La Saint Ronan est le 1er Juin, également Journée mondiale du lait et Fête des enfants au Kazakhstan…
Pour aborder la vie de saint-Ronan, le document essentiel est la « Vie de S. Ronan », contenue dans le manuscrit latin 5275 de la Bibliothèque nationale et publiée dans le « Catalogus codicum hagiographorum latinorum Bibliotheca Nationalis Parisiensis ».
L’auteur de cette Vie est un clerc lettré de Cornouaille, qui écrit entre le Xème et le XIIIème siècles. Il est aisé de constater que quelques siècles séparent le biographe de Saint Ronan qui nait et vit au VIè siècle. Ceci pose l’importance de la tradition orale et des traditions populaires qui transmettent mythes, légendes et savoirs ancestraux.
Ronan ou Renan (Reun en dialecte cornouaillais) naquit en Irlande dans la deuxième moitié du Vème siècle, de parents païens convertis au christianisme suite aux prédications de Saint-Patrick.
Ronan était un évêque monastique. Or, nous savons qu’en Irlande, au Vème siècle, les monastères d’une certaine importance étaient dirigés par des moines évêques. Les premiers moines irlandais se retiraient facilement « au désert » pour y vivre loin des hommes et y vaquer plus facilement à la vie contemplative. C’est ainsi que Saint Ronan se décida à quitter l’Irlande pour partir dans une auge de pierre vers Armorique, au début du VIè siècle au cours de l’exode déclenché par l’occupation romaine…
Saint Ronan, d’Irlande en Armorique.
Dans le « Barzaz-Breiz » Hersart de la Villemarqué traduit ainsi le début du sône intitulé Buhez Sant Ronan (légende de saint Ronan) : « Le bienheureux seigneur Ronan reçut le jour de chefs illustres dans l’ile Hibernie, au pays des Saxons, au-delà de la mer bleue. Un jour qu’il était en prières, il vit une clarté et un bel ange vêtu de blanc, qui lui parla ainsi : – « Ronan, Ronan, quitte ce lieu : Dieu t’ordonne, pour sauver ton âme, d’aller habiter dans la terre de Cornouaille.
Après un séjour sur l’île de Molène / Molenez, Saint Ronan débarque à l’Aber-Iltud et poursuit à pied jusqu’à Pont-Reun, au fond de l’estuaire. Là, il s’enfonce à travers bois et broussailles, suit la rivière jusqu’au moulin, aujourd’hui appelé « Le Chaneu ». C’est là, raconte la légende, que, tourné vers la pénitence, le saint creusa une pierre pour en faire son lit et y resta quelque temps pour se reposer et prier.
Son passage dans ce pays est marqué par des Loc.
« Nous avons d’abord Lokournan-vian (le petit Saint Renan), sur la route de Saint-Renan à Lanildut, où l’on montre encore sur les rochers au bord de l’eau, le lit de Saint Ronan, puis nous avons Saint-Renan (en breton Lokournan, Loc-Ronan) antique cité ducale et royale qui s’est formée autour de la cellule de son Saint Patron » nous raconte l’Abbé Calvez, dans « Les Pères de la Patrie au Bro-Leon », publié en 1922.
L’arrivée de l’ermite fut vite connue et attira de nombreux croyants.
Sa paix troublée par tant d’agitation, un ange lui apparut et lui ordonna pour sauver son âme, de pénétrer plus avant dans « le désert » et d’aller habiter en Cornouaille. Selon l’ « Histoire de la maison de Néve » par Jean Baron de Névet, en 1644 « Ronan vint se fixer dans la forêt de Nemet, aujourd’hui Névet qui était alors une épaisse forêt de haute futaie, qui fut plus tard éclaircie en vue de la construction de maisons, de villages et même d’églises ». Ronan s’installa en ermite non loin du bourg actuel de Locronan / Lokorn, qui a porté le nom de Saint-René-du-Bois (francisation de Saint-Ronan, imposée au XVIIè siècle par les autorités ecclésiastiques) …
L’hagiographie raconte qu’un jour, au bois de Névet, près de Locronan / Lokorn, Saint-Ronan vit surgir un loup tenant dans sa gueule un mouton, suivit par un homme en pleurs. Ronan le prit en pitié et pria Dieu de sauver le mouton. Aussitôt le loup lâcha le mouton qui se retrouva aux pieds de Ronan et du paysan. Ensuite, ce dernier alla souvent voir Ronan pour qu’il l’enseigne sur Dieu. Mais, devant la conversion du paysan, sa femme Keben injuria Ronan et l’accusa d’avoir ensorcelé sa famille. Elle lui demanda de ne plus les voir sans quoi elle le châtierait.
Puis elle ourdit un plan : elle alla voir le Roi Gradlon.
La Keben et le Roi Gradlon
Elle accusa Ronan d’avoir tué sa fille et de se transformer en loup. Le Roi Gradlon ordonna alors d’enfermer Ronan à Quimper / Kemper. Puis on l’attacha à un arbre et on lâcha sur lui deux chiens sauvages et affamés. Sans s’émouvoir, Ronan fit un signe de croix sur son cœur. Aussitôt les chiens s’enfuirent…
Voyant ce miracle, le Roi Gradlon demanda à Ronan ce qu’il voulait étant donné que visiblement Dieu l’accompagnait. Il demanda la grâce pour Keben, sa fille n’était pas morte mais elle l’avait enfermée dans un coffre. On alla voir le coffre et on y trouva le cadavre de l’enfant qui avait fini par succomber. Ronan la ressuscita. Le roi et ses gardes se mirent à genoux et demandèrent pardon à Ronan.
Pour autant, Keben persista à harceler et importuner Ronan, si bien qu’il préféra quitter son Oratoire de Nevet pour se retirer à Hilion dans les Côtes-du-Nord entre Lambal et Saint-Brieuc / Sant Brieg.
Il n’y a aucune raison sérieuse de contester l’existence de Keben / Keban. Le souvenir de cette femme présentée comme une méchante sorcière, existe toujours dans la toponymie bretonne : Kroaz-Keban, Bez-Keban, le village de Kergeban en Kemeneven …
Mort de Sain Ronan
C’est à Hilion que Ronan mourut, au lieu-dit Saint-Ronan francisé en Saint-René car, note Monseigneur Louis Duchesne (1843-1922, historien de l’Église, membre actif de sociétés savantes bretonnes dont l’Association Bretonne, et directeur de l’École française de Rome) : « Il vint un temps, où les pauvres vieux Saints Bretons furent considérés comme étrangers dans leur propre pays : on les évinça des vocables d’église pour mettre à leur place des patrons plus connus des clercs français ».
Il y a, non loin de Merdrignac / Merdigneg un Loc-Renan où il semblerait que Saint Ronan ait passé quelque temps avant de se rendre à Hilion.
Pour savoir où l’enterrer, l’on mit son cercueil sur une charrette tirée par deux bœufs, et on les laissa aller.
Sur le chemin la charrette rencontra Keben, qui lavait des vêtements, elle en profita pour se moquer du saint. Alors la terre s’ouvrit et aspira Keben dans les flammes et la fumée dans un lieu désormais dénommé « la tombe de Keben ». Peu après les bœufs arrivèrent à un endroit et ne voulurent plus en bouger, c’est là que Ronan fut enterré…
Son culte étant très développé en Bretagne, il a laissé son nom à un certain nombre de lieu : Locronan / Lokorn (Finistère), Saint-Renan / Lokournan au nord de Brest (Finistère) et Laurenan / Lanreunan (Côtes-d’Armor).
Douze Ronan en Irlande sont honorés comme saints, et celui d’entre eux qui est vénéré en Armorique a vu son nom se déformer en Renan, en Cronan, en Regnan, et en breton parfois Reun. Des prélats ennemis de l’identité bretonne, et avec eux trop de Bretons complexés, ont dans le passé remplacé souvent Ronan par René…
La bataille de la francisation imposée des noms de lieux en breton est ancienne…
Saint Ronan- Sources
- Buez ar zent great an aotrou marigo ha madec, Brest, 1927
- O.L.Aubert :Légendes traditionnelles de la Bretagne, 1928
- Albert Le Grand : Les Vies des Saints de la Bretagne Armorique, cinquième édition, 1901
- Le Télégramme : Saint Ronan, entre Histoire et Légende, Janvier 2016
- Brigitte Waché : Monseigneur Louis Duchesne, publications de l’École Française de Rome, 1992
- Notice Saint Ronan au Musée du Ponant à Saint Renan / Lokournan
- Site de la comme de Saint Renan : Histoire et naissance de la cité
- Martyrologe romain de l’église catholique, Diocèse de Kemper et Leon : Vie de Saint Ronan
- Ar Gedour, Efflamm Caouissin : 1er Juin, Saint RonanWikipedia : Saint Ronan