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La France et les États-Unis : deux chemins différents.
En 1791, alors même que les Etats-Unis inscrivaient dans leur constitution le droit à défendre ses intérêts auprès des élus, la loi Le Chapelier et le décret d’Allarde interdisaient cela en France. Pire, des amendes étaient prévues pour les communes recevant des doléances. Il fallut attendre la fin du 19ème siècle pour que la libre promotion et défense des intérêts soit de nouveau autorisée. Est-ce de là que vient cette réticence pour tout ce qui est appelé lobbying ?
Lobbying : définition.
Car qu’est-ce que le lobbying, sinon le fait de vouloir défendre et promouvoir ses intérêts auprès des pouvoirs publics (élus et administrations), soit de façon réactive, soit de façon proactive ? Certains mettent en avant l’absence de transparence, pourtant exigée par les professionnels eux-mêmes avant même les actions politiques. L’argument ne tient pas : il en va de leur réputation et donc de leur chiffre d’affaires !
Et ceux qui dénoncent le lobbying sont souvent ceux qui en font sans le dire : les associations de parents demandant à la mairie d’enlever les arbres de la cour de récréation, des riverains et associations s’opposant à l’extraction de sable dans une baie, les consommateurs refusant la présence de perturbateurs endocriniens dans les biberons, des ONG pourfendant la chasse et la pêche aux requins, Emmaüs avec la loi sur le recyclage…
Paris… et les régions ?
Le lobbying est aujourd’hui très développé à Paris (le nombre de cabinets a été multiplié par 5 ces dernières années), à Londres, à Bruxelles (entre 20 et 30.000 lobbyistes) et à Washington. Des cabinets spécialisés sont-ils présents en région ? Non ! Les très rares sont filiales de groupes d’abord implantés à Paris. En Bretagne, les lobbyistes professionnels au service des acteurs économiques et sociaux sont quasiment inexistants.
Pourquoi le lobbying est-il encore si peu présent en Bretagne ?
Beaucoup sont persuadés que leur seul réseau est efficace et qu’ils n’ont aucunement besoin de services adaptés et professionnalisés. Les réseaux sont importants, évidemment, mais ils ne garantissent nullement l’efficacité d’une action : les décideurs au sein de l’administration changent régulièrement, le réseau n’est pas toujours du bon côté, les enjeux dépassent parfois le simple jeu des relations, etc. J’ai par exemple défendu, avec succès, les intérêts de PME familiales dans le secteur du funéraire face au réseau très organisé des assureurs. Le réseau de ces derniers ne leur a pas permis de remporter la bataille législative que j’ai menée ! L
e réseau n’a pas non plus permis à la Loire-Atlantique de retrouver sa région historique, la Bretagne.
D’autres sont persuadés que seule leur fédération ou association professionnelle peut valablement défendre leurs intérêts. Bien évidemment, il ne s’agit absolument pas de court-circuiter les Medef, CPME, CJD et autres associations.
Ces dernières sont essentielles.
En revanche, le lobbying tel qu’il existe aujourd’hui est complémentaire, personnalisé, source de synergies et de plus grande efficacité. Une fédération professionnelle ne défendra pas les seuls intérêts d’une unique entreprise : il faut que la majorité des membres veuillent agir. Et cela n’est pas toujours le cas. En outre, partage-t-on toujours tout avec ses concurrents, même dans une fédération professionnelle ?
Les esprits ne sont pas mûrs pour ce type de métier, dit-on. Peut-être. Quand, alors, le seront-ils ? Les esprits n’étaient pas mûrs non plus lorsque la ceinture de sécurité est devenue obligatoire dans les voitures ! Chaque métier et chaque entreprise est de plus en plus soumise à des réglementations et législations croisées. Aucune n’est ou ne sera épargnée par une nouvelle disposition, une nouvelle contrainte.
Il en va de la croissance du chiffre d’affaires !
Les services de lobbying existent justement pour promouvoir les intérêts de l’entreprise, défendre sa productivité et contribuer au renforcement de sa croissance. C’est un investissement autant qu’un site Internet pour un commerçant ou qu’un comptable pour une profession libérale. Doit-on attendre encore et encore pour défendre ses intérêts. Il sera trop tard !
L’image du métier, enfin, n’est pas bonne. Certes, des comportements contraires à l’éthique ont pu être observés… comme dans toute profession. Dénonce-t-on tous les anesthésistes sous prétexte que l’un d’entre eux a tué des patients ? Dénonce-t-on tous les journalistes sous prétexte que l’un d’entre eux n’a pas vérifié ses sources ? Il faut apporter un peu de raison dans le débat et chercher objectivement à comprendre ce métier. L’Institut de Locarn le dit lui-même : le lobbying est nécessaire !
Un besoin de pédagogie… et de curiosité !
Ainsi donc, un fort besoin de pédagogie est important en Bretagne. Les acteurs économiques et sociaux de la région ont besoin de ce métier mais ne le réalisent pas toujours. Voici un exemple parmi d’autres : il existe trois belles entreprises de dispositifs médicaux en Bretagne.
La Commission européenne va travailler sur un règlement européen visant à mieux encadrer ces produits tandis que l’Assemblée nationale propose déjà 36 mesures. Que vont faire nos entreprises bretonnes ? Comment vont-elles dialoguer avec les pouvoirs publics ? Vont-elles être passives ou actives ? Il en va de leur croissance, de leur développement.
Au centre : l’attractivité et la compétitivité de la Bretagne.
Et derrière la promotion et la défense des intérêts de ces entreprises, c’est la compétitivité de notre région qui est en jeu. Une région n’est grande et forte que lorsque ses entreprises le sont. Par leurs créations de richesses et leurs innovations, elles créent de l’emploi, attirent des compétences (et donc des familles), et accentuent l’attractivité de la Bretagne. N’ayons donc pas peur de ces nouveaux métiers. Défendre la Bretagne et son économie implique de dépasser les comportements trop connus et les approches plus ou moins artisanales. N’ayons pas peur d’oser : c’est en osant que la Bretagne s’est construite !