. Celle de l’appartenance. Celle du refus d’oublier.

L’Histoire de la Bretagne, à ce moment-là, est celle d’une résistance invisible. Une résistance du cœur, du verbe et de la mémoire. Pendant que Paris croyait l’avoir effacée, la Bretagne apprenait à renaître.

De ses ruines sortiront les poètes, les militants, les artistes, les rêveurs. Ceux qui feront du XXe et du XXIᵉ siècles le temps du réveil breton. Un réveil lent, difficile, mais inévitable.

Car un peuple qu’on tente d’anéantir finit toujours par se souvenir.
Et ce souvenir, en Bretagne, est une force.


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1 commentaire

Jany 26 octobre 2025 - 10h33

Concernant la période révolutionnaire et la répression de la chouannerie, il faut préciser qu’elle ne concernait qu’une partie de la Bretagne, principalement le pays nantais, le Vannetais et le Léon. Par contre, les zones antérieurement concernées par la révolte des Bonnets rouges (de Douarnenez à St Brieuc grosso modo) n’ont pas versé dans la chouannerie et ont soutenu la République. N’oublions pas que c’est le Club Breton qui, à Paris, est çà l’origine de la suppression des privilèges le 4 août 1789.

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